SATIRES - Anecdotes sur FRERON - Supplément
Photo de PAPAPOUSS
ANECDOTES SUR FRÉRON,
SUPPLÉMENT.
__________
(1)
Les feuilles de Fréron furent encore suspendues, pour avoir injurié grossièrement quelques personnes.
Autre suspension, pour avoir fait paraître sa feuille sans qu’elle ait été vue par le censeur, lorsqu’il rendit compte du discours académique de M. d’Alembert. Il avait éludé le censeur, pour pouvoir plus librement exhaler sa rage contre cet académicien.
Autre suspension, à l’occasion des Lettres de son ami Coste dont j’ai parlé plus haut. Dans l’extrait que Fréron fit de ces Lettres, il parla, avec une indécence digne de Bicêtre, de la nation espagnole ; il n’alla qu’à la Bastille.
Vous demandez ce que c’est que son mariage, avec sa nièce, et son procès avec sa sœur. Sa nièce est de Quimper-Corentin comme lui ; c’est la fille d’un huissier. Elle vint à Paris, il y a treize ou quatorze ans, et fut mise, en qualité de servante, chez la sœur de Fréron. Je l’ai vue balayer la rue devant la boutique de sa tante. Le mauvais traitement qu’elle recevait chez cette même tante engagea Fréron, qui demeurait avec sa sœur, à en sortir, et à prendre avec lui, dans une chambre garnie, rue de Bussi, la petite fille avec laquelle il était en commerce ; quelque temps après Fréron prit des meubles. Sa nièce devint sa gouvernante. Il lui fit deux enfants ; pendant la grossesse du second, il se maria par dispense.
L’histoire du procès de Fréron avec sa sœur est très longue et très compliquée. Le libraire Lambert m’a fait lire un mémoire manuscrit, très curieux et très bien fait, où le procès est plaisamment raconté. Je sais que Lambert conserve très soigneusement ce manuscrit ; et l’abbé Laporte en a parlé dans l’Observateur littéraire, 1760, tome I, page 177 ; il rapporte le sujet de ce procès (2). La sœur de Fréron est fripière ; son enseigne est, Au riche Laboureur ;pour faire niche à son frère qu’elle déteste bien cordialement, elle m’a dit qu’elle allait mettre une enseigne d’habits et de meubles sur sa boutique, avec ces mots : A L’ANNÉE FRIPIÈRE FRÉRON.
Fréron a fait faire, il y a douze à quatorze ans, deux cents paires de souliers pour envoyer aux îles ; l’envoi a été fait effectivement ; il en a reçu l’argent, et il le doit encore au cordonnier.
J’ai ouï dire à un procureur du Châtelet, qu’il n’y avait pas de semaine qu’on n’appelât à l’audience quelque procès de ce Fréron, etc.
NOTE. – Celui qui a daigné faire imprimer cet écrit tombé entre ses mains, a voulu seulement faire rougir ceux qui ont protégé un coquin, et ceux qui ont fait quelque attention à ses feuilles. Si on parle dans l’histoire naturelle des aigles et des rossignols, on y parle aussi des crapauds.
Il est nécessaire que ces infamies soient constatées par le témoignage de tous ceux qui sont cités dans cet écrit ; ils ne doivent pas le refuser à la vengeance publique (3).
1 – Ce supplément est de 1770. (G.A.)
2 – Cet abbé ne valait pas mieux que Fréron, selon Grimm. C’est lui qui avait fabriqué ces anecdotes qu’il avait remises à Thieriot, lequel les avait adressées à Voltaire. (G.A.)
3 – Cet alinéa est de 1770, ainsi que la lettre qui suit et dont on a déjà vu un fragment dans le Dictionnaire philosophique, article ANA. (G.A.)