THÉÂTRE - Les lois de Minos - Partie 1

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THÉÂTRE - Les lois de Minos - Partie 1

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LES LOIS DE MINOS.

 

 

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TRAGÉDIE EN CINQ ACTES,

 

NON REPRÉSENTÉE.

 

 

 

 

- 1773 -

 

 

 

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AVERTISSEMENT POUR LA PRÉSENTE ÉDITION.

 

 

 

 

 

        

          En 1771, tous les porte-couronne du Nord se déclaraient les fidèles adorateurs de la raison philosophique ; aussi Voltaire, en ses écrits, glorifiait-il le roi de Prusse, l’impératrice de Russie, le roi de Danemark, le roi de Suède et le roi de Pologne. C’est même à la nouvelle de l’attentat dont ce dernier fut alors victime qu’il imagina les Lois de Minos. Dans ce sujet analogue à celui des Guèbres, Teucer ne devait être qu’un Stanislas masqué, et les Crétois figurer les seigneurs polonais qui s’étaient confédérés sous l’étendard de la vierge de Czentochowa. Mais le partage inattendu de la Pologne ayant eu lieu, et le roi Stanislas ayant joué dans cette triste affaire le plus triste des rôles, le philosophe dupé se retourna vers la Suède, et s’écria : « C’est Gustave III que j’ai voulu peindre. » Gustave III venait à la même heure, en effet, de s’affranchir du joug aristocratique de son sénat, pour mieux appliquer, à l’en croire, les principes philosophiques.

 

          Ce n’est pas, toutefois, aux seuls Polonais ou Suédois que Voltaire songea en écrivant cette pièce. Il eut aussi en vue Louis XV et messieurs du parlement, comme dans les Guèbres. Il emprunta même à cette tragédie un personnage, le vieil Arzémon, sous les traits duquel il s’était peint.

 

          Comme il avait compté sur les Guèbres pour rentrer à Paris, il fonda la même espérance sur les Lois de Minos. Mais, triste présage ! une pièce qui flétrissait aussi le fanatisme, les Druides, de Leblanc, se vit à ce moment même interdite après douze représentations. Voltaire, se tenant pour averti, crut bon de faire imprimer sournoisement sa tragédie avant toute autre démarche ;  mais le libraire de Lyon auquel il s’adressa n’ayant pu obtenir licence d’imprimer à cause du mot lois qui parut suspect, force fut au patriarche de s’adresser en droiture aux comédiens. Les Lois de Minos, bien corrigées, bien mitigées leur furent donc présentées comme étant l’œuvre d’un jeune avocat, M. Duroncel ; elles leur furent débitées par un simple acteur de rencontre, et le tripot, sans rien soupçonner, accepta la pièce avec acclamations. Or, les rôles étaient distribués, et déjà même on répétait, quand voilà ces maudites Lois qui paraissent imprimées et défigurées à Paris même, chez Valade ; un confident de Voltaire, le censeur Marin, avait livré un manuscrit inexact ; et le secret est trahi, et les cabales se forment, et l’on signale les allusions, et Voltaire aussitôt de retirer sa pièce.

 

          Il résolut alors de s’en remettre à la providence d’une de ses plus vieilles connaissances, le duc de Richelieu, surintendant des Menus. Il lui manda qu’il comptait sur lui pour faire jouer sa tragédie à Fontainebleau, et qu’il allait par avance la lui dédier. Vainement d’Alembert cria au patriarche que le Richelieu était un traître ; qu’il n’avait nulle influence à la cour, qu’il était méprisé de tout le monde, que la dédicace serait une faute, Voltaire n’en imprima pas moins ses Lois de Minos avec des notes philosophiques, et sa dédicace à Richelieu. Seulement, cette dédicace n’est qu’un long persiflage.

 

          Quant à Richelieu, il laissa faire, il amusa son homme, et, comme d’Alembert avait dit, il promit tout et ne tint rien. Voltaire espérait d’être joué aux fêtes du mariage du comte d’Artois ; il avait même, à cette occasion, envoyé quelques montres de sa fabrique à certains personnages pour mieux enlever l’affaire : il en fut pour ses montres. Le patriarche ne se consola qu’en apprenant qu’un acteur de passage à Lyon, Larive, venait d’y représenter ses Lois avec succès. – Notons ici que de tous les auteurs Voltaire est le seul qui ait fait sérieusement de la décentralisation dramatique.

 

 

GEORGES AVENEL.

 

 

 

 

 

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