LA BIBLE EXPLIQUÉE - Partie 76
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LA BIBLE EXPLIQUÉE.
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ANCIEN TESTAMENT.
(Partie 76)
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ROIS.
LIVRE PREMIER.
(Chapitre XVII, v. 1.) Cependant les Philistins assemblèrent toutes leurs troupes pour le combat. Saül et les enfants d'Israël s'assemblèrent aussi. Les Philistins étaient sur une montagne, et les Juifs étaient d'un autre côté sur une montagne.
Et il arriva qu'un bâtard sortit du camp des Philistins ; il était de Geth ; et il avait six coudées et une palme de haut (douze pieds et demi) et il avait des bottes d'airain, et un grand bouclier d'airain sur les épaules. La hampe de sa lance était comme un grand bois des tisserands, et le fer de sa lance pesait six cents sicles (vingt livres) et son écuyer marchait devant lui... et il venait crier devant les phalanges d'Israël, et il disait : Si quelqu'un veut se battre contre moi (1), et s'il me tue, nous serons vos esclaves ; mais si je le tue, vous serez nos esclaves... Saül et tous les Israélites, entendant le verbe de ce Philistin, étaient stupéfaits, et tremblaient de peur.
Or David était fils d'un homme d'Ephrata, dont il a été parlé ; son nom était Isaï, qui avait huit fils, et qui était fort vieux et très âgé parmi les hommes.
Les trois plus grands de ses fils s'en allèrent après Saül pour le combat ; David était le plus petit, et il avait quitté Saül pour venir paître les troupeaux à Bethléem (2).
Cependant ce Philistin se présentait au combat le matin et le soir, et resta là debout pendant quarante jours...
Or Isaï dit à David son fils : Tiens, prends un litron de farine d'orge et dix pains, et cours à tes frères dans le camp. Porte aussi dix fromages à leur capitaine, visite tes frères, et vois comme ils se comportent... David se leva dès la pointe du jour, laissa son troupeau à un autre, et s'en alla tout chargé comme son père lui avait dit, et vint au lieu de Magala, où l'armée s'était avancée pour donner bataille, et qui criait déjà bataille... David, ayant donc laissé au bagage tout ce qu'il avait apporté, courut au lieu de la bataille voir comment ses frères se comportaient (3) ; et comme il parlait encore, voilà que le bâtard, nommé Goliath, Philistin de Geth, vint recommencer ses bravades, et tous les Israélites qui l'entendaient se mirent à fuir devant sa face en tremblant de peur... ; et un homme d'Israël se mit à dire : Voyez-vous ce Philistin qui vient insulter Israël ? S'il se trouve quelqu'un qui puisse le tuer, le roi l'enrichira de grandes richesses, et lui donnera sa fille, et sa famille sera affranchie de tout péage en Israël. Et David disait à ceux qui étaient auprès de lui : Que donnera-t-on à celui qui tuera ce Philistin ? Et le peuple lui répétait les mêmes discours...
Or ces paroles de David, ayant été entendues, furent rapportées au roi ; et Saül l'ayant fait venir devant lui, David lui parla ainsi (4) : Que personne n'ait le cœur troublé à cause de Goliath ; car j'irai, moi ton serviteur, et je combattrai ce Philistin... Et Saül lui dit : Tu ne saurais résister ce Philistin, parce que tu n'es qu'un enfant, et qu'il est homme de guerre dès sa jeunesse... Et David ajouta :Le Seigneur, qui m'a délivré de la main d'un lion et de la main d'un ours, me délivrera de la main de ce Philistin (5)... Saül dit donc à David : Va, et que le Seigneur soit avec toi. Et il lui donna ses armes, lui mit sur la tête un casque d'airain, et sur le corps une cuirasse... Et David, ayant ceint l'épée par-dessus sa tunique, commença à essayer s'il pouvait marcher avec ces armes ; car il n'y était pas accoutumé. David dit donc à Saül : je ne puis marcher avec ces armes, car je n'en ai pas l'habitude ; et il quitta ses armes ; il prit le bâton qu'il avait coutume de porter, et il prit dans le torrent cinq pierres, et les mit dans sa panetière ; et tenant sa fronde à la main, il marcha contre le Philistin.
Le Philistin s'avança aussi, et s'approcha de David, ayant devant lui son écuyer ; et lorqu'il eut regardé David, voyant que c''était un adolescent roux et beau à voir, il le méprisa, et lui dit : Suis-je un chien pour que tu viennes à moi avec un bâton ?...
Et David mit la main dans sa panetière, prit une pierre, la lança avec sa fronde ; la pierre s'enfonça dans le front du Philistin, et il tomba le visage contre terre... David courut, et se jeta sur le Philistin, prit son épée, la tira du fourreau, le tua, et coupa sa tête. (6).
1 - On remarque qu'en cet endroit l'histoire est interrompue, et que l'auteur sacré passe rapidement de la folie de Saül à des opérations de guerre. Rarement il se sert de transitions. Quelques-uns même affiment que c'est une marque infaillible de l'inspiration, de passer rapidement d'un objet à un autre. La cause, l'objet, et les détails de cette guerre ne sont pas exprimés selon notre méthode ; c'est à nous à nous conformer à celle de l'auteur.
Ce géant Goliath, qui avait douze pieds et demi de haut, ne doit pas paraître une chose extraordinaire après les géants que nous avons vus dans la Genèse. Il est vrai que nous ne voyons plus aujourd'hui des hommes de cette taille ; telle est même la constitution du corps humain, que cette excessive hauteur, en dérangeant toutes les proportions, rendrait ce géant très faible et incapable de se soutenir. Il faut regarder Goliath comme un prodige que Dieu suscitait pour manifester la gloire de David.
La Vulgate se sert ici du mot phalange, qui ne fut connu que longtemps après ; c'est une anticipation.
2 - M. Huet de Londres dit qu'il n'est pas naturel que David ayant été fait écuyer du roi le quittât pour aller paître des troupeaux au milieu de la guerre. Il convient que chez les anciens peuples, et surtout chez les premiers Romains, il n'était pas rare de passer de la charrue au commandement des armées ; mais il soutient que personne ne quitta jamais l'armée pour mener des brebis paître. Il se peut cependant que le père de David l'eût appelé auprès de lui pour quelque autre raison, et qu'étant chez son père il lui eût rendu les mêmes services qu'auparavant.
3 - On fait toujours la même question, pourquoi l'écuyer du roi l'avait abandonné ? Nous y avons déjà répondu.
4 - Les critiques disent que ces histoires de géants vaincus par des hommes d'une taille médiocre sont très communes dans l'antiquité, soit qu'elles aient été véritables, soit qu'elles aient été inventées. Un fait n'est pas toujours romanesque pour avoir l'air romanesque. Ils censurent ces paroles de David, "que donnera-t-on ?" Il semble que David ne combatte pas par amour pour la patrie, mais par l'espoir du gain. Mais il est permis de désirer une juste récompense.
5 -Il y a des naturalistes qui prétendent qu'on ne voit point d'ours dans les pays qui nourrissent des lions. Nous ne sommes pas assez instuits de cette particularité pour les réfuter ; l'histoire sacrée est- plus croyable qu'eux.
6 - D'autres critiques disent qu'un caillou lancé de bas en haut contre un casque d'airain ne peut s'enfoncer dans le front ; c'est une objection vaine.