COMMENTAIRE SUR L'ESPRIT DES LOIS - Partie 2

Publié le par loveVoltaire

COMMENTAIRE SUR L'ESPRIT DES LOIS - Partie 2

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COMMENTAIRE

 

SUR L'ESPRIT DES LOIS.

 

 

 

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- Partie 2 -

 

 

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AVANT PROPOS DE L'AUTEUR.

 

 

 

 

 

      Montesquieu fut compté parmi les hommes les plus illustres du dix-huitième siècle, et cependant il ne fut pas persécuté : il ne fut qu'un peu molesté pour ses Lettres persanes, ouvrage imité du Siamois de Dufresni, et de l'Espion turc (1), imitation très supérieure aux originaux, mais au-dessous de son génie. Sa gloire fut l'Esprit des lois ; les ouvrages des Grotius et des Puffendorf n'étaient que des compilations ; celui de Montesquieu parut être celui d'un homme d'État, d'un philosophe, d'un bel esprit, d'un citoyen. Presque tous ceux qui étaient les juges naturels d'un tel livre, gens de lettres, gens de loi de tous les pays, le regardèrent et le regardent encore comme le code de la raison et de la liberté. Mais dans les deux sectes des jansénistes et des jésuites, qui existaient encore, il se trouva des écrivains qui prétendirent se signaler contre ce livre, dans l'espérance de réussir à la faveur de son nom, comme les insectes s'attachent à la poursuite de l'homme, et se nourrissent de sa substance. Il y avait quelques misérables profits alors à débiter des brochures théologiques, et en attaquant les philosophes. Ce fut une belle occasion pour le gazetier des Nouvelles ecclésiastiques (2), qui vendait toutes les semaines l'histoire moderne des sacristains de paroisse, des porte-Dieu, des fossoyeurs, et des marguilliers. Cet homme cria contre le président de Montesquieu : Religion ! religion ! Dieu ! Dieu ! et il l'appela déiste et athée, pour mieux vendre sa gazette. Ce qui semble peu croyable, c'est que Montesquieu daigna lui répondre. Les trois doigts qui avaient écrit l'Esprit des lois s'abaissèrent jusqu'à écraser par la force de la raison, et à coups d'épigrammes, la guêpe convulsionnaire qui bourdonnait à ses oreilles quatre fois par mois.

 

      Il ne fit pas le même honneur aux jésuites ; ils se vengèrent de son indifférence en publiant à sa mort qu'ils l'avaient converti (3). On ne pouvait attaquer sa mémoire par une calomnie plus lâche et plus ridicule. Cette turpitude fut bien reconnue lorsque peu d'années après les jésuites furent proscrits sur le globe entier, qu'ils avaient trompé par tant de controverses et troublé par tant de cabales.

 

 

 

 

 

 

1 - L'Espion turc est de Marana. Madame Dunoyer y travailla aussi. (G.A.)

 

2 - Journal janséniste, dont la rédaction fut toujours anonyme. (G.A.)

 

3 - On sait que ce fut le jésuite irlandais Routh qui fut chargé de cette pieuse entreprise. (G.A.)

 

4 - Ouvrage du fermier général Claude Dupin, et des Pères Plesse et Berthier. La préface est, dit-on, de madame Dupin, seconde femme du fermier, qui prit un moment J.-J. Rousseau pour précepteur de son fils. (G.A.)

 

5 - Voltaire rendait justice à l'auteur de l'Esprit des lois ; il aimait son beau génie, son esprit vif et brillant, et louait beaucoup l'emploi honorable et courageux qu'il fit de ses lumières : mais il regrettait que, par trop de confiance en des écrivains à peine connus et des voyageurs ignorants, il eût mêlé plusieurs erreurs essentielles à de nombreuses et importantes vérités. Il lui semblait nécessaire de prémunir les jeunes gens et les étrangers contre ces erreurs, que l'autorité d'un grand nom pouvait accréditer dans leur esprit. C'est- le même zèle pour la vérité, le même désir d'être utile, qui l'avaient décidé autrefois à commenter les tragédies de Corneille et les Pensées de Pascal, en suspendant des occupations plus chères et plus glorieuses, et se livrant à un travail long et pénible. Sans doute il n'eût point fait pour des auteurs vulgaires un pareil sacrifice de son temps. (Note de Wagnière.)

 

Il y avait longtemps que Voltaire avait relevé quelques erreurs de l'Esprit des lois dans les Questions sur l'Encyclopédie ou le Dictionnaire philosophique, article LOIS, et dans le premier dialogue entre A, B, C. Il a voulu depuis rendre ce travail plus complet, et l'a rédigé de nouveau dans ce Commentaire, l'un de ses derniers ouvrages.Si quelquefois il a répondu à des écrivains très médiocres, tels par exemple qu'un La Beaumelle, c'est qu'il jugeait que le soin de désabuser l'Europe des erreurs grossières, et surtout des calomnies atroces qu'y répandait celui-ci, devait l'emporter sur le mépris que méritait le calomniateur. Quant aux petits auteurs satiriques qui croyaient accabler Voltaire dans sa vieillesse; s'il daignait quelquefois leur dire un mot, c'est qu'il avait besoin de s'épanouir la rate, et voulait s'égayer en égayant le public à leurs dépens. (K.)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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