LA BIBLE EXPLIQUÉE - Partie 42
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LA BIBLE EXPLIQUÉE.
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ANCIEN TESTAMENT.
(Partie 42)
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DEUTÉRONOME.
(Chapitre XII, v.19)... Prenez bien garde d'avoir soin du lévite dans tout le temps que vous demeurerez sur la terre...
(Chapitre XIII, v. I). S'il s'élève parmi vous un prophète qui dise avoir vu des visions et des songes, et s'il prédit des signes et des miracles, et si les choses qu'il aura prédites arrivent, et qu'il vous dise : Allons, suivons des dieux étrangers que vous ne connaissez pas, et servons-les, vous n'écouterez pas ce prophète, ce songeur de songes ; car c'est le Seigneur votre Dieu qui vous tente, afin qu'il voie si vous l'aimez ou non de toute votre âme... Ce prophète, ou ce songeur de songes sera mis à mort. Si votre frère, fils de votre mère, ou votre fils, ou votre fille, ou votre femme qui est entre vos bras, vous dit en secret : Allons, servons des dieux étrangers ; tuez aussitôt votre frère ou votre fils, ou votre femme ; qu'ils reçoivent le premier coup de votre main, et que tout le peuple frappe après vous (1).
(Chapitre XIII, v. 12.) Si vous apprenez que dans une de vos villes des gens méchants ont dit : Allons, servons des dieux à vous inconnus; vous passerez aussitôt au fil de l'épée tous les habitants de cette ville, et vous la détruirez avec tout ce qu'elle possède, jusqu'aux bêtes (2).
Lorsque vous aurez un chemin trop long à faire, vous apporterez toutes les dîmes au Seigneur... Vous les vendrez toutes, et vous achèterez de cet argent tout ce que vous voudrez, bœufs, brebis, vin, bière, et vous en mangerez avec le lévite qui est dans l'enceinte de vos murs, et qui n'a point d'autres possessions sur la terre... Gardez-vous d'abandonner le lévite (3).
(Chapitre XVII, v. 14.) Quand vous serez entrés dans la terre que le Seigneur vous donnera, et que vous la posséderez, et que vous direz : Nous voulons choisir un roi comme en ont les autres nations qui nous environnent, vous ne pourrez prendre pour roi qu'un homme de votre nation, un de vos frères, et quand il sera établi roi, il n'aura pas un grand nombre de chevaux, il ne ramènera point le peuple en Égypte, il n'aura point cette multitude de femmes qui enchantent son esprit, ni de grands monceaux d'or et d'argent (4)... Après qu'il sera assis sur son trône, il écrira pour lui ce Deutéronome sur un exemplaire des prêtres de la tribu de Lévi.
1 - Le premier président de Harlay, sachant qu'on avait abusé de ce passage de l'Écriture, et de quelques autres passages pareils pour faire assassiner Henri III par le jacobin Jacques Clément, écrivit dans un petit Mémoire, qui nous a été montré par un magistrat de sa maison, ces propres mots : "Il serait expédient de ne laisser lire aux jeunes prêtres aucun des livres de l'ancien Testament, dans lesquels pourraient se rencontrer semblables instigations qui ont induit maints esprits faibles et méchants au parricide et régicide. Il vaut mieux ne point lire, que de tourner en poison ce qui doit être nourriture de vie."
On peut appliquer à ce passage du Deutéronome la réflexion du président de Harlay. Il est aisé à un fanatique de se persuader que sa femme et son fils veulent le faire apostasier ; et s'il les tue sur ce prétexte, il se croira un saint.
Ravaillac avoue, dans son interrogatoire, qu'il n'a assassiné Henri IV que parce qu'il ne croyait pas que ce grand et adorable monarque fût bon catholique.
On a cru voir encore un autre danger dans ces versets du Deutéronome, et le voici. Si un prophète prédit des choses miraculeuses, et si ces choses miraculeuses arrivent, c'est donc la Divinité elle-même qui l'a inspiré ; et s'il vous dit ensuite, Je suis autorisé par mes miracles à vous prêcher le culte d'un nouveau dieu, ce nouveau dieu est donc le véritable. Cet argument, sans doute, n'est pas aisé à réfuter, à moins que vous ne disiez qu'un fripon scélérat peut faire de véritables miracles. Mais alors vous faites un dieu de ce fripon scélérat : et s'il est votre père ou votre frère, comme vous le supposez, si vous le tuez, vous commettez non-seulement un parricide, mais un déicide. Vous n'avez plus d'autre réponse à faire, que d'avoir recours à la magie, et de dire qu'il est au pouvoir des prétendus magiciens de faire de vrais miracles. Ainsi,quelque chose que vous répondiez, vous êtes absurde ou barbare.
Cette objection est spécieuse. On la résout en disant que Dieu ne permet jamais qu'un faux prophète fasse autant de miracles qu'un vrai prophète.
2 - Le lord Bolingbroke parle sur cet article avec plus de force encore que le président de Harlay. "C'est le comble, dit-il, de la barbarie en démence, de massacrer tous les habitants d'une ville qui vous appartient, et d'y détruire tout, jusqu'aux bêtes, parce que quelques citoyens de cette ville ont eu un culte différent du vôtre. Ce serait un peuple coupable de cette exécrable cruauté qu'il faudrait détruire, comme nous avons détruit les loups en Angleterre."
Pour tâcher d'apaiser ceux qui pensent comme le président de Harlay et comme le lord Bolingbroke, nous dirons que ces passages du Deutéronome ne sont probablement que comminatoires ; et nous dirons à ceux qui sont persuadés qu'Esdras, ou quelque autre lévite, composa ce livre, qu'il ne voulut qu'inspirer une forte horreur pour le culte des Babyloniens, et pour celui des Persans. Mais nous conviendrons qu'il ne faut jamais lire l'Écriture qu'avec un esprit de paix et de charité universelle.
Nous avouons, d'ailleurs, que cela n'a pu être écrit que dans un temps où les Hébreux eurent des villes, et où chaque ville voulut avoir son dieu et son culte, pour être plus indépendante de ses voisines. La haine fut extrême entre tous les habitants de cette partie de la Syrie. La superstition et l'esprit de rapine envenimèrent cette haine ; et tant qu'il y eut des Juifs, leur histoire fut l'histoire des cannibales ; mais c'est que Dieu voulait les éprouver. D'ailleurs, la loi juive ne nous importe point ; nous sommes chrétiens et non pas juifs.
3 - Les critiques prétendent que ce passage prouve trois choses : la première, que c'est évidemment un lévite qui écrivit ce livre quand les Juifs eurent des villes ; la seconde, que les lévites n'eurent jamais quarante-huit villes à eux appartenantes ; la troisième, que les Israélites ne furent pas nourris simplement de manne dans le désert, puisqu'ils doivent manger du bœuf et du mouton, et boire du vin et de la bière avec le lévite. Cette critique nous paraît bien rigoureuse. L'auteur sacré veut dire, probablement, que les Juifs doivent manger du bœuf et du mouton, et boire de la bière et du vin avec le lévite, quand ils en auront.
4 - Ceux qui croient qu'un lévite du temps des Rois est l'auteur du Deutéronome, sont confirmés dans leur opinion par cet article. Il y a, selon la Vulgate, trois cent cinquante-six ans de la mort de Mosé à l'élection du roi Saül, et bien davantage selon d'autres calculs. Comment se pourrait-il que Mosé parlât des rois, lorsque Dieu était le seul roi des Juifs ? On a soupçonné que le Pentateuque entier fut écrit par quelques lévites, huit cent vingt-sept ans après Mosé, selon la Vulgate, du temps du roi Josias. Ce livre, alors ignoré, fut trouvé au fond d'un coffre par le grand-prêtre Helcias lorsqu'il comptait de l'argent. Ce fut vers ce temps-là que quelques Juifs se réfugièrent en Égypte, sous le roi Néchao ; ainsi le lévite auteur du Pentateuque avertit ici les rois de ne point laisser passer leurs sujets chez les Égyptiens. Tout semblerait concourir à rendre cette opinion vraisemblable, si d'ailleurs on n'était pas convaincu que Mosé seul est l'auteur du Pentateuque.
La défense d'avoir un grand nombre de femmes et de chevaux semble regarder principalement Salomos, qu'on accuse d'avoir eu sept cents femmes et trois cents concubines, et quarante mille écuries ; car, pour Saül, il ne fut choisi pour toi que dans le temps qu'il cherchait ses ânesses.
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