SATIRE - Autre déclaration
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AUTRE DÉCLARATION.
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On m’a communiqué une nouvelle apologie manuscrite du sieur Vernet, professeur. Je ne sais si c’est la cinquième ou la sixième dudit sieur, car il fait fort souvent son apologie. Il dit, page 18, « que, quand on fait un marché à tant la feuille, on est obligé de le tenir. » J’ignore s’il a tenu ses marchés à tant la feuille : c’est une affaire qui ne me regarde pas. Il assure, page 31, qu’un libelle de sa façon, en deux volumes, imprimé sans permission à Genève, sous le nom de Copenhague, n’est point un fatras (2). Lisez mon livre, dit-il : cet ordre est bien rigoureux.
Je suis fâché que toute son apologie roule sur un mensonge très grossier. Il feint que ses lettres, écrites à Colmar, roulent sur une édition des Annales de l’Empire, et non sur une édition de l’Histoire générale, dont il voulait s’emparer au préjudice de MM. les frères Cramer. Je lui déclare qu’il en a menti, et qu’il ne m’a jamais écrit à Colmar que pour me prier de lui confier l’édition de l’Histoire générale. On n’a qu’à venir dans mon château vérifier ses lettres.
Pages 6 et 7, il prétend qu’il avait seulement consenti à être mon correcteur d’imprimerie, et qu’il ne l’avait jamais demandé.
Il en a encore menti ; car si, dix ans auparavant, je lui avais parlé le premier de faire imprimer mes œuvres à Genève, et de le gratifier de cette édition, ce qui n’est pas vrai, cela n’empêche point du tout qu’il ne m’ait écrit à Colmar, en 1754, pour me supplier de permettre qu’il fût mon éditeur à Genève. Il dit, page 26, que je voulus le consulter, ne le connaissant pas, et que je changeai d’avis dès que je le connus : cela est vrai.
Fait à Ferney, 23 Août 1766.
1 – Vernet ayant composé un nouveau mémoire à sa louange, Voltaire refit une autre déclaration avant même que Vernet eût imprimé sa pièce. (G.A.)
2 – Voyez la Lettre curieuse. (G.A.)