LETTRES DE MEMMIUS A CICÉRON - Partie 6
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LETTRES DE MEMMIUS A CICÉRON.
(Partie 6)
II. Suite des probabilités de l'unité de Dieu. - Platon, Aristote, Cicéron et moi, nous sommes animés. Il se peut que dans d'autres globes, il soit des animaux d'une autre espèce, mille millions de fois plus éclairés et plus puissants que nous ; comme il se peut aussi qu'il n'y en ait pas, nous ne devons donc pas les admettre. La nature peut exister sans eux ; mais ce que nous connaissons de la nature ne pouvait exister sans un dessein, sans un plan ; et ce dessein, ce plan ne pouvait être conçu et exécuté sans une intelligence puissante ; donc je dois reconnaître cette intelligence, ce Dieu et rejeter tous ces prétendus dieux, habitants des planètes et de l'Olympe ; et tous ces prétendus fils de Dieu, les Bacchus, les Hercule, les Persée, les Romulus, etc., etc. Ce sont des fables milésiennes des contes de sorciers. Un Dieu se joindre à la nature humaine ! j'aimerais autant dire que les éléphants ont fait l'amour à des puces, et en ont eu de la race ; cela serait bien moins impertinent.
Tenons-nous en donc à ce que nous voyons évidemment, que dans un grand tout il est une grande intelligence. Fixons-nous à ce point jusqu'à ce que nous puissions faire encore quelques pas dans ce vaste abîme.
III. Contre les athées. - Il était bien hardi ce Straton qui, accordant l'intelligence aux opérations de son chien de chasse, la niait aux œuvres merveilleuses de toute la nature. Il avait le pouvoir de penser ; et il ne voulait pas qu'il y eût dans la fabrique du monde un pouvoir qui pensât.
Il disait que la nature seule, par ses combinaisons, produit des animaux pensants. Je l'arrête là, et je lui demande quelle preuve il en a. Il me répond que c'est son système, son hypothèse, que cette idée en vaut bien une autre.
Mais moi, je lui dis : Je ne veux point d'hypothèse, je veux des preuves. Quand Possidonius me dit qu'il peut carrer des lunules du cercle, et qu'il ne peut carrer le cercle, je ne le crois qu'après en avoir vu la démonstration.
Je ne sais pas si dans la suite des temps il se trouvera quelqu'un d'assez fou pour assurer que la matière, sans penser, produit d'elle-même des milliards d'êtres qui pensent. Je lui soutiendrai que, suivant ce beau système, la matière pourrait produire un Dieu sage, puissant, et bon.
Car si la matière seule a produit Archimède et vous, pourquoi ne produirait-elle pas un être qui serait incomparablement au-dessus d'Archimède et de vous par le génie, au-dessus de tous les hommes ensemble par la force et par la puissance, qui disposerait des éléments beaucoup mieux que le potier ne rend un peu d'argile souple à ses volontés ; en un mot, un Dieu ! je n'y vois aucune difficulté ; cette folie suit évidemment de son système.