LA BIBLE EXPLIQUÉE - Partie 47

Publié le par loveVoltaire

LA BIBLE EXPLIQUÉE - Partie 47

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LA BIBLE EXPLIQUÉE.

 

 

 

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ANCIEN TESTAMENT.

 

 

 

(Partie 47)

 

 

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JOSUÉ.

 

 

 

 

 

 

 

 

      (Chapitre X., v. 1) Adonisédec, roi de Jérusalem, ayant appris ce que Josué fait dans Haï et dans Jéricho, envoya vers le roi d'Hébron, vers Pharam, roi de Jérimoth, etc... (1).

 

      Josué tomba donc tout d'un coup sur eux tous, et le Seigneur les épouvanta, et il en fit un grand carnage près de Gabaon. Josué les poursuivit par la voie de Bethhoron, et les tailla tous en pièces ; et lorsque les fuyards furent dans la descente de Bethhoron, le Seigneur fit pleuvoir du haut du ciel sur eux de grosses pierres, et en tua beaucoup plus que le glaive d'Israël n'en avait mis à mort (2)... Alors Josué parla au Seigneur le jour auquel il avait livré les Amorrhéens entre ses mains, en présence des enfants d'Israël, et il dit en leur présence : Soleil, arrête-toi vis-à-vis de Gabaon ; lune, n'avance pas contre la vallée d'Aïalon. Et le soleil et la lune s'arrêtèrent jusqu'à ce que le peuple se fût vengé de ses ennemis... Cela n'est-il pas écrit dans le livre des Justes ? Le soleil s'arrêta donc au milieu du ciel, et ne se coucha point l'espace d'un jour (3).

 

      Jamais jour, ni devant ni après, ne fut si long que celui-là... Les cinq rois s'étant sauvés dans une caverne de la ville de Macéda... Josué les fit amener en sa présence, et dit aux principaux officiers de son armée : Mettez le pied dessus le cou de ces rois (Chapitre X., v. 24). Et tandis qu'ils leur mettaient le pied sur la gorge, Josué leur dit : N'ayez point peur, confortez-vous, soyez robustes ; car c'est ainsi que Dieu traitera ceux qui combattront contre nous. Après cela, Josué frappa ces rois et les tua, et les fit ensuite attacher à cinq potences (4).

 

 

 

 

 

 

1 - Les critiques disent qu'il n'y avait point de roi de Jérusalem alors. Ils prétendent même que le mot de Jérusalem était inconnu. C'était un village des Jébuséens, qui touche au grand désert de l'Arabie Pétrée, un lieu fort propre à bâtir une forteresse sur le passage des Arabes. Ce sont trois montagnes dans un pays aride. Nous disons, avec les commentateurs, les plus approuvés, que Josué n'écrivit point cette histoire. Les Samaritains ont un livre de Josué très différent de celui-ci. Il y en a un exemplaire dans la bibliothèque de Leyde : mais nous ne reconnaissons que celui qui est admis dans le canon. C'est indubitablement le seul sacré et le seul inspiré.

 

2 - Toute l'antiquité a parlé de pluies de pierres. La première est celle que Jupiter envoya au secours d'Hercule contre les fils de Neptune. Dom Calmet assure "que c'est un fait constant qu'on a vu autrefois de fort grosses pierres s'enflammer en l'air et retomber sur la terre, et qu'on ne peut raisonnablement révoquer en doute le prodige raconté par Josué."

 

On remarque seulement ici que ces pierres étant fort grosses, durent écraser tous les Amorrhéens qui étaient poursuivis par l'armée de Josué, et qu'il est difficile qu'il en soit resté un seul en vie. C'est ce qui fait que plusieurs savants sont étonnés que Josué ait encore eu recours au grand miracle d'arrêter le soleil et la lune.

 

3 - Grotius prétend que le texte ne signifie pas que le soleil et la lune s'arrêtèrent , mais que Dieu donna le temps à Josué de tuer tout ce qui pouvait rester d'ennemis avant que le soleil et la lune se couchassent. Leclerc décide nettement que le soleil ne s'arrêta pas, mais parut s'arrêter. Mais tous les autres commentateurs, parmi lesquels nous ne comptons point Spinosa, qui ne doit pas être compté, conviennent que le soleil et la lune s'arrêtèrent en plein midi. On aurait eu le temps de tuer tous les fuyards depuis midi jusqu'au soir, supposé que la pluie de pierres en eût épargné quelques-uns; mais il se peut aussi qu'il y en eût qui coururent si vite, qu'il fallut huit à neuf heures pour les attraper et les tuer tous.

 

Les profanes remarquent que Bacchus avait déjà fait arrêter le soleil et la lune, et que le soleil recula d'horreur à la vue du festin d'Altrée et de Thyeste. Sur quoi M. Boulanger ose dire "que si le miracle de Josué était vrai, c'est que le soleil se serait arrêté d'horreur en voyant un brigand si barbare qui égorgeait les femmes, les enfants, et les rois, et les bœufs, et les moutons, et les ânes, et qui ne voulait pas qu'un seul animal vivant, soit roi, soit brebis, échappât à son inconcevable cruauté."

 

Les physiciens ont quelque peine à expliquer comment le soleil, qui ne marche pas, arrêta sa course ; et comment cette journée, qui fut le double des autres journées, put s'accorder avec le mouvement des planètes et la régularité des éclipses. Le R.P dom Calmet dit "qu'il ne fallait que faire aller d'une vitesse égale, par-dessus et par-dessous la terre, la matière céleste qui la frotte par là, en l'avançant d'un côté et la retardant de l'autre, le tournoiement de la terre sur son centre ne venant que de l'inégalité de ce frottement." Cette réponse ingénieuse, savante et nette, ne résout pas entièrement la question.

 

Nous sera-il permis, à propos de ce grand miracle, de raconter ce qui arriva à un disciple de Galilée, traduit devant l'inquisition pour avoir soutenu le mouvement de la terre autour du soleil ? On lui lisait sa sentence ; elle disait qu'il avait blasphémé, attendu que Josué avait arrêté le soleil dans sa course. "Eh, messeigneurs, leur dit-il, c'est aussi depuis ce temps-là que le soleil ne marche plus".

 

A l'égard du livre des Justes, qui est cité comme garant de la vérité de cette histoire, le lord Bolingbroke insiste beaucoup sur ce livre, qui dans les Bibles protestantes est appelé le livre du Droiturier. Cela démontre, dit-il, que c'est du livre du Droiturier que l'histoire de Josué est prise. Mais ce même livre du Droiturier est cité dans le second livre des Chroniques des Rois. Or, comment le même livre peut-il avoir été écrit du temps des Rois et avant Josué ? Cette difficulté est grande. Dom Calmet y répond en disant "que ce livre est entièrement perdu." (Voltaire.) - On considère aujourd'hui ce passage "Soleil, arrête-toi ! etc.," comme un commencement de cantique emprunté à un recueil de poésies nationales. (G.A.)

 

4 - Leclerc et quelques théologiens de Hollande n'ont pas ici tout à fait le même emportement que Bolingbroke et Boulanger à propos de ces cinq rois, sur le cou desquels les princes de l'armée juive mettent le pied jusqu'à ce que Josué vienne les tuer de sang-froid. Nous avouerons toujours que tout cela n'est pas dans nos mœurs, que nous faisons aujourd'hui la guerre plus généreusement : mais aussi nous ne la faisons pas par ordre exprès du Seigneur ; et il ne nous a pas commandé expressément, comme à Josué, de tuer tous les rois que sa providence voulait punir. On ne fait plus pendre tous les rois qui ont été pris à la guerre, parce qu'il n'y en a plus qui prévariquent contre le Seigneur comme les rois de Canaan avaient prévariqué. L'objection des savants qui prouvent qu'il n'y avait aucun roi dans ce pays, composé seulement de quelques villages où un peuple innocent cultivait une terre sèche et ingrate, portant très peu de blés et hérissée de montagnes, cette objection, dis-je, est peu de chose ; car soit qu'on appelât les principaux de ces villages, rois, ou maires, ou syndics, cela revient au même ; on leur mis à tous le pied sur le cou, parce qu'ils avaient tous prévariqué.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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