SIECLE DE LOUIS XIV - CATALOGUE - Écrivains - Partie 29 - S

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SIECLE DE LOUIS XIV - CATALOGUE - Écrivains - Partie 29 - S

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CATALOGUE

 

DE LA PLUPART DES ÉCRIVAINS FRANÇAIS

 

QUI ONT PARU DANS LE SIÈCLE DE LOUIS XIV,

 

Pour servir à l’histoire littéraire de ce temps.

 

 

 

 

______________

 

 

 

 

 

 

SABLIÈRE (Antoine Rambouillet de La)

 

? - 1680

 

 

Ses madrigaux sont écrits avec une finesse qui n’exclut pas le naturel. Mort en 1680.

 

 

 

 

 

SACY (Louis-Isaac Le Maistre de)

 

1613 - 1684

 

 

Né en 1613, l’un des bons écrivains de Port-Royal. C’est de lui (*) qu’est la Bible de Royaumont, et une traduction des comédies de Térence. Mort en 1684. Son frère, Antoine Le Maistre, se retira comme lui à Port-Royal. Il avait été avocat ; on le croyait un homme très éloquent, mais on ne le crut plus dès qu’il eut cédé à la vanité de faire imprimer ses plaidoyers. Un autre Sacy, avocat, et de l’Académie française, mais d’une autre famille, a donné une traduction estimée des Lettres de Pline, en 1701.

 

 

* Et surtout de Fontaine. (G.A.)

 

 

SAINT-AULAIRE (François-Joseph de Beaupoil, marquis de)

 

1648 - 1742

 

 

C’est une chose très singulière que les plus jolis vers qu’on ait de lui aient été faits lorsqu’il était plus que nonagénaire. Il ne cultiva guère le talent de la poésie qu’à l’âge de plus de soixante ans, comme le marquis de La Fare. Dans les premiers vers qu’on connut de lui, on trouve ceux-ci qu’on attribua à La Fare :

 

O Muse légère et facile,

Qui, sur le coteau d’Hélicon,

Vîntes offrir au vieil Anacréon

Cet art charmant, cet art utile

Qui sait rendre douce et tranquille

La plus incommode saison ;

Vous qui de tant de fleurs sur le Parnasse écloses

Orniez à ses côtés les Grâces et les Ris,

Et qui cachiez ses cheveux gris

Sous tant de couronnes de roses, etc.

 

Ce fut sur cette pièce qu’il fut reçu à l’Académie ; et Boileau alléguait cette même pièce pour lui refuser son suffrage. Il est mort en 1742, à près de cent ans, d’autres disent à cent deux. Un jour, à l’âge de plus de quatre-vingt-quinze ans, il soupait avec madame la duchesse du Maine : elle l’appelait Apollon, et lui demandait je ne sais quel secret ; il lui répondit

 

La divinité qui s’amuse

A me demander mon secret,

Si j’étais Apollon, ne serait point ma muse,

Elle serait Thétis, et le jour finirait.

 

Anacréon moins vieux fit de bien moins jolies choses. Si les Grecs avaient eu des écrivains tels que nos bons auteurs, ils auraient été encore plus vains ; nous leur applaudirions aujourd’hui avec encore plus de raison (*).

 

 

* Cet article est tout de politesse. Voltaire avait connu à Sceaux le vieux Saint-Aulaire. (G.A.)

 

 

 

 

 

SAINTE-MARTHE (Gaucher de)

 

 

 

Cette famille a été pendant plus de cent années féconde en savants. Le premier Gaucher de Sainte-Marthe fut Charles, qui fut éloquent pour son temps. Mort en 1555.

 

Scévole, neveu de Charles, se distingua dans les lettres et dans les affaires. Ce fut lui qui réduisit Poitiers sous l’obéissance de Henri IV. Il mourut à Loudun, en 1623, et le fameux Urbain Grandier prononça son oraison funèbre.

 

Abel de Sainte-Marthe, son fils, cultiva les lettres comme son père, et mourut en 1652. Son fils, nommé Abel comme lui, marcha sur ses traces : mort en 1706.

 

Scévole et Louis de Sainte Marthe, frères jumeaux, fils du premier Scévole, enterrés tous deux à Paris, dans le même tombeau, à Saint-Severin, furent illustres par leur savoir. Ils composèrent ensemble le Gallia christiana. Scévole, mort en 1650 ; Louis, mort en 1656.

 

Denis de Sainte-Marthe, leur cousin, acheva cet ouvrage. Mort à Paris en 1725.

 

Pierre-Scévole de Sainte-Marthe, frère aîné du dernier Scévole, fut historiographe de France. Mort en 1690.

 

 

 

 

 

SAINT-EVREMOND (Charles de Saint-Denis, de)

 

1613 - 1703

 

 

Né en Normandie, en 1613. Une morale voluptueuse, des lettres écrites à des gens de cour, dans un temps où ce mot de cour était prononcé avec emphase par tout le monde, des vers médiocres, qu’on appelle vers de société, faits dans des sociétés illustres, tout cela avec beaucoup d’esprit contribua à la réputation de ses ouvrages. Un nommé Des Maizeaux les a fait imprimer, avec une Vie de l’auteur, qui contient seule un gros volume ; et dans ce gros volume il n’y a pas quatre pages intéressantes. Il n’est grossi que des mêmes choses qu’on trouve dans les Œuvres de Saint-Evremond : c’est un artifice du libraire, un abus du métier d’éditeur. C’est par de tels artifices qu’on a trouvé le secret de multiplier les livres à l’infini, sans multiplier les connaissances. On connaît son exil, sa philosophie et ses ouvrages. Quand on lui demanda, à sa mort, s’il voulait se réconcilier, il répondit : « Je voudrais me réconcilier avec l’appétit. » Il est enterré à Westminster, avec les rois et les hommes illustres d’Angleterre. Mort en 1703.

 

 

 

 

 

SAINT-PAVIN (Denis Sanguin de)

 

? - 1670

 

 

Il était au nombre des hommes de mérite que Despréaux confondit dans ses satires avec les mauvais écrivains (*). Le peu qu’on a de lui passe pour être d’un goût délicat. On peut connaître son mérite personnel par cette épitaphe, que fit pour lui Fieubet, le maître des requêtes, l’un des esprits les plus polis de ce siècle :

 

Sous ce tombeau gît Saint-Pavin ;

Donne des larmes à sa fin ;

Tu fus de ses amis peut-être ?

Pleure sur ton sort et le sien :

Tu n’en fus pas ? pleure le tien,

Passant, d’avoir manqué d’en être.

 

Mort en 1670.

 

 

* Boileau n’a jamais parlé que de son libertinage philosophique. (G.A.)

 

 

 

 

 

SAINT-PIERRE (Charles-Irénée Castel, abbé de)

 

(*)

 

1658 - 1743

 

 

Né en 1658, gentilhomme de Normandie, n’ayant qu’une fortune médiocre, la partagea quelque temps avec les célèbres Varignon et Fontenelle. Il écrivit beaucoup sur la politique. La meilleure définition qu’on ait faite en général de ses ouvrages est ce qu’en disait le cardinal Dubois, que c’étaient les rêves d’un bon citoyen. Il avait la simplicité de rebattre, dans ses livres, les vérités les plus triviales de la morale, et par une autre simplicité, il proposait presque toujours des choses impossibles comme praticables. Il ne cessa d’insister sur le projet d’une paix perpétuelle, et d’une espèce de parlement de l’Europe, qu’il appelle la diète europaine. On avait imputé une partie de ce projet chimérique au roi Henri IV, et l’abbé de Saint-Pierre, pour appuyer ses idées, prétendait que cette diète europaine avait été approuvée et rédigée par le dauphin, duc de Bourgogne, et qu’on en avait trouvé le plan dans les papiers de ce prince. Il se permettait cette fiction pour mieux faire goûter son projet. Il rapporte, avec bonne foi, la lettre par laquelle le cardinal de Fleury répondit à ses propositions : « Vous avez oublié, monsieur, pour article préliminaire, de commencer par envoyer une troupe de missionnaires pour disposer le cœur et l’esprit des princes. » Cependant l’abbé de Saint-Pierre ne laissa pas enfin d’être très utile. Il travailla beaucoup pour délivrer la France de la tyrannie de la taille arbitraire ; il écrivit et il agit en homme d’Etat sur cette seule matière (**). Il fut unanimement exclu de l’Académie française, pour avoir, sous la régence du duc d’Orléans, préféré un peu durement, dans sa Polysynodie, l’établissement des conseils, à la manière de gouverner de Louis XIV, protecteur de l’Académie (***). Ce fut le cardinal de Polignac qui fit une brigue pour l’exclure, et qui en vint à bout (****). Ce qu’il y a d’étrange, c’est que, dans ce temps-là même, le cardinal de Polignac conspirait contre le régent, et que ce prince, qui donnait un logement au Palais-Royal à Saint-Pierre, et qui avait toute sa famille à son service, souffrit cette exclusion. L’abbé de Saint-Pierre ne se plaignit point. Il continua de vivre en philosophe avec ceux mêmes qui l’avaient exclu. Boyer, ancien évêque de Mirepoix, son confrère, empêcha qu’à sa mort on ne prononçât son éloge à l’Académie, selon la coutume. Ces vaines fleurs qu’on jette sur le tombeau d’un académicien n’ajoutent rien ni à sa réputation ni à son mérite ; mais le refus fut un outrage, et les services que l’abbé de Saint-Pierre avait rendus, sa probité et sa douceur méritaient un autre traitement. Il mourut en 1743, âgé de quatre-vingt-six ans. Je lui demandai, quelques jours avant sa mort, comment il regardait ce passage ; il me répondit : « Comme un voyage à la campagne. »

 

Le traité le plus singulier qu’on trouve dans ses ouvrages est l’anéantissement futur du mahométisme (*****). Il assure qu’un temps viendra où la raison l’emportera chez les hommes sur la superstition. Les hommes comprendront, dit-il, qu’il suffit de la patience, de la politesse et de la bienfaisance pour plaire à Dieu Il est impossible, dit-il encore, qu’un livre où l’on trouve des propositions fausses données comme vraies, des choses absurdes opposées au sens commun, des louanges données à des actions injustes, ait été révélé par un être parfait. Il prétend que dans cinq cents ans tous les esprits, jusqu’aux plus grossiers, seront éclairés sur ce livre ; que le grand muphti même et les cadis verront qu’il est de leur intérêt de détromper la multitude, et de se rendre plus nécessaires et plus respectés en rendant la religion plus simple. Ce traité est curieux. Dans ses Annales de Louis XIV, il dit que l’Etat devrait bâtir des loges aux Petites-Maisons pour les théologiens intolérants, et qu’il serait à propos de jouer ces espèces de fous sur le théâtre.

 

(******) C’est ici l’occasion d’observer que l’auteur du Siècle de Louis XIV n’a donné cette liste des écrivains et des artistes qui ont fleuri sous Louis XIV, qu’après avoir lu leurs ouvrages, et souvent connu leur personne, recherchant tous les moyens de s’instruire sur ce siècle célèbre, depuis qu’il fut nommé historiographe de France. Il ne pouvait, dans cette liste, parler des Annales politiques de l’abbé de Saint-Pierre sous Louis XIV, puisque le Siècle fut imprimé en 1752 pour la première fois, et que les Annales de l’abbé de Saint-Pierre ne parurent qu’en 1758, ayant été imprimées en 1757. Ces Annales, il le faut avouer, sont une satire continuelle du gouvernement de ce monarque qui méritait plus d’estime ; et cette satire n’est pas assez bien écrite pour faire pardonner son injustice. La famille de l’abbé, sentant quel dangereux effet cet ouvrage pouvait produire, engagea son auteur à le dérober au public : il ne fut imprimé qu’après sa mort. Comment donc l’abbé Sabatier, natif de Castres, qui a donné depuis la liste des écrivains de Trois siècles (*******), a-t-il pu dire « que l’auteur du Siècle de Louis XIV en a puisé l’idée mal remplie dans ces Annales politiques, qui offrent un tableau frappant des progrès de l’esprit chez notre nation ? »

 

Premièrement, il est impossible que l’auteur du Siècle ait pu rien prendre des Annales de l’abbé de Saint-Pierre, qu’il ne pouvait connaître, et desquelles il a vengé la mémoire de Louis XIV, dès qu’il les a connues (********). Secondement, il est très faux que l’abbé de Saint-Pierre se soit étendu dans son livre sur les progrès de l’esprit humain chez notre nation. A peine en dit-il quelques mots ; et quand il parle des beaux-arts, c’est pour les avilir.

 

Voici comme il s’explique, page 155 : « La peinture, la sculpture, la musique, la poésie, la comédie, l’architecture, prouvent le nombre des fainéants, leur goût pour la fainéantise, qui suffit à nourrir et à entretenir d’autres espèces de fainéants, gens qui se piquent d’esprit agréable, mais non pas d’esprit utile, etc. »

 

Il est rare, sans doute, d’entendre un académicien dire que des arts qui exigent le travail le plus assidu sont des occupations de fainéants.

 

Quant à la personne de Louis XIV, il veut l’avilir aussi bien que les arts dont ce roi fut le protecteur. On ne peut rapporter qu’avec indignation ce qu’il en dit, page 265 : « Louis se gouvernait à l’égard de ses voisins et de ses sujets comme s’il eût adopté la maxime d’un célèbre tyran : - Qu’ils me haïssent, pourvu qu’ils me craignent. – Il sacrifiait tout au plaisir de se venger, et de montrer au public qu’il était redoutable ; c’est le goût des âmes médiocres, de tous les enfants, et de tous les hommes du commun. »

 

Il traite enfin Louis XIV, en vingt endroits, de grand enfant. Et lui, qui était sans contredit un vieil enfant, finit son livre par cette formule, Paradis aux bienfaisants ; mais il n’ose pas dire, Paradis aux médisants.

 

A l’égard de l’abbé Sabatier, natif de Castres, qui est venu à Paris faire le métier de calomniateur pour quelque argent, il est difficile d’espérer pour lui le paradis. C’est même un grand effort que de le lui souhaiter.

 

 

 

 

* En 1751, cet article n’avait que quatre lignes : « Saint-Pierre (l’abbé de) a contribué, par ses écrits, à faire établir la taille proportionnelle ; ses idées politiques n’ont pas toujours été des rêves. » (G.A.)

 

** Voltaire veut parler du célèbre mémoire sur l’Établissement de la taille proportionnelle. (G.A.)

 

*** L’exclusion fut unanime, à une voix près, celle de Fontenelle. Il raconta depuis qu’il avait entendu plus d’une fois un homme de la cour, membre de l’Académie, s’attribuer, devant l’abbé de Saint-Pierre, et devant lui-même, le mérite de cette action de justice.

 

L’exemple de l’abbé de Saint-Pierre prouve qu’en France il est également dangereux pour un homme de lettres, qui ne veut que dire la vérité, de soutenir les opinions du gouvernement, ou de les combattre. (K.)

 

**** Tous les détails de cette affaire se trouvent dans les Notes de l’Eloge de l’abbé de Saint-Pierre, par d’Alembert. (G.A.)

 

***** Ce Traité est un manuscrit, dont d’Alembert annonce aussi l’existence. On comprend bien que le mahométisme figure ici le christianisme. (G.A.)

 

****** Cette fin est de 1775. (G.A.)

 

******* Les Trois siècles de la littérature française, 3 volumes in-8e, 1772. (G.A.)

 

******** Voltaire n’a connu les Annales, paraît-il, qu’après la première édition du Siècle. Et c’est pourquoi on les trouve citées en note dans les autres éditions de son livre. (G.A.)

 

 

 

 

 

SAINT-RÉAL (César Vichard de)

 

? - 1692

 

 

Né à Chambéry, mais élevé en France. Son Histoire de la conjuration de Venise est un chef d’œuvre. Sa Vie de Jésus-Christ est bien différente. Mort en 1692.

 

 

 

 

 

SALLO (Denis de)

 

1626 - 1669

 

 

Né en 1626, conseiller au parlement de Paris, inventeur des journaux. Baule perfectionna ce genre, déshonoré ensuite par quelques journaux que publièrent à l’envi des libraires avides, et que des écrivains obscurs remplirent d’extraits infidèles, d’inepties, et de mensonges. Enfin on est parvenu jusqu’à faire un trafic public d’éloges et de censures, surtout dans des feuilles périodiques ; et la littérature a éprouvé le plus grand avilissement par ces infâmes manèges. Mort en 1669.

 

 

 

 

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