LA BIBLE EXPLIQUÉEE - Partie 122

Publié le par loveVoltaire

LA BIBLE EXPLIQUÉEE - Partie 122

Photo de PAPAPOUSS

 

 

 

 

LA BIBLE EXPLIQUÉE.

 

 

 

________

 

 

 

ANCIEN TESTAMENT.

 

 

 

(Partie 122)

 

 

______

 

 

 

 

 

PROPHÈTES.

 

 

 

 

 

EZÉCHIEL.

 

 

(1)

 

 

 

 

 

      Ezéchiel, captif sur les bords du fleuve Chobar, voit d'abord au milieu d'un feu quatre animaux ayant chacun quatre faces d'homme, quatre ailes, des pieds de veau, et des mains d'homme, de lion, de bœuf, et d'aigle.

 

      Il y avait près d'eux une roue à quatre faces ; lorsque les animaux marchaient, les roues marchaient aussi...

 

       Après ce spectacle, dont nous ne donnons qu'une très légère esquisse, le Seigneur présente au prophète un livre, un rouleau de parchemin, et lui dit (Chapitre III.) : Mange ce livre ; et Ezéchiel le mange ; puis le Seigneur lui dit : Va te faire lier dans ta maison ; et le prophète va se faire lier.

 

       Puis le Seigneur lui dit : (Chapitre IV.) : "Prends une brique ; dessine dessus la ville de Jérusalem, et autour d'elle une armée qui l'assiège. Prends une poêle de fer, et mets-la contre un mur de fer... ;" et le prophète fait tout cela.

 

      Ensuite le Seigneur lui dit : "Couche-toi pendant trois cent quatre-vingt-dix jours sur le côté gauche, et pendant quarante jours sur le côté droit ; mange pendant trois cent quatre-vingt-dix jours ton pain couvert de merde d'homme, devant tous les Juifs ; car c'est ainsi qu'ils mangeront leur pain tout souillé parmi les nations chez lesquelles je les chasserai."

 

      Ce sont là les ordres positifs que donne le Seigneur ; ce sont là les propres termes dont il se sert. A quoi Ezéchiel répond : Ah ! ah ! ah ! (ou pouah ! pouah !) Seigneur, jamais rien d'impur n'est entré dans ma bouche. Le Seigneur lui répond : "Eh bien ! je te donne de la fiente de bœuf au lieu de merde d'homme, et tu la mêleras avec ton pain ; je vais briser dans Jérusalem le bâton du pain, et on ne mangera de pain, et on ne boira d'eau, que par mesure."

 

      Le Seigneur continue, et dit à Ezéchiel (Chapitre V.) : "Prends un fer tranchant, et coupe-toi les cheveux et la barbe ; brûle le tiers de ces poils au milieu de la ville, selon le nombre des jours du siège. Coupe avec une épée le second tiers autour de la ville, et jette au vent le tiers restant... ; car voici ce que dit le Seigneur : Parce que Jérusalem n'a pas marché dans mes préceptes, et n'a pas opéré selon le jugement de ceux qui l'environnent, j'irai à elle, j'exercerai mes jugements aux yeux des nations... Les pères mangeront leurs enfants, et les enfants mangeront leurs pères. Un tiers du peuple mourra de peste et de faim ; un tiers tombera sous le glaive dans la ville ; un tiers sera dispersé, et je le poursuivrai l'épée nue."

 

      Il s'est élevé une grande dispute entre les interprètes. Tant de choses extraordinaires, si opposées à nos mœurs et à notre raison, se sont-elles passées en visions ou en réalité ? Ezéchiel raconte-il cette histoire comme un songe, ou comme une action véritable ? Les derniers commentateurs, et surtout Calmet, ne doutent pas que tout ne se soit réellement passé comme le dit Ezéchiel. Voici comme dom Calmet s'en explique :

 

      "Nous ne voyons aucune nécessité de recourir au miracle. Il n'est nullement impossible qu'un homme demeure enchaîné et couché sur le dos pendant trois cent quatre-vingt-dix jours... Prado témoigne qu'il a vu un fou qui demeura lié et couché sur son côté pendant plus de quinze ans. Si tout cela n'était arrivé qu'en vision, comment les Juifs de la captivité auraient-ils compris ce que leur voulait dire Ezéchiel ? Comment ce prophète aurait-il exécuté les ordres de Dieu ? il faut donc dire aussi qu'il ne dressa point le plan de Jérusalem, qu'il ne fut lié, qu'il ne mangea son pain qu'en esprit et en idée."

 

      On doit donc croire qu'effectivement tout se passa comme Ezéchiel le raconte ; et cela n'est pas plus surprenant que les aventures réelles d'Elie, d'Elisée, de Samson, de Jephté, de Gédéon, de Josué, de Moïse, de Jacob, d'Abraham, de Noé, d'Adam et d'Ève. Mes prédécesseurs ontremarqué que dans les livres judaïques rien ne s'est fait de ce qui se fait aujourd'hui.

 

      De tous les passages d'Ezéchiel, celui qui a excité le plus de murmures parmi les critiques, et qui a le plus embarrassé les commentateurs, est l'article d'Oolla et d'Ooliba. Le prophète fait parler ainsi le Seigneur à Oolla : "Je t'ai fait croître comme l'herbe qui est dans les champs ; tu es parvenue au temps où les filles aiment les ornements ; tes tétons sont enflés ; ton poil a poussé ; tu étais toute nue et pleine de confusion ; j'ai passé auprès de toi ; je t'ai vue. Voilà le temps des amants. Je me suis étendu sur toi ; j'ai couvert ton ignominie ; j'ai juré un pacte avec toi, et tu as été mienne... Je t'ai donné des robes de plusieurs couleurs ; je t'ai donné des souliers bleus, une ceinture de coton... Tu as été parée d'or et d'argent, nourrie de bon pain, de miel, et d'huile ; et après cela, tu as mis ta confiance en ta beauté ; tu as forniqué en ton nom, et tu as exposé ta fornication à tous les passants ; tu t'es bâti un mauvais lieu, et tu t'es prostituée dans les rues... On paie les filles de joie, et tu as payé tes amant pour forniquer avec toi..."

 

      Ensuite le Seigneur s'adressa à Ooliba : il dit qu'Ooliba a exposé à nu ses fornications, "et insanivit libidine super concubitum corum quorum carnes sunt ut carnes asinorum, et sicut fluxus equorum fluxus eorum."

 

      Ce n'est point là le récit d'une aventure réelle comme celle du prophète Osée avec la Gomer ; ce n'est qu'une pure allégorie exprimée avec une naïveté qu'ajourd'hui nous trouverions trop grossière, et qui peut-être ne l'était point alors.

 

      Les Juifs firent beaucoup de difficultés pour insérer cette prophétie dans leur Canon ; et lorsqu'ils l'admirent, ils n'en permirent la lecture qu'à l'âge de trente ans. Une des raisons qui les portèrent à cette sévérité fut qu'E zéchiel, dans sa prophétie, fait dire au Seigneur "J'ai donné à mon peuple des préceptes qui ne sont pas bons, et je leur ai donné des ordonnances dans lesquelles ils ne trouveront point la vie." On eut peur que ce passage ne diminuât le respect des Juifs pour la loi de Moïse.

 

      On peut encore remarquer sur Ezéchiel la prédiction qu'il fait au chapitre XXXIX pour consoler les Juifs captifs. Il fait inviter par le Seigneur même tous les oiseaux et tous les quadrupèdes à venir manger la chair des guerriers qu'il immolera, et à boire le sang des princes.

 

      Et ensuite il dit, aux versets 19 et 20 : "Vous mangerez de la chair grasse jusqu'à satiété ; vous boirez le sang de la victime que je vous prépare ; vous vous rassasierez à ma table de la chair des chevaux et des cavaliers, et de tous les gens de guerre. J'établirai ma gloire parmi les nations ; elles connaîtront ma main puissante ; et dans ce jour la maison d'Israël saura que c'est moi qui suis le Seigneur."

 

      On a cru que la première promesse, de manger la chair des guerriers et de boire le sang des princes, était faite pour les oiseaux ; et que la seconde, de manger le cheval et le cavalier, était faite pour les guerriers juifs. Il y avait en effet dans les armées des Perses beaucoup de Scythes qui mangeaient de la chair humaine, et qui s'abreuvaient de sang dans le crâne de leurs ennemis. Le Seigneur pouvait dire aux Juifs qu'ils traiteraient un jour les Scythes comme les Scythes les avaient traités. Le Seigneur pouvait bien leur dire : Vous saurez que c'est moi qui suis le Seigneur ; mais il ne pouvait le dire aux quadrupèdes et aux oiseaux, qui n'en ont jamais rien su.

 

      Nous ne prétendons point entrer dans toutes les profondeurs mystérieuses de tous les prophètes, ni examiner les divers sens qu'on a donnés à leurs paroles : nous nous bornons à montrer seulement ce qu'il y a de plus singulier dans leurs aventures, et ce qui est le plus éloigné de nos mœurs.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Commenter cet article