DICTIONNAIRE PHILOSOPHIQUE : I comme IMPIE

Publié le par loveVoltaire

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I comme IMPIE.

 

 

 

 

 

 

 

 

         Quel est l’impie ? c’est celui qui donne une barbe blanche, des pieds et des mains à l’Etre des êtres, au grand Demiourgos, à l’intelligence éternelle par laquelle la nature est gouvernée. Mais ce n’est qu’un impie excusable, un pauvre impie contre lequel on ne doit pas se fâcher.

 

         Si même il peint le grand Etre incompréhensible porté sur un nuage qui ne peut rien porter ; s’il est assez bête pour mettre Dieu dans un brouillard, dans la pluie, ou sur une montagne, et pour l’entourer de petites faces rondes, joufflues, enluminées, accompagnées de deux ailes ; je ris, et je lui pardonne de tout mon cœur.

 

         L’impie qui attribue à l’Etre des êtres des prédictions déraisonnables et des injustices me fâcherait, si ce grand Etre ne m’avait fait présent d’une raison qui réprime ma colère. Ce sot fanatique me répète, après d’autres, que ce n’est pas à nous à juger de ce qui est raisonnable et juste dans le grand Etre, que sa raison n’est pas comme notre raison, que sa justice n’est pas comme notre justice. Eh ! comment veux-tu, mon fou d’énergumène, que je juge autrement de la justice et de la raison que par les notions que j’en ai ? veux-tu que je marche autrement qu’avec mes pieds, et que je te parle autrement qu’avec ma bouche ?

 

         L’impie qui suppose le grand Etre jaloux, orgueilleux, malin, vindicatif, est plus dangereux. Je ne voudrais pas coucher sous le même toit avec cet homme.

 

         Mais comment traiterez-vous l’impie qui vous dit : Ne vois que par mes yeux, ne pense point ; je t’annonce un Dieu tyran qui m’a fait pour être ton tyran ; je suis son bien-aimé ; il tourmentera pendant  toute l’éternité des millions de ses créatures qu’il déteste pour me réjouir ; je serai ton maître dans ce monde, et je rirai de tes supplices dans l’autre ?

 

         Ne vous sentez-vous pas une démangeaison de rosser ce cruel impie ? et si vous êtes né doux, ne courrez-vous pas de toutes vos forces à l’occident quand ce barbare débite ses rêves atroces à l’orient ?

 

         A l’égard des impies qui manquent à se lever le coude vers Alep et vers Erivan, ou qui ne se mettent pas à genoux devant une procession de capucins à Perpignan, ils sont coupables sans doute, mais je ne crois pas qu’on doive les empaler.

 

 

I comme IMPIE

 

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