PRECIS DU SIECLE DE LOUIS XV - Chapitre XXXVI - Partie 2
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PRÉCIS DU SIÈCLE DE LOUIS XV
CHAPITRE XXXVI.
‒ PARTIE 2 ‒
(Mars) Le parlement assigna l’évêque d’Orléans à comparaître pour des sacrements. Il fit brûler par le bourreau tous les écrits dans lesquels on lui contestait sa juridiction, excepté les déclarations du roi. Il envoya des conseillers faire enregistrer ses arrêts en Sorbonne malgré les ordres du roi. On voyait tous les jours le bourreau occupé à brûler des mandements d’évêque, et les recors de la justice faisaient communier les malades la baïonnette au bout du fusil. Le parlement, dans toutes ses démarches, ne consultait que ses lois et le maintien de son autorité. Le roi voyait au-delà, il considérait les convenances qui demandent souvent que les lois plient.
Enfin, pour la troisième fois, le parlement cessa de rendre la justice aux citoyens, pour ne s’occuper que des refus de sacrements qui troublaient la France entière.
Le roi lui envoya, aussi pour la troisième fois, des lettres de jussion, qui lui ordonnaient de remplir ses devoirs, et de ne plus faire souffrir ses sujets plaideurs de ces querelles étrangères. Les procès des particuliers n’ayant aucun rapport à la bulle Unigenitus.
(Mai 1753) Le parlement répondit qu’il violerait son serment s’il reconnaissait les lettres-patentes du roi, et qu’il ne pouvait obtempérer (vieux mot tiré du latin, qui signifie obéir).
Alors le roi se crut obligé d’exiler tous les membres des enquêtes, les uns à Bourges, les autres à Poitiers, quelques-uns en Auvergne, et d’en faire enfermer quatre qui avaient parlé avec le plus de force.
On épargna la grand’chambre : mais elle crut qu’il y allait de son honneur de n’être point épargnée. Elle persista à ne point rendre la justice au peuple, et à procéder contre les réfractaires. Le roi l’envoya à Pontoise, bourg à six lieues de Paris, où le duc d’Orléans l’avait déjà envoyée pendant sa régence.
L’Europe s’étonnait qu’on fît tant de bruit en France pour si peu de chose, et les Français passaient pour une nation frivole qui, faute de bonnes lois reconnues, mettait tout en feu pour une dispute méprisée partout ailleurs. Quand on a vu cinq cent mille hommes en armes pour l’élection d’un empereur, l’Europe, l’Inde et l’Amérique, désolées, et qu’on retombe ensuite dans cette petite guerre de plume, on croit entendre le bruit d’une pluie après les éclats de tonnerre. Mais on devait se souvenir que l’Allemagne, la Suède, la Hollande, la Suisse, avaient autrefois éprouvé des secousses bien plus violentes pour des inepties ; que l’inquisition d’Espagne était pire que des troubles civils, et que chaque nation a des folies et ses malheurs.
(Juillet 1753) Le parlement de Normandie imita celui de Paris sur les sacrements. Il ajourna l’évêque d’Evreux, il cessa aussi de rendre la justice. Le roi envoya un officier de ses gardes biffer les registres de ce parlement, qui fut à la fin plus docile que celui de Paris.
La justice distributive interrompue dans la capitale eût été un grand bonheur, si les hommes étaient sages et justes ; mais comme ils ne sont ni l’un ni l’autre, et qu’il faut plaider, le roi commit des membres de son conseil d’Etat pour vider les procès en dernier ressort. (Novembre) On voulut faire enregistrer l’érection de cette chambre au Châtelet, comme s’il était nécessaire qu’une justice inférieure donnât l’authenticité à l’autorité royale. L’usage de ces enregistrements avait eu presque toujours ses inconvénients ; mais ce défaut de formalité en aurait eu peut-être de plus grands encore. Le Châtelet refusa l’enregistrement, on l’y força par des lettres de jussion. La chambre royale s’assembla, mais les avocats ne voulurent point plaider ; on se moqua dans Paris de la chambre royale ; elle en rit elle-même : tout se tourna en plaisanterie, selon le génie de la nation, qui rit toujours le lendemain de ce qui l’a consternée ou animée la veille. Les ecclésiastiques riaient aussi, mais de la joie de leur triomphe.
(Juillet 1754) Boyer, ancien évêque de Mirepoix, qui avait été le premier auteur de tous ces troubles, sans le savoir, étant tombé en enfance par son grand âge, et par la constitution de ses organes, tout parut tendre à la conciliation. Les ministres négocièrent avec le parlement de Paris. Ce corps fut rappelé, et revint, à la satisfaction de toute la ville, et au bruit de la populace qui criait : « Vive le parlement ! (Auguste) Son retour fut un triomphe. Le roi, qui était aussi fatigué de l’inflexibilité des ecclésiastiques que de celle des parlements, ordonna le silence et la paix, et permit aux juges séculiers de procéder contre ceux qui troubleraient l’un ou l’autre.
(Septembre) Le schisme éclatait de temps en temps à Paris et dans les provinces ; et, malgré les mesures que le roi avait prises pour empêcher les refus de sacrements, plusieurs évêques cherchaient à se faire un mérite de ces refus auprès de la cour de Rome. Un évêque de Nantes, ayant donné dans sa ville cet exemple de rigueur ou de scandale, fut condamné par le simple présidial de Nantes à payer six mille francs d’amende, et les paya sans que le roi le trouvât mauvais, tant il était las de ces disputes.
De pareilles scènes arrivaient dans tout le royaume, et, en attristant quelques intéressés, amusaient la multitude oisive. Il y avait à Orléans un vieux chanoine janséniste qui se mourait, et à qui ses confrères refusaient la communion. (Octobre) Le parlement de Paris les condamna à douze mille livres d’amende, et ordonna que le malade serait communié. Le lieutenant criminel, en conséquence, arrangea tout pour cette cérémonie comme pour une exécution ; les chanoines firent tant que leur confrère mourut sans sacrements, et ils l’enterrèrent le plus mesquinement qu’ils purent.
Rien n’était devenu plus commun dans le royaume que de communier par arrêt du parlement. Le roi, qui avait exilé ses juges séculiers pour n’avoir pas obtempéré à ses ordres, voulut tenir la balance égale, et exiler aussi ceux du clergé qui s’obstineraient au schisme. Il commença par l’archevêque de Paris. (Décembre 1754) Il fut relégué à sa maison de Conflans, à trois quarts de lieue de la ville ; exil doux, qui ressemblait plus à un avertissement paternel qu’à une punition (1).
Les évêques d’Orléans et de Troyes furent pareillement exilés à leurs maisons de plaisance, avec la même douceur. L’archevêque de Paris, étant aussi inflexible dans sa maison de Conflans que dans sa demeure épiscopale, fut relégué plus loin.
Le parlement, pouvant alors agir en liberté, réprimait la Sorbonne, qui ayant autrefois regardé la bulle avec horreur, la regardait maintenant comme une règle de foi. Elle menaçait de cesser ses leçons ; et le parlement, qui avait lui-même cessé ses fonctions plus importantes, ordonnait à la faculté de continuer les siennes ; il soutenait les libertés de l’Eglise gallicane, et le roi l’approuvait ; mais quand il allait trop loin, le roi l’arrêtait ; et en confirmant la partie des arrêts qui tendait au bien public, il cassait celle qui lui paraissait trop peu mesurée. Ce monarque se voyait toujours entre deux grandes factions animées, comme les empereurs romains entre les bleus et les verts ; il était occupé de la guerre maritime que l’Angleterre commençait à lui faire ; celle de terre paraissait inévitable : ce n’était guère le temps de parler d’une bulle (2).
Il lui fallait encore apaiser les contestations du grand conseil et de ses parlements ; car presque rien n’étant déterminé en France par des lois précises, les bornes, les privilèges de chaque corps étant incertains, le clergé ayant toujours voulu étendre sa juridiction, les chambres des comptes ayant disputé aux parlements beaucoup de prérogatives, les pairs ayant souvent plaidé pour les leurs contre le parlement de Paris, il n’était pas étonnant que le grand conseil eût avec lui quelques querelles.
Ce grand conseil était originairement le conseil des rois, et les accompagnait dans tous leurs voyages. Tout changea peu à peu dans l’administration publique, et le grand conseil changea aussi. Il ne fut plus qu’une cour de judicature sous Charles VIII. Il décide des évocations, de la compétence des juges, de tous les procès concernant tous les bénéfices du royaume, excepté de la régale ; il a droit de juger ses propres officiers. (Janvier, février et mars 1756) Un conseiller de cette cour fut appelé au Châtelet pour ses dettes. Le grand conseil revendiqua la cause, et cassa la sentence du Châtelet. Aussitôt le parlement s’émeut, casse l’arrêt du grand conseil, et le roi casse l’arrêt du parlement. Nouvelles remontrances, nouvelles querelles ; tous les parlements s’élèvent contre le grand conseil, et le public se partage. Le parlement de Paris convoque encore les pairs pour cette dispute de corps, et le roi défend encore aux pairs cette association : l’affaire enfin reste indécise comme tant d’autres.
Cependant le roi avait des occupations plus importantes. Il fallait soutenir contre les Anglais, sur terre et sur mer, une guerre onéreuse ; il faisait en même temps cette mémorable fondation de l’école Militaire, le plus beau monument de son règne, que l’impératrice Marie-Thérèse a imité depuis. Il fallait des secours de finance, et le parlement se rendait difficile sur l’enregistrement des édits qui ordonnaient la perception des deux vingtièmes. On a été depuis obligé d’en payer trois, parce que, lorsqu’on a la guerre, il faut que les citoyens combattent, ou qu’ils payent ceux qui combattent ; il n’y a pas de milieu.
(2 auguste 1756) Le roi tint un lit de justice à Versailles, où il convoqua les princes et les pairs avec le parlement de Paris ; il y fit enregistrer ses édits (3) mais le parlement de retour à Paris, protesta contre cet enregistrement. Il prétendait que non-seulement il n’avait pas eu la liberté nécessaire de l’examen, mais que cet édit demandait des modifications qui ne blessassent ni les intérêts du roi, ni ceux de l’Etat qui étaient les mêmes, et qu’il avait fait serment de maintenir ; et il disait que son devoir n’était pas de plaire, mais de servir : ainsi le zèle combattait l’obéissance.
Les épines du schisme se mêlaient à l’importante affaire des impôts. Un conseiller du parlement, malade à sa campagne, dans le diocèse de Meaux, demanda les sacrements ; un curé les lui refusa comme à un ennemi de l’Eglise, et le laissa mourir sans cette cérémonie : on procéda contre le curé, qui prit la fuite.
L’archevêque d’Aix avait fait un nouveau formulaire sur la bulle, et le parlement d’Aix l’avait condamné à donner dix mille livres aux pauvres ; il fut obligé de faire cette aumône, et il en fut pour son formulaire et pour son argent (septembre). L’évêque de Troyes avait troublé son diocèse, le roi l’envoya prisonnier chez les moines en Alsace. L’archevêque de Paris, à qui l’on avait permis de revenir à Conflans, déclara excommuniés ceux qui liraient les arrêts et les remontrances des parlements sur la bulle et sur les billets de confession.
Louis XV, que tant d’animosités, embarrassaient, poussa la circonspection jusqu’à demander l’avis du pape Lambertini, Benoît XIV, homme aussi modéré que lui, aimé de la chrétienté pour la douceur et la gaieté de son caractère, et qui est aujourd’hui regretté de plus en plus. Il ne se mêla jamais d’aucune affaire que pour recommander la paix. C’était son secrétaire des brefs, le cardinal Passionei, qui faisait tout. Ce cardinal, le seul alors dans le sacré collège qui fût homme de lettres, était un génie assez élevé pour mépriser les disputes dont il s’agissait. Il haïssait les jésuites qui avaient fabriqué la bulle ; il ne pouvait se taire sur la fausse démarche qu’on avait faite à Rome de condamner dans cette bulle des maximes vertueuses, d’une vérité éternelle, qui appartiennent à tous les temps et à toutes les nations, celle-ci, par exemple : « La crainte d’une excommunication injuste ne doit point empêcher de faire son devoir. »
Cette maxime est dans toute la terre la sauvegarde de la vertu. Tous les anciens, tous les modernes, ont dit que le devoir doit l’emporter sur la crainte du supplice même.
Mais quelque étrange que parût la bulle en plus d’un point, ni le cardinal Passionei ni le pape ne pouvaient rétracter une constitution regardée comme une loi de l’Eglise. Benoît XIV envoya au roi une lettre circulaire pour tous les évêques de France, dans laquelle il regardait, à la vérité, cette bulle comme une loi universelle, à laquelle on ne peut résister « sans se mettre en danger de perdre son salut éternel ; » mais enfin il décidait que, « pour éviter le scandale, il faut que le prêtre avertisse les mourants soupçonnés de jansénisme qu’ils seront damnés, et les communier à leurs risques et périls. »
Le même pape, dans sa lettre particulière au roi, lui recommandait les droits de l’épiscopat. Quand on consulte un pape, quel qu’il soit, on doit bien s’attendre qu’il écrira comme un pape doit écrire.
Mais Benoît XIV, en rendant ce qu’il devait à sa place, donnait aussi tout ce qu’il pouvait à la paix, à la bienséance, à l’autorité du monarque. On imprima le bref du pape adressé aux évêques. (9 décembre 1756) Le parlement eut le courage ou la témérité de le condamner et de le supprimer par un arrêt. Cette démarche choqua d’autant plus le roi que c’était lui-même qui avait envoyé aux évêques ce bref condamné par son parlement. Il n’était point question dans ce bref des libertés de l’Eglise gallicane et des droits de la monarchie, que le parlement soutenus et vengés dans tous les temps. La cour vit dans la censure du parlement plus de mauvaise humeur que de modération.
Le conseil croyait avoir un autre sujet de réprouver la conduite du parlement de Paris ; plusieurs autres cours supérieures, qui portent le nom de parlement, s’intitulaient Classes du parlement du royaume ; c’est un titre que le chancelier de l’Hospital leur avait donné ; il ne signifiait que l’union des parlements dans l’intelligence et le maintien des lois : les parlements ne prétendaient pas moins que représenter l’Etat entier, divisé en différentes compagnies, qui toutes faisant un seul corps, constitueraient les états généraux perpétuels du royaume. Cette idée eût été grande ; mais elle eût été trop grande, et l’autorité royale en était irritée (4).
Ces considérations, jointes aux difficultés qu’on faisait sur l’enregistrement des impôts, déterminèrent le roi à venir réformer le parlement de Paris dans un lit de justice.
Quelque secret que le ministère eût gardé, il perça dans le public. Le roi fut reçu dans Paris avec un morne silence. Le peuple ne voit dans un parlement que l’ennemi des impôts ; il n’examine jamais si ces impôts sont nécessaires ; il ne fait pas même réflexion qu’il vend sa peine et ses denrées plus cher à proportion des taxes, et que le fardeau tombe sur les riches. Ceux-ci se plaisent eux-mêmes, et encouragent les murmures de la populace (5).
Les Anglais dans cette guerre ont été plus chargés que les Français ; mais, en Angleterre, la nation se taxe elle-même, elle sait sur quoi les emprunts seront remboursés. La France est taxée, et ne sait jamais sur quoi seront assignés les fonds destinés au paiement des emprunts. Il n’y a point en Angleterre de particuliers qui traitent avec l’Etat des impôts publics, et qui s’enrichissent aux dépens de la nation ; c’est le contraire en France. Les parlements de France ont toujours fait des remontrances aux rois contre ces abus ; mais il y a des temps où ces remontrances, et surtout les difficultés d’enregistrer, sont plus dangereuses que ces impôts mêmes, parce que la guerre exige des secours présents, et que l’abus de ces secours ne peut être corrigé qu’avec le temps.
Le roi vint au parlement faire lire un édit par lequel il supprimait deux chambres de ce corps et plusieurs officiers (6). Il ordonna qu’on respectât la bulle Unigenitus, défendit que les juges séculiers prescrivissent l’administration des sacrements, en leur permettant seulement de juger des abus et des délits commis dans cette administration, enjoignant aux évêques de prescrire à tous les curés la modération et la discrétion, et voulant que toutes les querelles passées fussent ensevelies dans l’oubli (13 décembre 1756). Il ordonna que nul conseiller n’aurait voix délibérative avant l’âge de vingt-cinq ans, et que personne ne pourrait opiner dans l’assemblée des chambres qu’après avoir servi dix années. Il fit enfin les plus expresses « inhibitions d’interrompre, sous quelque prétexte que ce pût être, le service ordinaire. »
Le chancelier alla aux avis pour la forme ; le parlement garda un profond silence ; le roi dit qu’il voulait être obéi, et « qu’il punirait quiconque oserait s’écarter de son devoir. »
Le lendemain quinze conseillers de la grand’chambre remirent leur démission sur le bureau. Cent quatre-vingts membres du parlement (7) se démirent bientôt de leurs charges. Les murmures furent grands dans toute la ville (8).
Parmi tant d’agitations qui troublaient tous les esprits au milieu d’une guerre funeste, dans le prodigieux dérangement des finances qui rendait cette guerre plus dangereuse, et qui irritait l’animosité des mécontents ; enfin parmi les épines des divisions semées de tous côtés entre les magistrats et le clergé, dans le bruit de toutes ces clameurs, il était très difficile de faire le bien, et il ne s’agissait presque plus que d’empêcher qu’on ne fît beaucoup de mal.
1 – Voltaire fait entendre ici ce que M. Michelet dit très haut : que la sévérité du roi pour le clergé n’était qu’une comédie. On enlevait l’archevêque au parlement qui voulait faire son procès. (G.A.)
2 – Le roi ménageait le parlement pour avoir des fonds. Le jour où Messieurs eurent enregistré la continuation des taxes pour six ans. Louis XV se démasqua aussitôt, et déclara que son grand conseil était la cour suprême. (G.A.)
3 – Il s’agissait cette fois de prolonger le paiement des taxes pendant dix ans après la paix, c’est-à-dire pour toujours. (G.A.)
4 – C’est dans ces circonstances que Louis XV dit : « Ces grandes robes et le clergé me désolent par leurs querelles ; mais je déteste bien plus les grandes robes : mon clergé au fond m’est attaché et fidèle ; les autres voudraient me mettre en tutelle. Le régent a eu bien tort de leur rendre le droit de faire des remontrances : ils finiront par perdre l’Etat… c’est une assemblée de républicains ! … » Et, pour terminer : « Au reste, en voilà assez : les choses comme elles sont dureront autant que moi. » (G.A.)
5 – Il est très vrai que toute taxe annuelle n’est payée en réalité que par les propriétaires de terres ; la petite partie qui peut l’être par les profits du commerce étranger ne mérite point d’être comptée : mais il n’en est pas de même des taxes extraordinaires levées en temps de guerre. Celles qui portent sur les consommations du peuple ne font pas augmenter ses salaires, parce que les propriétaires alors font moins travailler. Le peuple souffre donc directement de ces taxes. Il souffre par la même raison de celles qui paraissent ne porter directement que sur les propriétaires. Celles-là ne seraient indifférentes au peuple que dans le cas où le produit de ces taxes serait employé en entier à lui procurer des salaires : encore faudrait-il qu’elles ne fussent payées que par les propriétaires riches ; le peuple, la populace même, souffrent donc réellement des impôts extraordinaires. (K.)
6 – Deux chambres des enquêtes et plus de soixante conseillers. On mutilait le parlement dans sa partie active. (G.A.)
7 – Voltaire avait mis d’abord : « Centre quatre-vingt membres se démirent de leurs charges ; les murmures furent grands dans la ville, et le roi fut assassiné… » Mais, sur les observations de ses amis, la feuille ne fut pas tirée ainsi : « Je sentis, écrit malignement Voltaire à d’Argental, que ces mots pourraient faire soupçonner à des grammairiens que cet assassinat fut le fruit immédiat du lit de justice, comme en effet Damiens l’avoua dans ses interrogatoires à Versailles et à Paris. Je sais bien qu’il est permis de dire une vérité que le parlement a fait imprimer lui-même ; mais j’ai bien senti aussi que le parlement serait fâché qu’on vît dans l’histoire ce qu’on voit dans le procès-verbal. » Et il annonce que malgré son juste ressentiment contre l’infâme condamnation de la Loi naturelle, » il a mis à la place : « Ces émotions furent bientôt ensevelies, etc. » C’est la phrase qui commence le chap. XXXVII. (G.A.)
8 – On injuriait dans les rues la Pompadour et le tyran des Français. Dans la cour du palais, sur le passage de Louis, les poissardes disaient : Il y aura une saignée ! » Et d’autres : « Il faut une révolution. » (G.A.)