JUGEMENT SUR VOLTAIRE de CHASLES
JUGEMENT SUR VOLTAIRE
De
Philarète CHASLES
1798 - 1873
HOMME DE LETTRES ET JOURNALISTE FRANÇAIS
Fixé à la terre de Ferney, il s’abandonna pendant les vingt dernières années de sa vie à cette impiété terrible qui passa les proportions de la passion humaine. Mais, comme pour faire ressortir ce trait de caractère par le contraste, en même temps que la haine des choses saintes remplissait son âme et le poussait à des excès inouïs, il faisait avec plaisir, avec passion même, un grand bien matériel. L’amour de l’humanité, cette partie intégrante de l’amour de Dieu, en restait fort indépendant dans les idées de Voltaire. Il s’occupa vivement, puissamment, des misérables qu’il appelait ses vassaux. Il leur bâtit des maisons, leur fit défricher des terres, dessécher des marais…
Sa haine contre le christianisme excitait d’abord l’horreur, puis l’étonnement. Jamais Dieu n’avait eu tant à souffrir d’un homme. Le mensonge, la calomnie, le cynisme, la bêtise même, tout, dans ses écrits de vieillard, témoignait d’un inexplicable amour du mal, d’une fécondité de pensées et de sentiments coupables qu’on n’eût pas attendue d’un âge propre aux passions. Renverser la religion, telle était sa pensée de nuit et de jour.
Le Plutarque français - Vie de Voltaire.