COMMENTAIRE SUR L'ESPRIT DES LOIS - Partie 13

Publié le par loveVoltaire

COMMENTAIRE SUR L'ESPRIT DES LOIS - Partie 13

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COMMENTAIRE

 

SUR L'ESPRIT DES LOIS.

 

 

 

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- Partie 13 -

 

 

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COMMENTAIRE

 

SUR QUELQUES PRINCIPALES MAXIMES

 

DE L'ESPRIT DES LOIS.

 

 

 

 

XXIII.

 

 

 

 

 

 

      Chapitre XIII, livre V. "Quand les sauvages de la Louisiane veulent avoir du fruit, ils coupent l'arbre au pied et cueillent le fruit. Voila le gouvernement despotique." (Page 65.)

 

      Ce chapitre est un peu plus court encore ; c'est un ancien proverbe espagnol.

 

      Le sage roi Alfonse X disait : Élague sans abattre. Cela est plus court encore. C'est ce que Saavedra répète dans ses Méditations politiques. C'est ce que don Ustariz, véritable homme d'État, ne cesse de recommander dans sa Théorie pratique du commerce : "Le laboureur, quand il a besoin de bois, coupe une branche et non pas le pied de l'arbre." Mais ces maximes ne sont employées que pour donner plus de force aux sages représentations que fait Ustariz au roi son maître.

 

      Il est vrai que dans les lettres intitulées édifiantes et mêmes curieuses, recueil onzième, page 315, un jésuite nommé Marest parle ainsi des naturels de la Louisiane : "Nos sauvages ne sont pas accoutumés à cueillir les fruits aux arbres. Ils croient faire mieux d'abattre l'arbre même. Ce qui est cause qu'il n'y a presque aucun arbre fruitier aux environs du village."

 

      Ou le jésuite qui raconte cette imbécillité est bien crédule, ou la nature humaine des Mississipiens n'est pas faite comme la nature humaine du reste du monde. Il n'y a sauvage si sauvage qui ne s'aperçoivent qu'un pommier coupé ne porte plus de pommes. De plus, il n'y a point de sauvage auquel il ne soit plus aisé et plus commode de cueillir un fruit que d'abattre l'arbre. Mais le jésuite Marest a cru dire un bon mot.

 

 

 

 

 

XXIV.

 

 

 

 

 

 

      "En Turquie, lorsqu'un homme meurt sans enfants mâles, le grand-seigneur a la propriété ; les filles n'ont que l'usufruit." (Page 60, livre V, chapitre XIV.)

 

      Cela n'est pas ainsi : le grand-Seigneur a droit de prendre tout le mobilier des mâles morts à son service, comme les évêques chez nous prenaient le mobilier des curés, les papes le mobilier des évêques ; mais le Grand-Turc partage toujours avec la famille, ce que les papes ne faisaient pas toujours. La part des filles est réglée. Voyez le sura ou chapitre IV de l'Alcoran.

 

 

 

 

 

XXV.

 

 

 

 

 

 

      "Par la loi de Bantam, le roi prend la succession, même la femme, les enfants, et la maison." (Livre V, chapitre XIV.)

 

      Pourquoi ce bon roi de Bantam attend-il la mort du chef de famille ? Si tout lui appartient, que ne prend-il le père et la mère ?

 

      Est-il possible qu'un homme sérieux daigne nous parler si souvent des lois de Bantam, de Macassar, de Bornéo, d'Achem ; qu'il répète tant de contes de voyageurs, ou plutôt d'hommes errants, qui ont débité tant de fables, qui ont pris tant d'abus pour des lois, qui, sans sortir du comptoir d'un marchand hollandais, ont pénétré dans les palais de tant de princes de l'Asie ?

 

 

 

 

 

 

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