LA BIBLE EXPLIQUÉE - Partie 1
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LA BIBLE EXPLIQUÉE.
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AVERTISSEMENT POUR LA PRÉSENTE ÉDITION.
Des matières contenues dans ce volume, nous faisons deux parts : l’une pour la CRITIQUE RELIGIEUSE, l’autre pour la CRITIQUE LITTÉRAIRE. On retrouvera sous cette double étiquette presque tous les écrits de Voltaire, que les éditeurs de Kehl avaient réunis sous les rubriques : PHILOSOPHIE et MÉLANGES LITTÉRAIRES. C’était là des titres bien vagues, et le premier surtout ne semblait guère convenir au genre d’ouvrages le plus nombreux dont il était suivi. Mais on avait dû choisir par prudence un terme aussi général.
L’édition de Kehl paraissait sous le règne de Louis XVI ; beaucoup d’écrits qu’on y réimprimait avaient été naguère condamnés et supprimés ; il fallait, pour obtenir qu’on les tolérât dans la masse des œuvres complètes, ne pas avoir trop l’air de braver la justice : on les déguisait donc, loin de les afficher. Ainsi la division dite PHILOSOPHIE s’ouvrait par le Traité de métaphysique, afin de justifier son titre ; mais c’était, à la suite, Dieu et les hommes, Les sentiments du curé Meslier, ouvrages de critique religieuse tous deux condamnés ; et, derrière, arrivait encore toute la série des autres publications clandestines de Voltaire contre le catholicisme.
C’est à tous ces trésors d’érudition, de bon sens et de verve gauloise que nous donnons aujourd’hui la première place. Les deux ou trois ouvrages de métaphysique ne viendront cette fois qu’en manière de conclusion. La Critique religieuse aura pour tête de colonne les Commentaires sur la Bible, de même que les Commentaires sur Corneille seront en avant dans la Critique littéraire. Puis, si d’une part Voltaire juge Molière, Racine, Boileau, Shakespeare, les deux Rousseau, etc. ; de l’autre, il s’expliquera sur Moïse, Jésus, saint Paul, Malebranche, Pascal, Meslier, etc. On voit tout de suite qu’il y a unité dans ce volume, malgré l’apparente variété de ses matières. Voltaire y domine à titre de critique proprement dit et de commentateur.
On trouvera dans les différents écrits théologiques de Voltaire beaucoup de répétitions et quelques contradictions apparentes. Mais « ces contradictions, dirons-nous avec les éditeurs de Kehl, n’ont d’autre cause que la liberté plus ou moins grande avec laquelle il a cru devoir se permettre d’établir ses opinions. Toutes les fois qu’un écrivain ne peut dire sous son nom tout ce qu’il croit être la vérité, sans s’exposer à une persécution injuste, les ouvrages qu’il publie doivent être lus et jugés comme des ouvrages dramatiques. Ce n’est point l’auteur qui parle, mais le personnage sous lequel il a voulu se cacher L’obligation de dire la vérité aux hommes, de ne jamais les tromper, est toujours la même ; mais à chaque forme d’ouvrage est susceptible d’une vérité différente. On peut être de bonne ou de mauvaise foi dans un roman comme dans une histoire, dans une tragédie comme dans un livre de morale ; mais ce n’est point de la même manière.
Quant aux répétitions, tous ces ouvrages ont été publiés à part et successivement ; ils se répandaient difficilement et avec lenteur dans la capitale, dans les provinces, dans plusieurs États de l’Europe, où les opinions nouvelles étaient saisies aux portes des villes comme des marchandises prohibées, et où des hommes, chargés de ce qu’ils appelaient la Police des livres, s’étaient arrogé le droit de penser pour le reste de leurs concitoyens. Souvent ceux entre les mains de qui tombait par hasard un de ces ouvrages n’avaient pu connaître les autres : il n’était donc point inutile d’y répéter les mêmes choses. »
Comme on le voit, tous ces écrits sont des livres non de librairie, mais de colportage. Voltaire a donné un grand développement à cette manière d’instruire le peuple en dépit des puissances, et toutes les feuilles qui suivent sont les chefs-d’œuvre du genre. – On trouvera en tête de chaque écrit la date de sa distribution et une notice explicative.
GEORGES AVENEL.