LA BIBLE EXPLIQUÉE - Partie 102
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LA BIBLE EXPLIQUÉE.
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ANCIEN TESTAMENT.
(Partie 102)
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ROIS.
LIVRE IV.
Or il arriva qu'Ochozias, roi d'Israël, étant tombé par les barreaux d'une salle à manger, en Samarie (Chapitre I, v. 1.), en fut très mal. Et il dit à ses domestiques : Allez consulter Béelzébub, ou Belzébuth, le dieu d'Accaron, pour savoir si je pourrai en réchapper...
En même temps un ange du Seigneur parla à Elie le Thesbite, et lui dit : Va-t'en aux gens du roi de Samarie, et dis-leur : Est-ce qu'il n'y a pas un dieu en Israël ? pourquoi consultez-vous un dieu en Accaron ? c'est pourquoi voici ce que dit Adonaï : O roi, tu ne relèveras point de ton lit, ô roi ! mais tu mourras de mort. Et ayant parlé ainsi, Elie s'en alla. Les gens du roi retournèrent donc vers lui, et lui dirent : Il est venu un homme qui nous a dit : Tu ne relèveras point de ton lit, ô roi ! mais tu mourras de mort. Et ayant parlé ainsi, Elie s'en alla. Les gens du roi retournèrent donc vers lui, et lui dirent : Il est venu un homme qui nous a dit : Tu ne relèveras point de ton lit, ô roi ! mais tu mourras de mort... (1). Cet homme est très poiloux, et il a une ceinture de cuir sur les reins. Ah ! c'est Elie le Thesbite, dit le roi. Et aussitôt il envoya un capitaine avec cinquante soldats pour prendre Elie qui était de Dieu, le roi t'ordonne de descendre de la montagne. Elie lui répondit : Si je suis homme de Dieu, que la foudre descende du ciel, et te dévore toi et tes cinquante hommes et le capitaine.
Le roi Ochozias envoya aussitôt un autre capitaine avec cinquante autres soldats. Le capitaine dit à Elie : Allons, allons, homme de Dieu, descends vite. Elie lui répondit : Si je suis homme de Dieu, que la foudre descende du ciel, et te dévore toi et tes cinquante ! Et la foudre descendit, et dévora encore ce capitaine et cette cinquantaine (2).
Les enfants des prophètes, qui étaient à Jéricho, vinrent dire à Elisée (Chapitre II, v. 1.) : Ne sais-tu pas que le Seigneur doit enlever aujourd'hui Elie ? Elisée répondit : Je le sais ; n'en dites mot... Et cinquante enfants des prophètes suivirent Elie et Elisée jusqu'au bord du Jourdain. Alors Elie prit son manteau ; et l'ayant roulé, il en frappa les eaux du Jourdain, qui se divisèrent en deux parts ; et Elie et Elisée passèrent à sec. Quand ils furent passés, Elie dit à Elisée : Demande-moi ce que tu voudras avant que je sois enlevé d'avec toi. Elisée lui répondit : Je te prie que ton double esprit soit fait en moi. Elie lui dit : Tu me demandes là une chose bien difficile : cependant, si tu me vois quand je serai enlevé, tu l'auras ; mais si tu ne me vois point, tu ne l'auras pas (3).
Et comme ils continuaient leur chemin en causant ensemble, voici qu'un char de feu et des chevaux de feu descendirent et séparèrent Elie et Elisée ; et Elie fut enlevé au ciel dans un tourbillon (4).
1 - Nous n'examinerons ici que les objections de milord Bolingbrok. Selon lui, "Elie le Thesbite est un personnage imaginaire ; et Thesbe, sa patrie, est aussi inconnue que lui." Ses premières paroles confirment que chaque bourgade, dans tous ces pays-là, avait son dieu qui en valait bien un autre. Il était indifférent au roi Ochozias d'envoyer chez le dieu Adonaï, ou chez le dieu Béelzébut. Il paraît qu'Elie était très connu du roi Ochozias, puisque, lorsque ses gens lui dirent qu'il est venu un fou poiloux avec une ceinture de cuir, il dit tout d'un coup : C'est Elie. Il ne crut pas devoir consulter un homme que toute sa cour regardait avec dérision.
2 - Milord Bolingbroke continue ainsi : "Cet Elie, qui fait descendre deux fois la foudre sur deux capitaines, et sur deux compagnies de soldats envoyées de la part de son roi, ne peut être qu'un personnage chimérique ; car s'il pouvait se battre ainsi à coups de foudre, il aurait infailliblement conquis toute la terre en se promenant seulement avec son valet. C'est ce qu'on disait tous les jours aux sorciers : Si vous êtes sûrs que le diable, avec qui vous avez fait un pacte, fera tout ce que vous lui ordonnerez, que ne lui ordonnez-vous de vous donner tous les empires du monde, tout l'argent, et toutes les femmes? On pouvait dire de même à Elie : Tu viens de tuer deux capitaines et deux compagnies de gens d'armes à coups de tonnerre ; et tu t'enfuis comme un lâche, et comme un sot, dès que la reine Jézabel te menace de te faire pendre ! Ne pouvais-tu pas foudroyer Jézabel, comme tu as foudroyé ces deux pauvres capitaines ? Quelle impertinente contradiction fait de toi tantôt un dieu, et tantôt un goujat ? Quel homme sensé peut supporter ces détestable contes, qui font rire de pitié et frémir d'horreur ?"
Ces invectives terribles seraient à leur place contre les prêtres des faux dieux, mais non pas contre un prophète du Seigneur, qui ne parle et n'agit jamais de lui-même, et qui n'est que l'instrument du Seigneur. Il n'a point fait son marché avec Dieu, comme les sorciers prétendaient en avoir fait un avec le diable.
3 - L'enlèvement admirable d'Elie au ciel se prépare ; mais d'où ces fils de prophètes le savaient-ils ? Pourquoi Elie roule-t-il son manteau ? Pourquoi diviser les eaux du Jourdain comme avait fait Josué ? le char de feu dans lequel Elie monta ne pouvait-il pas l'enlever aussi bien à la droite qu'à la gauche du Jourdain ?
Nec deus intersit nisi dignus vindice nodus.
HOR., de Art poet.
On s'est beaucoup tourmenté pour savoir ce que c'est que ce double souffle, ou de double esprit, qu'Elisée, valet et successeur d'Elie, demande à son maître. Il lui demande un esprit aussi puissant que le sien, un esprit qui en vaut deux ; c'est le duplici panno d'Horace ; c'est, comme disent nos distillateurs, de l'eau de fleur d'oranger double.
A l'égard de la réponse d'Elie, les commentateurs ne l'ont jamais expliquée. Torniel pense qu'elle signifie : Si tu as les yeux assez bons pour me distinguer quand je serai dans mon char de feu environné de lumière, ce sera signe que tu auras autant de génie que moi : mais si tu ne peux me voir, ce sera signe que tu seras toujours médiocre. Sur quoi Toland dit que le savant Torniel est encore plus médiocre qu'Elisée. Nous n'approuvons pas ces écarts de Toland.
4 - Ce char de lumière, ces quatre chevaux de feu, ce tourbillon dans les airs, ce nom d'Elie ont fait penser au lord Bolingbroke et à M. Boulanger que l'aventure d'Elie était imitée de celle de Phaéton qui s'assit sur le char du soleil. La fable de Phaéton fut originairement égyptienne : c'est du moins une fable morale qui montre les dangers de l'ambition. Mais que signifie le char d'Elie ? Les écrivains juifs, dit le lord Bolingbroke, ne sont jamais que des plagiaires grossiers et maladroits. (Voltaire.) - "Ce qu'il y a d'historique dans ce récit, dit Munk, c'est qu'Elie se retira au delà du Jourdain, où il chargea Elisée de retourner à Samarie, pour y accomplir la mission religieuse et politique à laquelle il avait consacré toute sa vie." (G.A.)