DICTIONNAIRE PHILOSOPHIQUE - E comme ÉGLISE - Partie 4
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E comme ÉGLISE.
(Partie 4)
DES PRIMITIFS APPELÉS QUAKERS.
Les guerres religieuses et civiles de la Grande-Bretagne ayant désolé l’Angleterre, l’Écosse et l’Irlande, dans le règne infortuné de Charles Ier, Guillaume Penn, fils d’un vice-amiral, résolut d’aller rétablir ce qu’il appelait la primitive Église sur les rivages de l’Amérique septentrionale, dans un climat doux, qui lui parut fait pour ses mœurs. Sa secte était nommée celle des trembleurs ; dénomination ridicule, mais qu’ils méritaient par les tremblements de corps qu’ils affectaient en prêchant, et par un nazillonnement qui ne fut dans l’Église romaine que le partage d’une espèce de moines appelés capucins. Mais on peut, en parlant du nez et en se secouant, être doux, frugal, modeste, juste et charitable. Personne ne nie que cette société de primitifs ne donnât l’exemple de toutes ces vertus.
Penn voyait que les évêques anglicans et les presbytériens avaient été la cause d’une guerre affreuse pour un surplis, des manches de linon, et une liturgie ; il ne voulut ni liturgie, ni linon, ni surplis : les apôtres n’en avaient point. Jésus-Christ n’avait baptisé personne ; les associés de Penn ne voulurent point être baptisés.
Les premiers fidèles étaient égaux : ces nouveaux venus prétendirent l’être autant qu’il est possible. Les premiers disciples reçurent l’esprit et parlaient dans l’assemblée (1) ; ils n’avaient ni autels, ni temples, ni ornements, ni cierges, ni encens, ni cérémonies : Penn et les siens se flattèrent de recevoir l’esprit, et renoncèrent à toute cérémonie, à tout appareil. La charité était précieuse aux disciples du Sauveur : ceux de Penn firent une bourse commune pour secourir les pauvres. Ainsi ces imitateurs des esséniens et des premiers chrétiens, quoique errant dans les dogmes et dans les rites, étaient pour toutes les autres sociétés chrétiennes un modèle étonnant de morale et de police.
Enfin cet homme singulier alla s’établir avec cinq cents des siens dans le canton alors le plus sauvage de l’Amérique. La reine Christine de Suède avait voulu y fonder une colonie qui n’avait pas réussi ; les primitifs de Penn eurent plus de succès.
C’était sur les bords de la rivière Delaware, vers le quarantième degré. Cette contrée n’appartenait au roi d’Angleterre que parce qu’elle n’était réclamée alors par personne, et que les peuples nommés par nous sauvages, qui auraient pu la cultiver, avaient toujours demeuré assez loin dans l’épaisseur des forêts. Si l’Angleterre n’avait eu ce pays que par droit de conquête, Penn et ses primitifs auraient eu en horreur un tel asile. Ils ne regardaient ce prétendu droit de conquête que comme une violation du droit de la nature, et comme une rapine.
Le roi Charles II déclara Penn souverain de tout ce pays désert, par l’acte le plus authentique, du 4 mars 1681. Penn, dès l’année suivante, y promulgua ses lois. La première fut la liberté civile entière, de sorte que chaque colon possédant cinquante acres de terre était membre de la législation ; la seconde, une défense expresse aux avocats et aux procureurs de prendre jamais d’argent ; la troisième, l’admission de toutes les religions, et la permission même à chaque habitant d’adorer Dieu dans sa maison, sans assister jamais à aucun culte public.
Voici cette loi telle qu’elle est portée :
« La liberté de conscience étant un droit que tous les hommes ont reçu de la nature avec l’existence, et que tous les gens paisibles doivent maintenir, il est fermement établi que personne ne sera forcé d’assister à aucun exercice public de religion.
Mais il est expressément donné plein pouvoir à chacun de faire librement l’exercice public ou privé de sa religion, sans qu’on puisse y apporter aucun trouble ni empêchement sous aucun prétexte, pourvu qu’il fasse profession de croire en un seul Dieu éternel, tout-puissant, créateur, conservateur, gouverneur de l’univers, et qu’il remplisse tous les devoirs de la société civile, auxquels on est obligé envers ses compatriotes. »
Cette loi est encore plus indulgente, plus humaine que celle qui fut donnée aux peuples de la Caroline par Locke, le Platon de l’Angleterre, si supérieur au Platon de la Grèce. Locke n’a permis d’autres religions publiques que celles qui seraient approuvées par sept pères de famille. C’est une autre sorte de sagesse que celle de Penn.
Mais ce qui est pour jamais honorable pour ces deux législateurs, et ce qui doit servir d’exemple éternel au genre humain, c’est que cette liberté de conscience, n’a pas causé le moindre trouble. On dirait au contraire que Dieu a répandu ses bénédictions les plus sensibles sur la colonie de la Pensylvanie : elle était de cinq cents personnes en 1682 ; et en moins d’un siècle elle s’est accrue jusqu’à près de trois cent mille ; c’est la proportion de cent cinquante à un. La moitié des colons est de la religion primitive ; vingt autres religions composent l’autre moitié. Il y a douze beaux temples dans Philadelphie, et d’ailleurs chaque maison est un temple. Cette ville a mérité son nom d’amitié fraternelle. Sept autres villes et mille bourgades fleurissent sous cette loi de concorde. Trois cents vaisseaux partent du port tous les ans.
Cet établissement, qui semble mériter une durée éternelle, fut sur le point de périr dans la funeste guerre de 1755, quand d’un côté les Français avec leurs alliés sauvages, et les Anglais avec les leurs, commencèrent par se disputer quelques glaçons de l’Acadie.
Les primitifs, fidèles à leur christianisme pacifique, ne voulurent point prendre les armes. Des sauvages tuèrent quelques-uns de leurs colons sur la frontière ; les primitifs n’usèrent point de représailles ; ils refusèrent même longtemps de payer des troupes. Ils dirent au général anglais ces propres paroles : « Les hommes sont des morceaux d’argile qui se brisent les uns contre les autres ; pourquoi les aiderions-nous à se briser ? »
Enfin dans l’assemblée générale par qui tout se règle, les autres religions l’emportèrent ; on leva des milices ; les primitifs contribuèrent, mais ils ne s’armèrent point. Ils obtinrent ce qu’ils s’étaient proposé, la paix avec leurs voisins. Ces prétendus sauvages leur dirent : « Envoyez-nous quelque descendant du grand Penn, qui ne nous trompa jamais ; nous traiterons avec lui. » On leur députa un petit-fils de ce grand homme, et la paix fut conclue.
Plusieurs primitifs avaient des esclaves nègres pour cultiver leurs terres ; mais ils ont été honteux d’avoir en cela imité les autres chrétiens ; ils ont donné la liberté à leurs esclaves en 1769 (2).
Toutes les autres colonies les imitent aujourd’hui dans la liberté de conscience ; et quoiqu’il y ait des presbytériens et des gens de la haute Église, personne n’est gêné dans sa croyance. C’est ce qui a égalé le pouvoir des Anglais en Amérique à la puissance espagnole, qui possède l’or et l’argent. Il y aurait un moyen sûr d’énerver toutes les colonies anglaises, ce serait d’y établir l’inquisition.
N.B. – L’exemple des primitifs nommés quakers a produit dans la Pensylvanie une société nouvelle dans un canton qu’elle appelle Eufrate ; c’est la secte des dunkards, ou des dumplers, beaucoup plus détachée du monde que celle de Penn, espèce de religieux hospitaliers, tous vêtus uniformément : elle ne permet pas aux mariés d’habiter la ville d’Eufrate ; ils vivent à la campagne qu’ils cultivent. Le trésor public fournit à tous leurs besoins dans les disettes. Cette société n’administre le baptême qu’aux adultes ; elle rejette le péché originel comme une impiété, et l’éternité des peines comme une barbarie. Leur vie pure ne leur laisse pas imaginer que Dieu puisse tourmenter ses créatures cruellement et éternellement. Egarés dans un coin du Nouveau-Monde, loin du troupeau de l’Église catholique, ils sont jusqu’à présent, malgré cette malheureuse erreur, les plus justes et les plus inimitables des hommes.
QUERELLE ENTRE L’ÉGLISE GRECQUE ET LA
LATINE DANS L’ASIE ET DANS L’EUROPE.
Les gens de bien gémissent, depuis environ quatorze siècles, que les deux Églises grecque et latine aient été toujours rivales, et que la robe de Jésus-Christ, qui était sans couture, ait été toujours déchirée. Cette division est bien naturelle. Rome et Constantinople se haïssaient ; quand les maîtres se détestent, leurs aumôniers ne s’aiment pas. Les deux communions se disputaient la supériorité de la langue, l’antiquité des sièges, la science, l’éloquence, le pouvoir.
Il est vrai que les Grecs eurent longtemps tout l’avantage ; ils se vantaient d’avoir été les maîtres des Latins, et de leur avoir tout enseigné. Les Évangiles furent écrits en grec. Il n’y avait pas un dogme, un rite, un mystère, un usage qui ne fût grec ; depuis le mot de baptême jusqu’au mot d’eucharistie, tout était grec. On ne connut de Pères de l’Églises que parmi les Grecs jusqu’à saint Jérôme, qui même n’était pas Romain, puisqu’il était de Dalmatie. Saint Augustin, qui suivit de près saint Jérôme, était Africain. Les sept grands conciles œcuméniques furent tenus dans des villes grecques ; les évêques de Rome n’y parurent jamais, parce qu’ils ne savaient que leur latin, qui même était déjà corrompu.
L’inimitié entre Rome et Constantinople éclata dès l’an 452, au concile de Chalcédoine, assemblé pour décider si Jésus-Christ avaient eu deux natures et une personne, ou deux personnes avec une nature. On y décida que l’Église de Constantinople était en tout égale à celle de Rome pour les honneurs, et le patriarche de l’une égal en tout au patriarche de l’autre. Le pape saint Léon souscrivit aux deux natures, mais ni lui ni ses successeurs ne souscrivirent à l’égalité. On peut dire que dans cette dispute de rang et de prééminence on allait directement contre les paroles de Jésus-Christ rapportées dans l’Évangile : « Il n’y aura parmi vous ni premier ni dernier. » Les saints sont saints, mais l’orgueil se glisse partout : le même esprit qui fait écumer de colère le fils d’un maçon devenu évêque d’un village, quand on ne l’appelle pas monseigneur (3), a brouillé l’univers chrétien.
Les Romains furent toujours moins disputeurs, moins subtils que les Grecs ; mais ils furent bien plus politiques. Les évêques d’Orient, en argumentant, demeurèrent sujets ; celui de Rome, sans arguments, sut établir enfin son pouvoir sur les ruines de l’empire d’Occident ; et on pouvait dire des papes ce que Virgile dit des Scipions et des Césars :
Romanos rerum dominos gentemque togatam.
VIRG., Æneid., I, 286.
vers digne de Virgile, rendu comiquement par un de nos vieux traducteurs :
Tous gens en robe et souverains des rois.
La haine devint une scission du temps de Photius, pâpa ou surveillant de l’Église byzantine, et Nicolas Ier, pâpa ou surveillant de de l’Eglise romaine. Comme malheureusement il n’y eut presque jamais de querelle ecclésiastique sans ridicule, il arriva que le combat commença par deux patriarches qui étaient tous deux eunuques : Ignace et Photius, qui se disputaient la chaire de Constantinople, étaient tous deux chaponnés. Cette mutilation leur interdisant la vraie paternité, ils ne pouvaient être que Pères de l’Église.
On dit que les châtrés sont tracassiers, malins, intrigants. Ignace et Photius troublèrent toute la cour grecque.
Le Latin Nicolas Ier ayant pris le parti d’Ignace, Photius déclara ce pape hérétique, attendu qu’il admettait la procession du souffle de Dieu, du Saint-Esprit, par le Père et par le Fils, contre la décision unanime de toute l’Église, qui ne l’avait fait procéder que du Père.
Outre cette procession hérétique, Nicolas mangeait et faisait manger des œufs et du fromage en carême. Enfin, pour comble d’infidélité, le pâpa romain se faisait raser la barbe, ce qui était une apostasie manifeste aux yeux des pâpas grecs, vu que Moïse, les patriarches et Jésus-Christ étaient toujours peints barbus par les peintres grecs et latins.
Lorsqu’en 879 le patriarche Photius fut rétabli dans son siège par le huitième concile œcuménique grec, composé de quatre cents évêques, dont trois cents l’avaient condamné dans le concile œcuménique précédent, alors le pape Jean VIII le reconnut pour son frère. Deux légats, envoyés par lui à ce concile, se joignirent à l’Église grecque, et déclarèrent Judas quiconque dirait que le Saint-Esprit procède du Père et du Fils ; mais ayant persisté dans l’usage de se raser le menton et de manger des œufs en carême, les deux Églises restèrent toujours divisées.
Le schisme fut entièrement consommé l’an 1053 et 1054, lorsque Michel Cerularius, patriarche de Constantinople, condamna publiquement l’évêque de Rome Léon IX et tous les Latins, ajoutant à tous les reproches de Photius qu’ils osaient se servir de pain azyme dans l’eucharistie, contre la pratique des apôtres ; qu’ils commettaient le crime de manger du boudin, et de tordre le cou aux pigeons au lieu de le leur couper pour les cuire. On ferma toutes les églises latines dans l’empire grec, et on défendit tout commerce avec quiconque mangeait du boudin.
Le pape Léon IX négocia sérieusement cette affaire avec l’empereur Constantin Monomaque, et obtint quelques adoucissements. C’était précisément le temps où ces célèbres gentilshommes normands, enfants de Tancrède de Hauteville, se moquant du pape et de l’empereur grec, prenaient tout ce qu’ils pouvaient dans la Pouille et dans la Calabre, et mangeaient du boudin effrontément. L’empereur grec favorisa le pape autant qu’il put ; mais rien ne réconcilia les Grecs avec nos Latins. Les Grecs regardaient leurs adversaires comme des barbares qui ne savaient pas un mot de grec.
L’irruption des croisés, sous prétexte de délivrer les saints lieux, et dans le fond pour s’emparer de Constantinople, acheva de rendre les Romains odieux.
Mais la puissance de l’Église latine augmenta tous les jours, et les Grecs furent enfin conquis peu à peu par les Turcs. Les papes étaient depuis longtemps de puissants et riches souverains ; toute l’Église grecque fut esclave depuis Mahomet II, excepté la Russie, qui était alors un pays barbare, et dont l’Église n’était pas comptée.
Quiconque est un peu instruit des affaires du Levant sait que le sultan confère le patriarcat des Grecs par la crosse et par l’anneau, sans crainte d’être excommunié, comme le furent les empereurs allemands par les papes pour cette cérémonie.
Bien est-il vrai que l’Église de Stamboul a conservé en apparence la liberté d’élire son archevêque ; mais elle n’élit que celui qui est indiqué par la Porte ottomane. Cette place coûte à présent environ quatre-vingt mille francs, qu’il faut que l’élu reprenne sur les Grecs. S’il se trouve quelque chanoine accrédité qui offre plus d’argent au grand vizir, on dépossède le titulaire, et on donne la place au dernier enchérisseur, précisément comme Marozia et Théodora donnaient le siège de Rome dans le dixième siècle. Si le patriarche titulaire résiste, on lui donne cinquante coups de bâton sur la plante des pieds, et on l’exile. Quelquefois on lui coupe la tête, comme il arriva au patriarche Lucas Cyrille, en 1638.
Le Grand-Turc donne ainsi tous les autres évêchés moyennant finance ; et la somme à laquelle chaque évêché fut taxé sous Mahomet. Il est toujours exprimée dans la patente ; mais le supplément qu’on a payé n’y est pas énoncé. On ne sait jamais au juste combien un prêtre grec achète son évêché.
Ces patentes sont plaisantes : « J’accorde à N***, prêtre chrétien, le présent mandement pour perfection de félicité. Je lui commande de résider en la ville ci-nommée, comme évêque des infidèles chrétiens, selon leur ancien usage et leurs vaines et extravagantes cérémonies ; voulant et ordonnant que tous les chrétiens de ce district le reconnaissent, et que nul prêtre ni moine ne se marie sans sa permission » (c’est-à-dire sans payer).
L’esclavage de cette Église est égal à son ignorance ; mais les Grecs n’ont que ce qu’ils ont mérité ; ils ne s’occupaient que de leurs disputes sur la lumière du Thabor et sur celle de leur nombril, lorsque Constantinople fut prise.
On espère qu’au moment où nous écrivons ces douloureuses vérités, l’impératrice de Russie Catherine II rendra aux Grecs leur liberté. On souhaite qu’elle puisse leur rendre le courage et l’esprit qu’ils avaient du temps de Miltiade, de Thémistocle, et qu’ils aient de bons soldats et moins de moines au mont Athos (4).
DE LA PRÉSENTE ÉGLISE GRECQUE.
Si quelque chose peut nous donner une grande idée des mahométans, c’est la liberté qu’ils ont laissée à l’Église grecque. Ils ont paru dignes de leurs conquêtes, puisqu’ils n’en ont point abusé. Mais il faut avouer que les Grecs n’ont pas trop mérité la protection que les musulmans leur accordent ; voici ce qu’en dit M. Porter, ambassadeur d’Angleterre en Turquie :
« Je voudrais tirer le rideau sur ces disputes scandaleuses des Grecs et des Romains au sujet de Bethléem et de la Terre-Sainte, comme ils l’appellent. Les procédés iniques, odieux, qu’elles occasionnent entre eux, font la honte du nom chrétien. Au milieu de ces débats, l’ambassadeur chargé de protéger la communion romaine, malgré sa dignité éminente, devient véritablement un objet de compassion.
Il se lève dans tous les pays de la croyance romaine des sommes immenses, pour soutenir contre les Grecs des prétentions équivoques à la possession précaire d’un coin de terre réputée sacrée, et pour conserver entre les mains des moines de leur communion les restes d’une vieille étable à Bethléem, où l’on a érigé une chapelle, et où, sur l’autorité incertaine d’une traduction orale, on prétend que naquit le Christ ; de même qu’un tombeau, qui peut être, et plus vraisemblablement peut n’être pas ce qu’on appelle son sépulcre ; car la situation exacte de ces deux endroits est aussi peu certaine que la place qui recèle les cendres de César. »
Ce qui rend les Grecs encore plus méprisables aux yeux des Turcs, c’est le miracle qu’ils font tous les ans au temps de Pâques. Le malheureux évêque de Jérusalem s’enferme dans le petit caveau qu’on fait passer pour le tombeau de notre Seigneur Jésus-Christ, avec des paquets de petites bougie ; il bat le briquet, allume un de ces petits cierges, et sort de son caveau en criant : « Le feu du ciel est descendu, et la sainte bougie est allumée. » Tous les Grecs aussitôt achètent de ces bougies, et l’argent se partage entre le commandant turc et l’évêque.
On peut juger par ce seul trait de l’état déplorable de cette Église sous la domination du Turc.
L’Église grecque, en Russie, a pris depuis peu une consistance beaucoup plus respectable, depuis que l’impératrice Catherine II l’a délivrée du soin de son temporel ; elle lui a ôté quatre cent mille esclaves qu’elle possédait. Elle est payée aujourd’hui du trésor impérial ; entièrement soumise au gouvernement, contenue par des lois sages, elle ne peut faire que du bien ; elle devient tous les jours savante et utile. Elle a aujourd’hui un prédicateur nommé Platon, qui a fait des sermons que l’ancien Platon grec n’aurait pas désavoués.
1 – « Les hallucinations du tact étant très fréquentes parmi des personnes aussi nerveuses et aussi exaltées, dit M. Renan, le moindre courant d’air, accompagné d’un frémissement au milieu du silence, était considéré comme le passage de l’Esprit. L’un croyait sentir, bientôt tous sentaient, et l’enthousiasme se communiquait de proche en proche. L’analogie de ces phénomènes avec ceux que l’on retrouve chez les visionnaires de tous les temps est facile à saisir. Ils se produisent journellement, en partie sous l’influence de la lecture du livre des Actes des Apôtres, dans les sectes anglaises ou américaines de quakers, jumpers, shakers, irvingiens, chez les mormons, dans les camp-meetings et les revivals de l’Amérique. On les a vus reparaître chez nous dans la secte dite des spirites. » (G.A.)
2 – On sait que le quakerisme eut aussi son bout de rôle dans la Révolution française. Brissot en fut pour ainsi dire le représentant. Il affectait de porter le costume de la secte et se trouvait à la tête de la société des Amis des noirs qu’il avait fondée bien avant 89. (G.A.)
3 – Biord, évêque d’Annecy. (K.)
4 – Cet article parut en 1771, dans les Questions sur l’Encyclopédie. (voir lettre de Voltaire à Catherine II du 22 Décembre 1770). (G.A.)