LA BIBLE EXPLIQUÉE - Partie 111
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LA BIBLE EXPLIQUÉE.
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ANCIEN TESTAMENT.
(Partie 111)
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ROIS.
LIVRE IV.
Manassé, fils d'Ezéchias, avait douze ans (Chapitre XXI, v. 1.), lorsqu'il commença à régner... Il dressa des autels à Baal... et à toute l'armée du ciel dans les deux parvis du temple d'Adonaï... Il fit passer son fils par le feu, il prédit l'avenir, il observa les augures ; fit des pythons et des aruspices (1)... Il s'endormit enfin avec ses pères, et fut enseveli dans le jardin de sa maison...
Josias avait huit ans (Chapitre XXII, v. 1.) lorsqu'il commença à régner, et il régna trente et un ans, et il fit ce qui est agréable au Seigneur...
Or un jour le grand-prêtre Helcias (Chapitre XXII, v. 8.) dit à Saphan, secrétaire : J'ai trouvé le livre de la Loi dans le temple du Seigneur en faisant fondre de l'argent (2)...
Saphan, secrétaire, dit au roi : Le grand-prêtre Helcias m'a donné ce livre. Et il le lut devant le roi.
Et le roi Josias déchira ses vêtements... ; et il dit au grand-prêtre Helcias, et à Saphan, secrétaire : Allez, consultez Adonaï sur moi et sur le peuple touchant les paroles de ce livre qu'on a trouvé.
Et le roi assembla tous les prêtres (Chapitre XXIII, v. 8.) des villes de Juda, et il souilla tous les hauts lieux... ; il souilla aussi la vallée de Topheth, afin que personne ne sacrifiât plus son fils (3) ou sa fille à Moloch... Il ôta aussi les chevaux que les rois de Juda avaient donnés au soleil à l'entrée du temple... Il tua tous les prêtres des hauts lieux qui étaient à Béthel... ; et brûla sur ces autels des os de morts... ; puis il dit à tout le peuple : Célébrez la pâque en l'honneur d'Adonaï votre Dieu, selon ce qui est écrit dans ce livre du pacte avec Dieu (4)...
1 - Ou Manassé, roitelet de Juda, n'avait jamais entendu parler du miracle du cadran de son père, et des autres miracles d'Isaïe : ou il ne regardait Adonaï que comme un dieu local,un dieu d'une petite nation, qui faisait quelquefois des prodiges, mais qui était inférieur aux autres dieux ; ou Manassé était tout à fait fou : car il n'y a qu'un fou qui puisse, après des miracles sans nombre, nier ou mépriser le Dieu qui les a faits. Cette inconcevable incrédulité de Manassé, fils d'Ezéchias, peut faire penser qu'en effet le Pentateuque, à peine écrit par ce prêtre hébreu qui vint enseigner les Samaritains, n'était pas encore connu, la religion judaïque n'était pas encore débrouillée, rien n'était constaté, rien n'était fait : autrement il serait impossible d'imaginer comment le culte changea tant de fois depuis la création jusqu'à Esdras.
2 - Nouvelle preuve, ou du moins nouvelle vraisemblance très forte, que le prêtre hébreu, venu à Samarie, avait enfin achevé son Pentateuque, et que le grand-prêtre juif en avait un exemplaire. Tout ce qui peut nous étonner, c'est que ce prêtre ne le porta pas lui-même au roi, et l'envoya avec très peu d'empressement et de respect par le secrétaire Saphan. S'il avait cru que ce livre fût écrit par Moïse, il l'aurait porté avec la pompe la plus solennelle ; on aurait institué une fête pour éterniser la découverte de la loi de Dieu et de l'histoire des premiers siècles du genre humain ; c'eût été une nouvelle occasion de dire que la lumière soit, et la lumière fût ; car le peuple hébreu était plongé dans les plus épaisses ténèbres.
3 - Ce petit article est curieux. D'abord ce Josias souille les hauts lieux : souiller un lieu réputé sacré, c'était le remplir d'immondices, y répandre des excréments et de l'urine. La vallée de Lopeth était auprès du petit torrent de Cédron ; c'était là que l'on jetait les corps des suppliciés à la voirie, et qu'on sacrifiait ses enfants.
C'est la première fois qu'il est parlé dans l'Écriture de chevaux consacrés au soleil. Cette coutume était visiblement prise du culte des Perses. Presque chaque ligne concourt à prouver que jamais la religion hébraïque n'eut une forme stable qu'après le retour de la captivité : les Juifs empruntèrent tous leurs rites, toutes leurs cérémonies des Égyptiens, des Syriens, des Chaldéens, des Perses.
Il n'est pas aisé de concevoir comment ce Josias tua tous les prêtres de Béthel ; car Béthel, tout voisin qu'il était de Jérusalem, ne lui appartenait pas : c'était à Béthel que s'était établi ce prêtre qui était envoyé aux Samaritains, et qu'on suppose avoir écrit le Pentateuque. S'il amena avec lui d'autres missionnaires pour enseigner aux Samaritains la religion israélite, le melch Josias, en les tuant, ne fut donc qu'un assassin, qu'un tyran abominable.
La coutume de brûler des os de mort, et surtout de bêtes mortes, pour souiller des lieux consacrés, était un usage des sorciers : on voit dans la Vie du dernier des Zoroastres que ses ennemis cachèrent dans sa chambre un petit sac plein d'os de bêtes, afin de le faire passer pour un magicien. Voyez HYDE. (Voltaire.) - Hyde, savant orientaliste anglais, né en 1636, mort en 1703. (G.A.)
4 - Si Josias propose de faire la pâque selon le rite indiqué dans ce livre du pacte avec Dieu, dans ce livre unique, trouvé par le grand-prêtre au fond d'un coffre et donné au roi par le secrétaire Saphan, on n'avait donc point fait la pâque auparavant ; et, en effet, aucun des livres de l'Écriture ne parle d'une célébration de pâque (voyez Roi, I. IV, ch. XXII, v. 3 et 8; et Paralipomènes, I. II, ch XXXIV, v. 18) sous aucun roi de Juda ou d'Israël, ni sous aucun des juges : c'est encore une confirmation de cette opinion très répandue et très vraisemblable, que la religion hébraïque n'était point formée ; que les livres judaïques n'avaient jamais été rassemblées, et selon tant de doctes, qu'ils n'avaient point été écrits ; que tout s'était fait d'après des traditions vagues et changeantes, et que c'est ainsi que tout s'est fait dans le monde.