ANNALES DE L'EMPIRE - CATALOGUE DES EMPEREURS - FERDINAND II - Partie 54.2

Publié le par loveVoltaire

ANNALES DE L'EMPIRE - CATALOGUE DES EMPEREURS - FERDINAND II - Partie 54.2

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FERDINAND II,

 

 

QUARANTE-SIXIÈME EMPEREUR.

 

 

 

(Partie 2)

 

 

 

 

 

1619. Dans le temps même que Ferdinand II est couronné empereur, les états de Bohême nomment pour roi l'électeur palatin. Cet honneur était devenu plus dangereux qu'auparavant par la nomination de Ferdinand à l'empire ; c'était le temps d'une grande crise pour le parti protestant. Si Frédéric eût été secouru par son beau-père Jacques, roi d'Angleterre, le succès paraissait assuré ; mais Jacques ne lui donna que des conseils, et ces conseils furent de refuser ; il ne le crut pas, et s'abandonna à la fortune (1).

 

Il est solennellement couronné dans Prague le 4 novembre avec l'électrice princesse d'Angleterre ; mais il est couronné par l'administrateur des hussites, non par l'archevêque de Prague.

 

Cela seul annonçait une guerre de religion aussi bien que de politique ; tous les princes protestants, hors l'électeur de Saxe, étaient pour lui : il avait dans son armée quelques troupes anglaises, que des seigneurs d'Angleterre lui avaient amenées par amitié pour lui, par haine pour la religion catholique, et par la gloire de faire ce que son beau-père Jacques Ier, ne faisait pas. Il était secondé par le vayvode de Transylvanie, Bethlem-Gabor, qui attaquait le même ennemi en Hongrie. Gabor pénétra même jusqu'aux portes de Vienne, et de là il retourna sur ses pas prendre Presbourg. La Silésie était toute soulevée contre l'empereur ; le comte de Mansfeld soutenait en Bohême le parti du palatin ; les protestants même de l'Autriche inquiétaient l'empereur. Si la maison bavaroise avait été réunie, comme celle d'Autriche le fut toujours, le parti du nouveau roi de Bohême aurait été le plus fort : mais le duc de Bavière, riche et puissant, était loin de contribuer à la grandeur de la branche aînée de sa maison. La jalousie, l'ambition, la religion, le jetèrent dans le parti de l'empereur, de sorte qu'il arriva à la maison bavaroise, sous Ferdinand de Gratz, ce qui était arrivé à la maison de Saxe sous Charles-Quint.

 

La ligue protestante et la ligue catholique étaient à peu près également puissantes dans l'Allemagne ; mais l'Espagne et l'Italie appuyaient Ferdinand ; elles lui fournissaient de l'argent levé sur le clergé, et des troupes. La France, qui n'était pas encore gouvernée par le cardinal de Richelieu, oubliait ses anciens intérêts. La cour de Louis XIII, faible et orageuse, semblait avoir des vues (supposé qu'elle en eût), toutes contraires aux desseins du grand Henri IV.

 

1620. Louis XIII envoie en Allemagne le duc d'Angoulême, à la tête d'une ambassade solennelle, pour offrir ses bons offices, au lieu d'y marcher avec une armée. Les princes assemblés à Ulm écoutent le duc d'Angoulême, et ne concluent rien ; la guerre en Bohême continue. Bethlem-Gabor se fait reconnaître roi en Hongrie, comme le palatin Frédéric V en Bohême. Un ambassadeur de la Porte et un de Venise favorisent cette révolution des états de Hongrie dans la ville de Neuhausel. On n'était pas accoutumé à voir ainsi les Turcs et les Vénitiens réunis ; mais Venise avait tant de démêlés avec la branche d'Autriche espagnole, qu'elle déclarait ouvertement ses sentiments contre toute la maison.

 

Toute l'Europe était partagée dans cette querelle, mais plutôt par des vœux que par des effets; et l'empereur était bien mieux secondé en Allemagne que l'électeur palatin.

 

D'un côté l'électeur de Saxe, déclaré pour l'empereur, entre dans la Lusace ; de l'autre, le duc de Bavière pénètre en Bohême avec une puissante armée, tandis que les armes de l'empereur résistent, au moins en Hongrie, contre Bethlem-Gabor.

 

Le palatin est attaqué à la fois et dans son nouveau royaume de Bohême, et dans son électorat. Henri-Frédéric de Nassau, frère, et depuis successeur de Maurice le stathouder des Provinces-Unies, y combattait pour lui. Il y avait encore des Anglais ; mais contre lui était le célèbre Spinola, avec l'élite des troupes des Pays-Bas espagnols. Le Palatinat est ravagé. Une bataille décide en Bohême du sort de la maison d'Autriche et de la maison palatine.

 

Frédéric est entièrement défait le 19 novembre, auprès de Prague, par son parent Maximilien de Bavière. Il fuit d'abord en Silésie avec sa femme et deux de ses enfants, et perd en un jour les États de ses aïeux et ceux qu'il avait acquis.

 

1621. Le roi d'Angleterre, Jacques, négocie en faveur de son malheureux gendre aussi infructueusement qu'il s'était conduit faiblement.

 

L'empereur met l'électeur palatin au ban de l'empire, par un arrêt de son conseil aulique, le 20 janvier. Il proscrit le duc de Jagerndorff en Silésie, le prince d'Aubalt, les comtes de Hohenlohe, de Mansfeld, de La Tour, tous ceux qui ont pris les armes pour Frédéric.

 

Ce prince vaincu n'a pour lui que des intercesseurs et point de vengeurs. Le roi de Danemark presse l'empereur d'user de clémence. Ferdinand n'en fait pas moins passer par la main du bourreau un grand nombre de gentilshommes bohémiens.

 

Un des ses généraux, le comte de Bucquoi, achève de soumettre ce qui reste de rebelles en Bohême ; et de là il court assurer la Haute-Hongrie contre Bethlem-Gabor. Bucquoi est tué dans cette campagne ; et Ferdinand s'accommode bientôt avec le Transylvain, auquel il cède un grand terrain, pour être plus sûr du reste.

 

Cependant l'électeur palatin se réfugie de Silésie en Danemark, et de Danemark en Hollande. Le duc de Bavière s'empare du Haut-Palatinat, tandis que le marquis de Spinosa répand dans le Palatinat les troupes espagnoles, fournies par l'archiduc, gouverneur des Pays-Bas.

 

Le palatin n'avait pu obtenir de son beau-père le roi Jacques, et du roi de Danemark, que de bons offices et des ambassades inutiles à Vienne. Il n'obtenait rien de la France, dont l'intérêt était de prendre son parti. Ses seules ressources étaient alors dans deux hommes qui devaient naturellement l'abandonner. C'était le duc de Jagerndortf en Silésie, et le comte de Mansfeld dans le Palatinat, tous deux proscrits par l'empereur, et pouvant mériter leur grâce en quittant le parti du palatin. Ils firent pour lui des efforts incroyables. Mansfeld surtout fut toujours à la tête d'une petite armée, qu'il conserva malgré la puissance autrichienne. Elle n'avait pour toute solde que l'art de Mansfeld de faire la guerre en partisan habile, art assez en usage alors, dans un temps où l'on ne connaissait pas ces grandes armées toujours subsistantes, et où un chef résolu pouvait se maintenir quelque temps à la faveur des troubles. Mansfeld réveillait et encourageait les princes protestants voisins.

 

Christiern surtout, prince de Brunvick, administrateur, ce qui, au fond, ne veut dire qu'usurpateur de l'évêché d'Halbertadt, se joignit à Mansfeld. Ce Christiern s'intitulait Ami de Dieu et ennemi des prêtres ; il n'était pas moins ennemi des peuples dont il ravageait le territoire. Mansfeld et lui firent beaucoup de mal au pays, sans faire du bien à l'électeur palatin.

 

Les princes d'Orange et les Provinces-Unies, qui faisaient la guerre contre les Espagnols, aux Pays-Bas, étaient obligés d'y employer toutes leurs forces, et n'étaient pas en état de donner au palatin des secours efficaces. Son parti était accablé ; mais il ne laissait pas de donner de temps en temps de violentes secousses, et, à la moindre occasion, il se trouvait quelque prince protestant qui armait en sa faveur. Le landgrave de Hesse-Cassel disputait quelques terres au landgrave de Darmstadt. Piqué contre l'empereur, qui favorisait son compétiteur, il soutenait, autant qu'il le pouvait, le parti de l'électeur palatin. Le margrave de Bade-Dourlach s'unissait avec Mansfeld, et, en général, tous les princes protestants, craignant de se voir bientôt forcés de restituer les biens ecclésiastiques, paraissaient disposés à prendre les armes dès qu'ils seraient secondés de quelques puissances.

 

1622. C'est toujours le duc de Bavière qui fait le bonheur de Ferdinand. Ce sont ses généraux et ses troupes qui achèvent de ruiner le parti du palatin son parent. Tilly, général bavarois, qui depuis fut un des plus grands généraux de l'empereur, défait entièrement auprès d'Aschafenbourg ce prince de Brunsvick surnommé à bon droit l'ennemi des prêtres, puisqu'il venait de piller l'abbaye de Fulde et toutes les terres ecclésiastiques de cette partie de l'Allemagne.

 

Il ne restait plus que Mansfeld qui pût défendre encore le Palatinat ; et il en était capable, étant à la tête d'une petite armée qui, avec les débris de celle de Brunsvick, allait jusqu'à dix mille hommes. Mansfeld était un homme extraordinaire, bâtard d'un comte de ce nom, n'ayant de fortune que son courage et son habileté ; secouru en secret des princes d'Orange et des autres protestants, il se trouvait général d'une armée qui n'appartenait qu'à lui.

 

Le malheureux Frédéric fut assez mal conseillé pour renoncer à ce secours, dans l'espérance qu'il obtiendrait de l'empereur des conditions favorables qu'il ne pouvait obtenir que par la force. Il pressa lui-même Brunsvick et Mansfeld de l'abandonner. Ces deux chefs errants passent en Lorraine et en Alsace et cherchent de nouveaux pays à ravager.

 

Alors Ferdinand II, pour tout accommodement avec l'électeur palatin, envoie Tilly victorieux prendre Heidelberg, Manheim, et le reste du pays ; tout ce qui appartenait à l'électeur fut regardé comme le bien d'un proscrit. Il avait la plus nombreuse et la plus belle bibliothèque d'Allemagne surtout en manuscrits ; elle fut transportée chez le duc de Bavière, qui l'envoya par eau à Rome. Plus du tiers fut perdu par un naufrage, et le reste est conservé encore dans le Vatican (2).

 

La religion et l'amour de la liberté excitent toujours quelques troubles en Bohême ; mais ce ne sont plus que des séditions qui finissent par des supplices. L'empereur fait sortir de Prague tous les ministres luthériens, et fait fermer leurs temps. Il donne aux jésuites l'administration de l'université de Prague. Il n'y avait plus alors que la Hongrie qui pût inquiéter la prospérité de l'empereur. Il achève de s'assurer la paix avec Bethlem-Gabor, en le reconnaissant souverain de la Transylvanie, et en lui cédant, sur les frontières de son État, sept comtés qui composent cinquante lieux de pays. Le reste de la Hongrie, théâtre éternel de la guerre, ravagé depuis longtemps sans interruption, n'était encore à la maison d'Autriche d'aucune ressource ; mais c'était toujours un boulevard des États autrichiens.

 

 

 

1 – Il ne se décida à accepter la couronne que sur les instances de sa femme et du duc de Bouillon. (G.A.)

 

2 – Trente-neuf manuscrits grecs ou latins de cette collection furent transportés à Paris en 1797. Ils furent revendiqués en 1815 par l'université de Heidelberg, qui reconquit en même temps huit cent quarante-sept autres manuscrits allemands restés au Vatican. (G.A.)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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