DICTIONNAIRE PHILOSOPHIQUE : F comme FANATISME - Partie 1

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F comme FANATISME.

 

 

 

SECTION PREMIÈRE.

 

 

(1)

 

 

 

          C’est l’effet d’une fausse conscience qui asservit la religion aux caprices de l’imagination et aux dérèglements des passions.

 

          En général, il vient de ce que les législateurs ont eu des vues trop étroites, ou de ce qu’on a passé les bornes qu’ils se prescrivaient. Leurs lois n’étaient faites que pour une société choisie. Etendues par le zèle à tout un peuple, et transportées par l’ambition d’un climat à l’autre, elles devaient changer et s’accommoder aux circonstances des lieux et des personnes. Mais qu’est-il arrivé ? c’est que certains esprits d’un caractère plus proportionné à celui du petit troupeau pour lequel elles avaient été faites les ont reçues avec la même chaleur, en sont devenus les apôtres et même les martyres, plutôt que de démordre d’un seul iota. Les autres, au contraire, moins ardents ou plus attachés à leurs préjugés d’éducation, ont lutté contre le nouveau joug, et n’ont consenti à l’embrasser qu’avec des adoucissements ; et de là le schisme entre les rigoristes et les mitigés, qui les rend tous furieux, les uns pour la servitude, et les autres pour la liberté.

 

          Imaginons une immense rotonde (2), un panthéon à mille autels, et, placés au milieu du dôme, figurons-nous un dévot de chaque secte, éteinte ou subsistante, aux pieds de la divinité qu’il honore à sa façon, sous toutes les formes bizarres que l’imagination a pu créer. A droite, c’est un contemplatif étendu sur une natte, qui attend, le nombril en l’air, que la lumière céleste vienne investir son âme. A gauche, c’est un énergumène prosterné qui frappe du front contre la terre, pour en faire sortir l’abondance. Là, c’est un saltimbanque qui danse sur la tombe de celui qu’il invoque. Ici, c’est un pénitent immobile et muet comme la statue devant laquelle il s’humilie. L’un étale ce que la pudeur  cache, parce que Dieu ne rougit pas de sa ressemblance ; l’autre voile jusqu’à son visage, comme si l’ouvrier avait horreur de son ouvrage. Un autre tourne le dos au midi, parce que c’est là le vent du démon ; un autre tend les bras vers l’orient, où Dieu montre sa face rayonnante. De jeunes filles en pleurs meurtrissent leur chair encore innocente pour apaiser le démon de la concupiscence par des moyens capables de l’irriter ; d’autres, dans une posture tout opposée, sollicitent les approches de la Divinité. Un jeune homme, pour amortir l’instrument de la virilité, y attache des anneaux de fer d’un poids proportionné à ses forces ; un autre arrête la tentation dès sa source par une amputation tout à fait inhumaine, et suspend à l’autel les dépouilles de son sacrifice.

 

          Voyons-les tous sortir du temple, et, pleins du dieu qui les agite, répandre la frayeur et l’illusion sur la face de la terre. Ils se partagent le monde, et bientôt le feu s’allume aux quatre extrémités ; les peuples écoutent, et les rois tremblent. Cet empire que l’enthousiasme d’un seul exerce sur la multitude qui le voit ou l’entend, la chaleur que les esprits rassemblés se communiquent, tous ces mouvements tumultueux, augmentés par le trouble de chaque particulier, rendent en peu de temps le vertige général. C’est assez d’un seul peuple enchanté à la suite de quelques imposteurs, la séduction multipliera les prodiges, et voilà tout le monde à jamais égaré. L’esprit humain, une fois sorti des routes lumineuses de la nature, n’y rentre plus ; il erre autour de la vérité, sans en rencontrer autre chose que des lueurs, qui, se mêlant aux fausses clartés dont la superstition l’environne, achève de l’enfoncer dans les ténèbres.

 

          Il est affreux de voir comment l’opinion d’apaiser le ciel par le massacre, une fois introduite, s’est universellement répandue dans presque toutes les religions, et combien on a multiplié les raisons de ce sacrifice, afin que personne ne pût échapper au couteau. Tantôt ce sont des ennemis qu’il faut immoler à Mars exterminateur : les Scythes égorgent à ses autels le centième de leurs prisonniers  et par cet usage de la victoire on peut juger de la justice de la guerre : aussi chez d’autres peuples ne la faisait-on que pour avoir de quoi fournir aux sacrifices ; de sorte qu’ayant d’abord été institués, ce semble, pour en expier les horreurs, ils servirent enfin à les justifier.

 

          Tantôt ce sont des hommes justes qu’un dieu barbare demande pour victimes : les Gètes se disputent l’honneur d’aller porter à Zamolxis les vœux de la patrie. Celui qu’un heureux sort destine au sacrifice est lancé à force de bras sur des javelots dressés : s’il reçoit un coup mortel en tombant sur les piques, c’est de bon augure pour le succès de la négociation et pour le mérite du député ; mais s’il survit à sa blessure, c’est un méchant dont le dieu n’a point affaire.

 

          Tantôt ce sont des enfants à qui les dieux redemandent une vie qu’ils viennent de leur donner : justice affamée du sang de l’innocence, dit Montaigne Tantôt c’est le sang le plus cher : les Carthaginois immolent leurs propres fils à Saturne, comme si le temps ne les dévorait pas assez tôt. Tantôt c’est le sang le plus beau : cette même Amestris, qui avait fait enfouir douze hommes vivants dans la terre pour obtenir de Pluton, par cette offrande, une plus longue vie ; cette Amestris sacrifie encore à cette insatiable divinité quatorze jeunes enfants des premières maisons de la Perse, parce que les sacrificateurs ont toujours fait entendre aux hommes qu’ils devaient offrir à l’autel ce qu’ils avaient de plus précieux. C’est sur ce principe que, chez quelques nations, on immolait les premiers-nés et que chez d’autres on les rachetait par des offrandes plus utiles aux ministres du sacrifice. C’est ce qui autorisa sans doute en Europe la pratique de quelques siècles, de vouer les enfants au célibat dès l’âge de cinq ans, et d’emprisonner dans le cloître les frères du prince héritier, comme on les égorge en Asie.

 

          Tantôt c’est le sang le plus pur : n’y a-t-il pas des Indiens qui exercent l’hospitalité envers tous les hommes, et qui se font un mérite de tuer tout étranger vertueux et savant qui passera chez eux, afin que ses vertus et ses talents leur demeurent ? Tantôt c’est le sang le plus sacré : chez la plupart des idolâtres, ce sont les prêtres qui font la fonction des bourreaux à l’autel ; et chez les Sibériens on tue les prêtres pour les envoyer prier dans l’autre monde à l’intention du peuple.

 

          Mais voici d’autres fureurs et d’autres spectacles. Toute l’Europe passe en Asie par un chemin inondé du sang des Juifs qui s’égorgent de leurs propres mains pour ne pas tomber sous le fer de leurs ennemis. Cette épidémie dépeuple la moitié du monde habité : rois, pontifes, femmes, enfants et vieillards, tout cède au vertige sacré qui fait égorger pendant deux siècles des nations innombrables sur le tombeau d’un Dieu de paix. C’est alors qu’on vit des oracles menteurs, des ermites guerriers ; les monarques dans les chaires et les prélats dans les camps ; tous les Etats se perdre dans une populace insensée ; les montagnes et les mers franchies ; de légitimes possessions abandonnées pour voler à des conquêtes qui n’étaient plus la terre promise ; les mœurs se corrompre sous un ciel étranger ; des princes, après avoir dépouillé leurs royaumes pour racheter un pays qui ne leur avait jamais appartenu, achever de les ruiner pour leur rançon personnelle ; des milliers de soldats, égarés sous plusieurs chefs, n’en reconnaître aucun, hâter leur défaite par la défection ; et cette maladie ne finira que pour faire place à une contagion encore plus horrible.

 

          Le même esprit de fanatisme entretenait la fureur des conquêtes éloignées : à peine l’Europe avait réparé ses pertes, que la découverte d’un nouveau monde hâta la ruine du nôtre. A ce terrible mot : Allez et forcez ! l’Amérique fut désolée et ses habitants exterminés ; l’Afrique et l’Europe s’épuisèrent en vain pour la repeupler ; le poison de l’or et du plaisir ayant énervé l’espèce, le monde se trouva désert et fut menacé de le devenir tous les jours davantage par les guerres continuelles qu’alluma sur notre continent l’ambition de s’étendre dans ces îles étrangères.

 

          Comptons maintenant les milliers d’esclaves que le fanatisme a faits, soit en Asie, où l’incirconcision était une tache d’infamie ; soit en Afrique, où le nom de chrétien était un crime ; soit en Amérique, où le prétexte du baptême étouffa l’humanité. Comptons les milliers d’hommes que l’on a vus périr, ou sur les échafauds dans les siècles de persécution, ou dans les guerres civiles par la main de leurs concitoyens, ou de leurs propres mains par des macérations excessives. Parcourons la surface de la terre, et après avoir vu d’un coup d’œil tant d’étendards déployés au nom de la religion, en Espagne contre les Maures, en France contre les Turcs, en Hongrie contre les Tartares ; tant d’ordres militaires fondés pour convertir les infidèles à coups d’épée, s’entr’égorger au pied de l’autel qu’ils devaient défendre ; détournons nos regards de ce tribunal affreux élevé sur le corps des innocents et des malheureux pour juger les vivants comme Dieu jugera les morts, mais avec une balance bien différente.

 

          En un mot, toutes les horreurs de quinze siècles renouvelées plusieurs fois dans un seul, des peuples sans défense égorgés au pied des autels, des rois poignardés ou empoisonnés, un vaste Etat réduit à sa moitié par ses propres citoyens, la nation la plus belliqueuse, et la plus pacifique divisée d’avec elle-même, le glaive tiré entre le fils et le père, des usurpateurs, des tyrans, des bourreaux, des parricides et des sacrilèges, violant toutes les conventions divines et humaines par esprit de religion : voilà l’histoire du fanatisme et de ses exploits.

 

 

 

 

 

SECTION II.

 

 

 

          Si cette expression tient encore à son origine, ce n’est que par un filet bien mince.

 

          Fanaticus était un titre honorable ; il signifiait, desservant ou bienfaiteur d’un temple. Les antiquaires, comme le dit le Dictionnaire de Trévoux, ont retrouvé des inscriptions dans lesquelles des Romains considérables prenaient ce titre de fanaticus.

 

          Dans la harangue de Cicéron Pro domo suâ, il y a un passage où le mot fanaticus me paraît difficile à expliquer Le séditieux et débauché Clodius, qui avait fait exiler Cicéron pour avoir sauvé la république, non-seulement avait pillé et démoli les maisons de ce grand homme ; mais, afin que Cicéron ne pût jamais rentrer dans sa maison de Rome, il en avait consacré le terrain, et les prêtres y avaient bâti un temple à la Liberté, ou plutôt à l’esclavage dans lequel César, Pompée, Crassus, et Clodius tenaient alors la république : tant la religion, dans tous les temps, a servi à persécuter les grands hommes !

 

          Lorsque enfin, dans un temps plus heureux, Cicéron fut rappelé, il plaida devant le peuple pour obtenir que le terrain de sa maison lui fût rendu, et qu’on la rebâtit aux frais du peuple romain. Voici comme il s’exprime dans son plaidoyer contre Clodius (Oratio pro domo suâ, cp. XL) :

 

 

« Adspicite, adspicite, pontifices, hominem religiosum, et …monete eum modum quemdam esse relligionis : nimium esse supertitiosum non portere. Quid tibi necesse fuit anili superstitione, homo fanatice, sacrificium, quo alienæ domi fieret, invisere ? »

 

 

          Le mot fanaticus signifie-t-il en cette place insensé fanatique, impitoyable fanatique, abominable fanatique, comme on l’entend aujourd’hui ? Ou bien signifie-t-il pieux, consécrateur, homme religieux, dévot zélateur des temples ? Ce mot est-il ici une injure ou une louange ironique ? Je n’en sais pas assez pour décider, mais je vais traduire.

 

 

«  Regardez, pontifes, regardez cet homme religieux, … avertissez-le que la religion même à ses bornes, qu’il ne faut pas être si scrupuleux. Quel besoin vous consécrateur, vous fanatique, quel besoin avez-vous de secourir à des superstitions de vieille, pour assister à un sacrifice qui se faisait dans une maison étrangère ? »

 

 

          Cicéron fait ici allusion aux mystères de la bonne déesse, que Clodius avait profanés en se glissant déguisé en femme avec une vieille, pour entrer dans la maison de César et pour y coucher avec sa femme : c’est donc ici évidemment une ironie.

 

          Cicéron appelle Clodius homme religieux ; l’ironie doit donc être soutenue dans tout ce passage. Il se sert de termes honorables pour mieux faire sentir la honte de Clodius. Il me paraît donc qu’il emploie le mot fanatique comme un mot honorable, comme un mot qui emporte avec lui l’idée de consécrateur, de pieux, de zélé desservant d’un temple.

 

          On put depuis donner ce nom à ceux qui se crurent inspirés par les dieux.

 

Les dieux à leur interprète

Ont fait un étrange don :

Ne peut-on être prophète

Sans qu’on perde la raison ?

 

 

          Le même Dictionnaire de Trévoux dit que les anciennes chroniques de France appellent Clovis fanatique et païen. Le lecteur désirerait qu’on nous eût désigné ces chroniques. Je n’ai point trouvé cette épithète de Clovis dans le peu de livres que j’ai vers le mont Krapack où je demeure.

 

          On entend aujourd’hui par fanatisme une folie religieuse, sombre et cruelle. C’est une maladie de l’esprit qui se gagne comme la petite vérole. Les livres la communiquent beaucoup moins que les assemblées et les discours. On s’échauffe rarement en lisant : car alors on peut avoir le sens rassis. Mais quand un homme ardent et d’une imagination forte parle à des imaginations faibles, ses yeux sont en feu, et ce feu se communique ; ses tons, ses gestes, ébranlent tous les nerfs des auditeurs. Il crie : Dieu vous regarde, sacrifiez ce qui n’est qu’humain ; combattez les combats du Seigneur : et on va combattre.

 

          Le fanatisme est à la superstition ce que le transport est à la fièvre, ce que la rage est à la colère.

 

          Celui qui a des extases, des visions, qui prend des songes pour des réalités, et ses imaginations pour des prophéties, est un fanatique novice qui donne de grandes espérances ; il pourra bientôt tuer pour l’amour de Dieu.

 

          Barthélemi Diaz fut un fanatique profès. Il avait à Nuremberg un frère, Jean Diaz, qui n’était encore qu’enthousiaste luthérien, vivement convaincu que le pape est l’Antéchrist, ayant le signe de la bête. Barthélemi, encore plus vivement persuadé que le pape est Dieu en terre, part de Rome pour aller convertir ou tuer son frère ; il l’assassine ; voilà du parfait : et nous avons ailleurs rendu justice à ce Diaz.

 

          Polyeucte, qui va au temple, dans un jour de solennité, renverser et casser les statues et les ornements, est un fanatique moins horrible que Diaz, mais non moins sot. Les assassins du duc François de Guise, de Guillaume prince d’Orange, du roi Henri III, du roi Henri IV et de tant d’autres, étaient des énergumènes malades de la même rage que Diaz.

 

          Le plus grand exemple de fanatisme est celui des bourgeois de Paris qui coururent assassiner, égorger, jeter par les fenêtres, mettre en pièces, la nuit de la Saint-Barthélemy, leurs concitoyens qui n’allaient point à la messe. Guyon, Patouillet, Chaudon, Nonotte, l’ex-jésuite Paulian (3), ne sont que des fanatiques du coin de la rue, des misérables à qui on ne prend pas garde : mais un jour de Saint-Barthélemy ils feraient de grandes choses.

 

          Il y a des fanatiques de sang-froid : ce sont les juges qui condamnent à la mort ceux qui n’ont d’autre crime que de ne pas penser comme eux ; et ces juges-là sont d’autant plus coupables, d’autant plus dignes de l’exécration du genre humain, que, n’étant pas dans un accès de fureur comme les Clément, les Chastel, les Ravaillac, les Damiens, il semble qu’ils pourraient écouter la raison (4).

 

          Il n’est d’autre remède à cette maladie épidémique que l’esprit philosophique, qui, répandu de proche en proche, adoucit enfin les mœurs des hommes, et qui prévient les accès du mal ; car dès que ce mal fait des progrès, il faut fuir et attendre que l’air soit purifié. Les lois et la religion, loin d’être pour elles un aliment salutaire, se tourne en poison dans les cerveaux infectés. Ces misérables ont sans cesse présent à l’esprit l’exemple d’Aod qui assassine le roi Eglon ; de Judith qui coupe la tête d’Holopherne en couchant avec lui ; de Samuel qui hache en morceaux le roi Agag ; du prêtre Joad qui assassine sa reine à la Porte-aux-Chevaux, etc., etc., etc. Ils ne voient pas que ces exemples, qui sont respectables dans l’antiquité, sont abominables dans le temps présent ; ils puisent leurs fureurs dans la religion même qui les condamne.

 

          Les lois sont encore très impuissantes contre ces accès de rage ; c’est comme si vous lisiez un arrêt du conseil à un frénétique. Ces gens-là sont persuadés que l’esprit saint qui les pénètre est au-dessus des lois, que leur enthousiasme est la seule loi qu’ils doivent entendre.

 

          Que répondre à un homme qui vous dit qu’il aime mieux obéir à Dieu qu’aux hommes, et qui en conséquence est sûr de mériter le ciel en vous égorgeant ?

 

          Lorsqu’une fois le fanatisme a gangrené un cerveau, la maladie est presque incurable. J’ai vu des convulsionnaires qui, en parlant des miracles de saint Pâris, s’échauffaient par degrés parmi eux ; leurs yeux s’enflammaient, tout leur corps tremblait, la fureur défigurait leur visge, et ils auraient tué quiconque les eût contredits.

 

          Oui, je les ai vus ces convulsionnaires, je les ai vus, tordre leurs membres et écumer. Ils criaient : il faut du sang ! Ils sont parvenus à faire assassiner leur roi par un laquais (5), et ils ont fini par ne crier que contre les philosophes.

 

          Ce sont presque toujours les fripons qui conduisent les fanatiques, et qui mettent le poignard entre leurs mains  ils ressemblent à ce Vieux de la montagne, qui faisait, dit-on, goûter les joies du paradis à des imbéciles, et qui leur promettait une éternité de ces plaisirs dont il leur avait donné un avant-goût, à condition qu’ils iraient assassiner tous ceux qu’il leur nommerait. Il n’y a eu qu’une seule religion dans le monde qui n’ait pas été souillée par le fanatisme, c’est celle des lettrés de la Chine. Les sectes des philosophes étaient non-seulement exemptes de cette peste, mais elles en étaient le remède ; car l’effet de la philosophie est de rendre l’âme tranquille, et le fanatisme est incompatible avec la tranquillité. Si notre sainte religion a été si souvent corrompue par cette fureur infernale, c’est à la folie des hommes qu’il faut s’en prendre.

 

 

Ainsi du plumage qu’il eut

Icare pervertit l’usage :

Il le reçut pour son salut,

Il s’en servit pour son dommage.

 

BERTAUD, évêque de Séez.

 

 

 

 

 

 

FANATISME -1

 

1 – Cette première section est tirée mot pour mot de l’article FANATISME de l’Encyclopédie, par M. Deleyre ; Voltaire n’a fait ici que l’abréger et le mettre dans un autre ordre. (K.) – Le philosophe Deleyre était compatriote de Montesquieu et fut l’ami de Thomas et de J.J. – Rousseau. Après avoir été attaché à l’ambassade de Vienne il devint pendant quelque temps bibliothécaire de l’infant de Parme dont Condillac fut le précepteur. En 1792, le département de la Gironde le député à la Convention nationale. Dans le jugement de Louis XIV, il dit : « Pour le maintien de la république, pour le salut du peuple, pour l’instruction du genre humain, je vote pour la mort. » En 1795, il fut chargé de surveiller l’Ecole normale ; il siégea ensuite aux Cinq-Cents et mourut en 1797. Son article FANATISME est célèbre. On l’intercala par prudence dans l’article SUPERSTITION avec cet avis : « Le fanatisme étant la superstition mise en action, nous allons faire connaître ici ce zèle aveugle et passionné qui naît des opinions religieuses. » L’article se termine par la glorification du fanatisme du patriote qu’il semble opposer à l’autre. (G.A.)

 

2 – Tout ce paragraphe est le début de l’article de Deleyre. (G.A.)

 

3 – Tous adversaires de Voltaire.

 

4 – Encore les juges de Calas, de La Barre. (G.A.)

 

5 – Damiens.

 

 

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