LE SIÈCLE DE LOUIS XIV - Chapitre VI - 2 - Etat de la France

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LE SIÈCLE DE LOUIS XIV - Chapitre VI - 2 - Etat de la France

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SIÈCLE DE LOUIS XIV

 

PAR

 

VOLTAIRE

 

 

 

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(Partie 2)

 

 

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CHAPITRE VI.

 

Etat de la France jusqu’à la mort

du cardinal Mazarin, en 1661.

 

 

 

 

 

 

          La ligue faite avec Cromwell donna enfin à la France une supériorité plus marquée ; d’un côté, l’amiral Blake alla brûler les galions d’Espagne auprès des îles Canaries, et leur fit perdre les seuls trésors avec lesquels la guerre pouvait se soutenir : de l’autre, vingt vaisseaux anglais vinrent bloquer le port de Dunkerque, et six mille vieux soldats, qui avaient fait la révolution d’Angleterre, renforcèrent l’armée de Turenne.

 

          Alors Dunkerque, la plus importante place de la Flandre, fut assiégée par mer et par terre. Condé et don Juan d’Autriche, ayant ramassé toutes leurs forces, se présentèrent pour la secourir. L’Europe avait les yeux sur cet événement. Le cardinal Mazarin mena Louis XIV auprès du théâtre de la guerre, sans lui permettre d’y monter, quoiqu’il eût près de vingt ans. Ce prince se tint dans Calais. Ce fut là que Cromwell lui envoya une ambassade fastueuse, à la tête de laquelle était son gendre, le lord Falconbridge. Le roi lui envoya le duc de Créqui et Mancini, duc de Nevers, neveu du cardinal, suivis de deux cents gentilshommes. Mancini présenta au protecteur une lettre du cardinal. Cette lettre est remarquable ; Mazarin lui dit « qu’il est affligé de ne pouvoir lui rendre en personne les respects dus au plus grand homme du monde. » C’est ainsi qu’il parlait à l’assassin du gendre de Henri IV, et de l’oncle de Louis XIV, son maître.

 

          Cependant le prince maréchal de Turenne attaqua l’armée d’Espagne, ou plutôt l’armée de Flandre, près des Dunes. Elle était commandée par don Juan d’Autriche, fils de Philippe IV et d’une comédienne, et qui devint deux ans après beau-frère de Louis XIV. Le prince de Condé était dans cette armée, mais il ne commandait pas : ainsi, il ne fut pas difficile à Turenne de vaincre. Les six mille Anglais contribuèrent à la victoire, elle fut complète (14 juin 1658). Les deux princes d’Angleterre, qui furent depuis rois (1), virent leurs malheurs augmentés dans cette journée par l’ascendant de Cromwell.

 

          Le génie du grand Condé ne put rien contre les meilleures troupes de France et d’Angleterre. L’armée espagnole fut détruite. Dunkerque se rendit bientôt après. Le roi accourut avec son ministre pour voir passer la garnison. Le cardinal ne laissa paraître Louis XIV ni comme guerrier ni comme roi ; il n’avait point d’argent à distribuer aux soldats ; à peine était-il servi : il allait manger chez Mazarin ou chez le maréchal de Turenne, quand il était à l’armée. Cet oubli de la dignité royale n’était pas dans Louis XIV l’effet du mépris pour le faste, mais celui du dérangement de ses affaires, et du soin que le cardinal avait de réunir pour soi-même la splendeur et l’autorité.

 

          Louis n’entra dans Dunkerque que pour la rendre au lord Lockhart, ambassadeur de Cromwell. Mazarin essaya si par quelque finesse il pourrait éluder le traité, et ne pas remettre la place : mais Lockhart menaça, et la fermeté anglaise l’emporta sur l’habileté italienne.

 

          Plusieurs personnes ont assuré que le cardinal, qui s’était attribué l’événement d’Arras, voulut engager Turenne à lui céder encore l’honneur de la bataille des Dunes. Du Bec-Crépin, comte de Moret, vint, dit-on, de la part du ministre, proposer au général d’écrire une lettre par laquelle il parût que le cardinal avait arrangé lui-même tout le plan des opérations. Turenne reçut avec mépris ces insinuations, et ne voulut point donner un aveu qui eût produit la honte d’un général d’armée et le ridicule d’un homme d’église. Mazarin, qui avait eu cette faiblesse, eut celle de rester brouillé jusqu’à sa mort avec Turenne.

 

           Au milieu de ce premier triomphe, le roi tomba malade à Calais, et fut plusieurs jours à la mort. Aussitôt tous les courtisans se tournèrent vers son frère, Monsieur Mazarin prodigua les ménagements, les flatteries, et les promesses, au maréchal Du Plessis-Praslin, ancien gouverneur de ce jeune prince, et au comte de Guiche, son favori. Il se forma dans Paris une cabale assez hardie pour écrire à Calais contre le cardinal. Il prit ses mesures pour sortir du royaume, et pour mettre à couvert ses richesses immenses. Un empirique d’Abbeville guérit le roi avec du vin émétique que les médecins de la cour regardaient comme un poison. Ce bon homme s’asseyait sur le lit du roi, et disait : Voilà un garçon bien malade, mais il n’en mourra pas. Dès qu’il fut convalescent, le cardinal exila tous ceux qui avaient cabalé contre lui.

 

          (13 septembre 1658) Peu de mois après mourut Cromwell, à l’âge de cinquante-cinq ans (2), au milieu des projets qu’il faisait pour l’affermissement de sa puissance et pour la gloire de sa nation. Il avait humilié la Hollande, imposé les conditions d’un traité au Portugal, vaincu l’Espagne, et forcé la France à briguer son alliance Il avait dit depuis peu, en apprenant avec quelle hauteur ses amiraux s’étaient conduits à Lisbonne : « Je veux qu’on respecte la république anglaise autant qu’on a respecté autrefois la république romaine. » Les médecins lui annoncèrent la mort. Je ne sais s’il est vrai qu’il fit dans ce moment l’enthousiaste et le prophète, et s’il leur répondit que Dieu ferait un miracle en sa faveur. Thurloe, son secrétaire, prétend qu’il leur dit : La nature peut plus que les médecins (3). Ces mots ne sont point d’un prophète, mais d’un homme très sensé. Il se peut qu’étant convaincu que les médecins pouvaient se tromper, il voulût, en cas qu’il en réchappât, se donner auprès du peuple la gloire d’avoir prédit sa guérison, et rendre par là sa personne plus respectable et même plus sacrée.

 

          Il fut enterré en monarque légitime, et laissa dans l’Europe la réputation d’un homme intrépide, tantôt fanatique, tantôt fourbe, et d’un usurpateur qui avait su régner.

 

          Le chevalier Temple prétend que Cromwell avait voulu, avant sa mort, s’unir avec l’Espagne contre la France, et se faire donner Calais avec le secours des Espagnols, comme il avait eu Dunkerque par les mains des Français. Rien n’était plus dans son caractère et dans sa politique. Il eût été l’idole du peuple anglais, en dépouillant ainsi l’une après l’autre deux nations que la sienne haïssait également. La mort renversa ses grands desseins, sa tyrannie, et la grandeur de l’Angleterre.

 

          Il est à remarquer qu’on porta le deuil de Cromwell à la cour de France, et que Mademoiselle fut la seule qui ne redit point cet hommage à la mémoire du meurtrier d’un roi son parent.

 

          Nous avons vu déjà (4) que Richard Cromwell succéda paisiblement et sans contradiction au protectorat de son père, comme un prince de Galles aurait succédé à un roi d’Angleterre. Richard fit voir que du caractère d’un seul homme dépend souvent la destinée de l’Etat. Il avait un génie bien contraire à celui d’Olivier Cromwell, toute la douceur des vertus civiles, et rien de cette intrépidité féroce qui sacrifie tout à ses intérêts (5). Il eût conservé l’héritage acquis par les travaux de son père, s’il eût voulu faire tuer trois ou quatre principaux officiers de l’armée, qui s’opposaient à son élévation. Il aima mieux se démettre du gouvernement que de régner par des assassinats ; il vécut particulier, et même ignoré, jusqu’à l’âge de quatre-vingt-dix ans, dans le pays dont il avait été quelques jours le souverain. Après sa démission du protectorat, il voyagea en France : on sait qu’à Montpellier le prince de Conti, frère du grand Condé, en lui parlant sans le connaître, lui dit un jour « Olivier Cromwell était un grand homme ; mais son fils Richard est un misérable de n’avoir pas su jouir du fruit des crimes de son père. » Cependant ce Richard vécut heureux, et son père n’avait jamais connu le bonheur.

 

          Quelque temps auparavant la France vit un autre exemple bien plus mémorable du mépris d’une couronne. Christine, reine de Suède, vint à Paris. On admira en elle une jeune reine, qui à vingt-sept ans avait renoncé à la souveraineté dont elle était digne, pour vivre libre et tranquille. Il est honteux aux écrivains protestants d’avoir osé dire, sans la moindre preuve, qu’elle ne quitta sa couronne que parce qu’elle ne pouvait plus la garder (6). Elle avait formé ce dessein dès l’âge de vingt ans, et l’avait laissé mûrir sept années. Cette résolution, si supérieure aux idées vulgaires, et si longtemps méditée, devait fermer la bouche à ceux qui lui reprochaient de la légèreté et une abdication involontaire. L’un de ces deux reproches détruisait l’autre ; mais il faut toujours que ce qui est grand soit attaqué par les petits esprits.

 

          Pour connaître le génie unique de cette reine, on n’a qu’à lire ses lettres. Elle dit dans celle qu’elle écrivit à Chanut, autrefois ambassadeur de France auprès d’elle : « J’ai possédé sans faste, je quitte avec facilité. Après cela ne craignez pas pour moi ; mon bien n’est pas au pourvoir de la fortune. » Elle écrivit au prince de Condé : « Je me tiens autant honorée par votre estime que par la couronne que j’ai portée. Si, après l’avoir quittée, vous m’en jugez moins digne, j’avouerai que le repos que j’ai tant souhaité me coûte cher ; mais je ne me repentirai pourtant point de l’avoir acheté au prix d’une couronne, et je ne noircirai jamais une action qui m’a semblé si belle par un lâche repentir ; et s’il arrive que vous condamniez cette action, je vous dirai pour toute excuse que je n’aurais pas quitté les biens que la fortune m’a donnés, si je les eusse crus nécessaires à ma félicité, et que j’aurais prétendu à l’empire du monde, si j’eusse été aussi assurée d’y réussir, ou de mourir, que le serait le grand Condé. »

 

          Telle était l’âme de cette personne si singulière ; tel était son style dans notre langue, qu’elle avait parlée rarement. Elle savait huit langues ; elle avait été disciple et amie de Descartes, qui mourut à Stockholm, dans son palais, après n’avoir pu obtenir seulement une pension en France, où ses ouvrages furent même proscrits pour les seules bonnes choses qui y fussent. Elle avait attiré en Suède tous ceux qui pouvaient l’éclairer. Le chagrin de n’en trouver aucun parmi ses sujets l’avait dégoûtée de régner sur un peuple qui n’était que soldat. Elle crut qu’il valait mieux vivre avec des hommes qui pensent que de commander à des hommes sans lettres ou sans génie. Elle avait cultivé tous les arts dans un climat où ils étaient alors inconnus. Son dessein était d’aller se retirer au milieu d’eux en Italie. Elle ne vint en France que pour y passer, parce que ces arts ne commençaient qu’à y naître. Son goût la fixait à Rome. Dans cette vue elle avait quitté la religion luthérienne pour la catholique ; indifférente pour l’une et pour l’autre, elle ne fit point scrupule de se conformer en apparence aux sentiments du peuple chez lequel elle voulut passer sa vie. Elle avait quitté son royaume en 1654, et fait publiquement à Inspruck la cérémonie de son abjuration. Elle plut à la cour de France, quoiqu’il ne s’y trouvât pas une femme dont le génie pût atteindre au sien. Le roi la vit, et lui rendit de grands honneurs ; mais il lui parla à peine. Elevé dans l’ignorance, le bon sens avec lequel il était né le rendait timide.

 

          La plupart des femmes et des courtisans n’observèrent autre chose dans cette reine philosophe, sinon qu’elle n’était pas coiffée à la française, et qu’elle dansait mal. Les sages ne condamnèrent dans elle que le meurtre de Monaldeschi, son écuyer, qu’elle fit assassiner à Fontainebleau dans un second voyage. De quelque faute qu’il fût coupable envers elle, ayant renoncé à la royauté, elle devait demander justice, et non se la faire. Ce n’était pas une reine qui punissait un sujet ; c’était une femme qui terminait une galanterie par un meurtre ; c’était un Italien qui en faisait assassiner un autre par l’ordre d’une Suédoise dans un palais du roi de France. Nul ne doit être mis à mort que par les lois. Christine, en Suède, n’aurait eu le droit de faire assassiner personne ; et certes ce qui eût été un crime à Stockholm n’était pas permis à Fontainebleau. Ceux qui ont justifié cette action méritent de servir de pareils maîtres. Cette honte et cette cruauté ternirent la philosophie de Christine, qui lui avait fait quitter un trône. Elle eût été punie en Angleterre, et dans tous les pays où les lois règnent : mais la France ferma les yeux à cet attentat contre l’autorité du roi, contre le droit des nations, et contre l’humanité (7).

 

          Après la mort de Cromwell, et la déposition de son fils, l’Angleterre resta un an dans la confusion de l’anarchie. Charles Gustave, à qui la reine Christine avait donné le royaume de Suède, se faisait redouter dans le nord et dans l’Allemagne. L’empereur Ferdinand III était mort en 1657 ; son fils Léopold, âgé de dix-sept ans, déjà roi de Hongrie et de Bohême, n’avait point été élu roi des Romains du vivant de son père. Mazarin voulut essayer de faire Louis XIV empereur. Ce dessein était chimérique ; il eût fallu ou forcer les électeurs ou les séduire. La France n’était ni assez forte pour ravir l’empire, ni assez riche pour l’acheter ; aussi les premières ouvertures, faites à Francfort par le maréchal de Grammont et par Lyonne, furent-elles abandonnées aussitôt que proposées. Léopold fut élu. Tout ce que put la politique de Mazarin, ce fut de faire une ligue avec des princes allemands pour l’observation des traités de Munster, et pour donner un frein à l’autorité de l’empereur sur l’empire (auguste 1658).

 

           La France, après la bataille des Dunes, était puissante au dehors par la gloire de ses armes, et par l’état où étaient réduites les autres nations ; mais le dedans souffrait ; il était épuisé d’argent ; on avait besoin de la paix.

 

          Les nations, dans les monarchies chrétiennes, n’ont presque jamais d’intérêt aux guerres de leurs souverains. Des armées mercenaires, levées par ordre d’un ministre, et conduites par un général qui obéit en aveugle à ce ministre, font plusieurs campagnes ruineuses, sans que les rois au nom desquels elles combattent aient l’espérance ou même le dessein de ravir tout le patrimoine l’un de l’autre. Le peuple vainqueur ne profite jamais des dépouilles du peuple vaincu : il paye tout ; il souffre dans la prospérité des armes, comme dans l’adversité ; et la paix lui est presque aussi nécessaire, après la plus grande victoire, que quand les ennemis ont pris ses places frontières.

 

          Il fallait deux choses au cardinal pour consommer heureusement son ministère : faire la paix, et assurer le repos de l’Etat par le mariage du roi. Les cabales pendant sa maladie lui faisaient sentir combien un héritier du trône était nécessaire à la grandeur du ministre. Toutes ces considérations le déterminèrent à marier Louis XIV promptement. Deux partis se présentaient, la fille du roi d’Espagne et la princesse de Savoie. Le cœur du roi avait pris un autre engagement ; il aimait éperdument mademoiselle Mancini, l’une des nièces du cardinal ; né avec un cœur tendre et de la fermeté dans ses volontés, plein de passion et sans expérience, il aurait pu se résoudre à épouser sa maîtresse.

 

          Madame de Motteville, favorite de la reine-mère, dont les Mémoires ont un grand air de vérité, prétend que Mazarin fut tenté de laisser agir l’amour du roi, et de mettre sa nièce sur le trône. Il avait déjà marié une autre nièce au prince de Conti, une au duc de Mercœur : celle que Louis XIV aimait avait été demandée en mariage par le roi d’Angleterre. C’étaient autant de titres qui pouvaient justifier son ambition. Il pressentit adroitement la reine-mère : « Je crains bien, lui dit-il, que le roi ne veuille trop fortement épousé ma nièce. » La reine, qui connaissait le ministre, comprit qu’il souhaitait ce qu’il feignait de craindre. Elle lui répondit avec la hauteur d’une princesse du sang d’Autriche, fille, femme, et mère de rois, et avec l’aigreur que lui inspirait depuis quelque temps un ministre qui affectait de ne plus dépendre d’elle. Elle lui dit : « Si le roi était capable de cette indignité, je me mettrais avec mon second fils à la tête de toute la nation contre le roi et contre vous. »

 

          Mazarin ne pardonna jamais, dit-on, cette réponse à la reine : mais il prit le parti sage de penser comme elle : il se fit lui-même un honneur et un mérite de s’opposer à la passion de Louis XIV. Son pouvoir n’avait pas besoin d’une reine de son sang pour appui. Il craignait même le caractère de sa nièce ; et il crut affermir encore la puissance de son ministère, en fuyant la gloire dangereuse d’élever trop sa maison.

 

 

 

1 – Sous les noms de Charles II et Jacques II (G.A.)

2 – Il avait cinquante-neuf ans. (G.A.)

3 – Voici ce qu’il dit à sa femme : « Ne croyez pas que je meure ; je suis sûr du contraire. » Et il ajouta : « Ne dites pas que j’ai perdu la raison ; je vous dis la vérité. Je la tiens d’une autorité meilleure que toutes celles que peut vous fournir Gallien ou Hippocrate. C’est la réponse de Dieu même à nos prières, non pas aux miennes seules, mais à celles d’autres personnes qui ont près de lui plus de crédit que moi. » (G.A.)

4 – Dans l’Essai sur les Mœurs, chapitre CLXXXI. (Voltaire.)

5 – Richard ne mérite guère l’éloge que Voltaire fait de lui. C’était un homme sans vertus d’aucune sorte. (G.A.)

6 – Ce que disent là les écrivains protestants est vrai. Christine abdiqua en face du mécontentement général. (G.A.)

7 – Un nommé La Beaumelle, qui falsifia le Siècle de Louis XIV, et qui le fit imprimer à Francfort avec des notes aussi scandaleuses que fausses, dit à ce sujet que Christine était en droit de faire assassiner Monaldeschi, parce qu’elle ne voyageait pas incognito ; et il ajoute que Pierre-le-Grand, entrant dans un café à Londres, tout écumant de colère, parce que, disait-il, un de ses généraux lui avait menti, s’écria qu’il avait été tenté de le fendre en deux d’un coup de sabre ; qu’alors un marchand anglais avait dit au czar qu’on aurait condamné Sa Majesté à être pendue.

On est obligé de relever ici l’insolence absurde d’un pareil conte. Peut-on imaginer que le czar Pierre aille dire, dans un café, qu’u de ses généraux lui a menti ? fend-on aujourd’hui un homme en deux d’un coup de sabre ? un empereur va-t-il se plaindre à un marchand anglais de ce qu’un général lui a menti ? en quelle langue parlait-il à ce marchand, lui qui ne savait pas l’anglais ? comment ce faiseur de notes peut-il dire que Christine, après son abdication, était en droit de faire assassiner un Italien à Fontainebleau, et ajouter, pour le prouver, qu’on aurait pendu Pierre-le-Grand à Londres ? On sera forcé de remarquer quelquefois les absurdités de ce même éditeur. En fait d’histoire, il ne faut pas dédaigner de répondre ; il n’y a que trop de lecteurs qui se laissent séduire par les mensonges d’un écrivain sans pudeur, sans retenue, sans science et sans raison. (K.)

 

 

 

 

 

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