SIECLE DE LOUIS XIV - CATALOGUE - Écrivains - Partie 9 - D

Publié le par loveVoltaire

SIECLE DE LOUIS XIV - CATALOGUE - Écrivains - Partie 9 - D

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CATALOGUE

 

DE LA PLUPART DES ÉCRIVAINS FRANÇAIS

 

QUI ONT PARU DANS LE SIÈCLE DE LOUIS XIV,

 

Pour servir à l’histoire littéraire de ce temps.

 

 

 

 

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DACIER (André)

 

1651 - 1722

 

 

Né à Castres, en 1651, calviniste comme sa femme, et devenu catholique comme elle, garde des livres du cabinet du roi à Paris, charge qui ne subsiste plus. Homme plus savant qu’écrivain élégant, mais à jamais utile par ses traductions et par quelques-unes de ses notes. Mort au Louvre, en 1722. Nous devons à madame Dacier la traduction d’Homère la plus fidèle par le style, quoiqu’elle manque de force, et la plus instructive par les notes, quoiqu’on y désire la finesse du goût. On remarque surtout qu’elle n’a jamais senti que ce qui devait plaire aux Grecs dans des temps grossiers, et ce qu’on respectait déjà comme ancien dans des temps postérieurs plus éclairés, aurait pu déplaire s’il avait été écrit du temps de Platon et de Démosthène ; mais enfin nulle femme n’a jamais rendu plus de services aux lettres. Madame Dacier est un des prodiges du siècle de Louis XIV.

 

 

 

DACIER (Anne Lefèvre, madame)

 

1651 - 1720

 

 

Née calviniste à Saumur, en 1651, illustre par sa science. Le duc de Montausier la fit travailler à l’un de ses livres qu’on nomme Dauphins, pour l’éducation de Monseigneur. Le Florus avec des notes latines est d’elle. Ses traductions de Térence et d’Homère lui font un honneur immortel. On ne pouvait lui reprocher que trop d’admiration pour tout ce qu’elle avait traduit. La Motte ne l’attaqua qu’avec de l’esprit, et elle ne combattit qu’avec de l’érudition (*). Morte en 1720 au Louvre.

 

 

* Voyez, dans le Dictionnaire philosophique, l’article ÉPOPÉE. (G.A.)

 

 

 

 

 

D’AGUESSEAU (Henri-François)

 

? - 1750

 

 

Chancelier, le plus savant magistrat que jamais la France ait eu, possédant la moitié des langues modernes de l’Europe, outre le latin, le grec, et un peu d’hébreu, très instruit dans l’histoire, profond dans la jurisprudence, et, ce qui est plus rare, éloquent. Il fut le premier au barreau qui parla avec force et pureté à la fois ; avant lui on faisait des phrases. Il conçut le projet de réformer les lois, mais il ne put faire que quatre ou cinq ordonnances utiles. Un seul homme ne peut suffire à ce travail immense que Louis XIV avait entrepris avec le secours d’un grand nombre de magistrats (*). Mort en 1750.

 

 

* Voltaire jugeait autrement le chancelier lorsqu’il s’adressait à ses seuls amis. « C’était un homme très médiocre, un demi-savant orgueilleux, » écrit-il à Damilaville, en 1761. Et à d’Alembert, même année : « Notre f….. Académie a donné pour sujet de son prix les louanges d’un chevalier janséniste, persécuteur de toute vérité, mauvais cartésien, ennemi de Newton, faux savant, et faux honnête homme. » (G.A.)

 

 

 

 

 

DANCHET (Antoine)

 

1671- 1748

 

 

Né à Riom, en 1671, a réussi à l’aide du musicien dans quelques opéras, qui sont moins mauvais que ses tragédies. Son prologue des Jeux séculaires au-devant d’Hésione passe même pour un très bon ouvrage, et peut être comparé à celui d’Amadis. On a retenu ces beaux vers imités d’Horace

 

Père des saisons et des jours,

Fais naître en ces climats un siècle mémorable.

Puisse à ses ennemis ce peuple redoutable

Etre à jamais heureux, et triompher toujours !

Nous avons à nos lois asservi la victoire ;

Aussi loin que tes feux nous portons notre gloire.

Fais dans tout l’univers craindre notre pouvoir.

Toi qui vois tout ce qui respire,

Soleil, puisses-tu ne rien voir

De si puissant que cet empire !

 

          C’est dans ce prologue qu’on trouve les ariettes qui servirent depuis de canevas au poète Rousseau pour composer les couplets effrénés qui causèrent sa disgrâce (*). Les couplets originaux de Danchet valent peut-être mieux que les parodies de Rousseau. Voici surtout celui de Danchet qu’on a le plus retenu :

 

Que l’amant qui devient heureux

En devienne encor plus fidèle !

Que toujours dans les même nœuds

Il trouve une douceur nouvelle !

Que les soupirs et les langueurs

Puissent seuls fléchir les rigueurs

De la beauté la plus sévère !

Que l’amant comblé de faveurs

Sache les goûter et les taire !

 

Mort en 1748.

 

 

*Voyez l’article LA MOTTE HOUDARD. (G.A.)

 

 

 

 

 

DANCOURT (Florent Carton)

 

1661 - 1726

 

 

Avocat, né à Fontainebleau, en 1661, aima mieux se livrer au théâtre qu’au barreau. Ce que Regnard était à l’égard de Molière dans la haute comédie, le comédien Dacourt l’était dans la farce. Beaucoup de ses pièces attirent encore un assez grand concours ; elles sont gaies ; le dialogue en est naïf. La quantité de pièces qu’on a faites dans ce genre facile est immense ; elles sont plus du goût du peuple que des esprits délicats ; mais l’amusement est un des besoins de l’homme, et cette espèce de comédie, aisée à représenter, plaît dans Paris et dans les provinces au grand nombre, qui n’est pas susceptible de plaisirs plus relevés. Mort en 1726.

 

 

 

 

 

DANET (Pierre)

 

? - 1709

 

 

Il est l’un de ces hommes qui ont été plus utiles qu’ils n’ont eu de réputation. Ses Dictionnaires de la langue latine et des antiquités furent au nombre de ces livres mémorables faits pour l’éducation du dauphin, Monseigneur, et qui, s’ils ne firent pas de ce prince un savant homme, contribuèrent beaucoup à éclairer la France. Mort en 1709.

 

 

 

 

 

DANGEAU (Louis de Courcillon, abbé de (*))

 

1643 - 1723

 

 

Excellent académicien. Mort en 1723.

 

 

* Frère du marquis. (G.A.)

 

 

 

 

 

DANIEL (Gabriel)

 

1649 - 1728

 

 

Jésuite, historiographe de France, né à Rouen, en 1649, a rectifié les fautes de Mézerai sur la première et la seconde race. On lui a reproché que sa diction n’est pas toujours pure, que son style est trop faibles, qu’il n’intéresse pas, qu’il n’est pas peintre, qu’il n’a pas assez fait connaître les usages, les mœurs, les lois ; que son histoire est un long détail d’opérations de guerre dans lesquelles un historien de son état se trompe presque toujours. Mort en 1728.

 

Le comte de Boulainvilliers dit, dans ses Mémoires sur le gouvernement de France, qu’on peut reprocher à Daniel dix mille erreurs : c’est beaucoup ; mais heureusement la plupart de ces erreurs sont aussi indifférentes que les vérités qu’il aurait mises à la place ; car qu’importe que ce soit l’aile gauche ou l’aile droite qui ait plié à la bataille de Monthéry ? Qu’importe par quel endroit Louis-le-Gros entra dans les masures du Puiset (*) ? Un citoyen veut savoir par quels degrés le gouvernement a changé de forme, quels ont été les droits et les usurpations des différents corps, ce qu’ont fait les états généraux, quel a été l’esprit de la nation. Le grand défaut de Daniel est de n’avoir pas été instruit des droits de la nation, ou de les avoir dissimulés. Il a omis entièrement les célèbres états de 1355. Il n’a parlé des papes, et surtout du grand et bon roi Henri IV, qu’en jésuite ; nulle connaissance des finances, nulle de l’intérieur du royaume ni des mœurs.

 

          Il prétend dans sa préface, et le président Hénault a dit après lui, que les premiers temps de l’histoire de France sont plus intéressants que ceux de Rome, parce que Clovis et Dagobert avaient plus de terrain que Romulus et Tarquin. Il ne s’est pas aperçu que les faibles commencements de tout ce qui est grand intéressent toujours les hommes ; on aime à voir la petite origine d’un peuple dont la France n’était qu’une province, et qui étendit son empire jusqu’à l’Elbe, l’Euphrate et le Niger. Il faut avouer que notre histoire et celle des autres peuples, depuis le cinquième siècle de l’ère vulgaire jusqu’au quinzième, n’est qu’un chaos d’aventures barbares, sous des noms barbares.

 

 

* Bourg entre Orléans et Chartres.

 

 

 

 

 

D’ARGONNE (Noël)

 

1634 - 1704

 

 

Né à Paris, en 1634, chartreux à Gaillon. C’est le seul chartreux qui ait cultivé la littérature. Ses Mélanges, sous le nom de Vigneul de Marville, sont remplis d’anecdotes curieuses et hasardées. Mort en 1704.

 

 

 

 

 

DELISLE (Guillaume)

 

1675 - 1726

 

 

Né à Paris, en 1675, a réformé la géographie, qui aura longtemps besoin d’être perfectionnée. C’est lui qui a changé toute la position de notre hémisphère en longitude. Il a enseigné à Louis XV la géographie, et n’a point fait de meilleur élève. Ce monarque a composé, après la mort de son maître, un Traité du cours de tous les fleuves (*). Guillaume Delisle est le premier qui ait eu le titre de premier géographe du roi. Mort en 1726.

 

 

* Imprimé dès 1718. Ce n’est, dit M. Renouard, que la copie des leçons du maître. (G.A.)

 

 

 

 

 

DESCARTES (René)

 

1596 - 1650

 

 

Né en Touraine, en 1596, fils d’un conseiller au parlement de Bretagne, le plus grand mathématicien de son temps, mais le philosophe qui connut le moins la nature, si on le compare à ceux qui l’ont suivi. Il passa presque toute sa vie hors de France, pour philosopher en liberté, à l’exemple de Saumaise qui avait pris ce parti. On a remarqué qu’il avait un frère aîné, conseiller au parlement de Bretagne, qui le méprisait beaucoup, et qui disait qu’il était indigne du frère d’un conseiller de s’abaisser à être mathématicien. Ayant cherché le repos dans des solitudes en Hollande, il ne l’y trouva pas. Un nommé Voët, et un nommé Shockius, deux professeurs du galimatias scolastique qu’on enseignait encore, intentèrent contre lui cette ridicule accusation d’athéisme dont les écrivains méprisés ont toujours chargé les philosophes. En vain Descartes avait épuisé son génie à rassembler les preuves de la Divinité, et à en chercher de nouvelles ; ses infâmes ennemis le comparèrent à Vanini dans un écrit public : ce n’est pas que Vanini eût été athée, le contraire est démontré (*) ; mais il avait été brûlé comme tel, et on ne pouvait faire une comparaison plus odieuse. Descartes eut beaucoup de peine à obtenir une très légère satisfaction par sentence de l’Académie de Groningue. Ses Méditations, son Discours sur la méthode, sont encore estimés ; toute sa physique est tombée, parce qu’elle n’est fondée ni sur la géométrie, ni sur l’expérience. Ses Recherches sur la dioptrique, où l’on trouve la loi fondamentale de cette science soupçonnée par Snellius, et des applications de cette loi, qui ne pouvaient être que l’ouvrage d’un très grand géomètre ; ses travaux sur les lois du choc des corps, objet dont il a eu le premier l’idée de s’occuper, seront toujours, malgré les erreurs qui lui sont échappées, des monuments d’un génie extraordinaire ; et le petit livre connu sous le nom de Géométrie de Descartes, lui assure la supériorité sur tous les mathématiciens de son temps. Il a eu longtemps une si prodigieuse réputation, que La Fontaine, ignorant à la vérité, mais écho de la voix publique, a dit de lui :

 

Descartes, ce mortel dont on eût fait un dieu

Dans les siècles passés, et qui tient le milieu

Entre l’homme et l’esprit, comme entre l’huitre et l’homme

Le tient tel de nos gens, franche bête de somme.

 

L’abbé Genest, dans le siècle présent, s’est donné la malheureuse peine de mettre en vers français la physique de Descartes.

 

Ce n’est guère que depuis l’année 1730 qu’on a commencé à revenir en France de toutes les erreurs de cette philosophie chimérique, quand la géométrie et la physique expérimentale ont été plus cultivées. Le sort de Descartes en physique a été celui de Ronsard en poésie. Mort à Stockholm, en 1650.

 

 

* Voyez, dans le Dictionnaire philosophique, l’article DICTIONNAIRE. (G.A.)

 

 

 

 

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