MÉMOIRES ET TRAITÉS DIVERS - Introduction et Sommaire

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MÉMOIRES ET TRAITÉS DIVERS - Introduction et Sommaire

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MÉMOIRES ET TRAITÉS DIVERS.

 

 

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DES SINGULARITÉS DE LA NATURE.

 

 

- 1768 -

 

 

 

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[Ce traité parut en 1768, c'est-à-dire plus de vingt ans après les mémoires précédents. Ceux-ci datent de Cirey, et les Singularités furent composées à Ferney, ainsi que les Colimaçons.] (G.A.)

 

 

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INTRODUCTION.

 

 

 

 

      On se propose ici d'examiner plusieurs objets de notre curiosité avec la défiance qu'on doit avoir de tout système, jusqu'à ce qu'il soit démontré aux yeux ou à la raison. Il faut bannir, autant qu'on le pourra, toute plaisanterie dans cette recherche. Les railleries ne sont pas des convictions ; les injures encore moins. Un médecin (1), plus connu par son imagination impétueuse que par sa pratique, en écrivant contre le célèbre Linnæus, qui range dans la même classe l'hippopotame, le porc, et le cheval, lui dit, Cheval toi-même. Je l'interrompis lorsqu'il lisait cette phrase, et je lui dis : « Vous m'avouerez que si M. Linnæus est un cheval, c'est le premier des chevaux. » Il n'est pas adroit de débuter par de telles épithètes, et il n'est pas honnête de conclure par elles.

 

      L'examen de la nature n'est pas une satire. Tenons-nous seulement en garde contre les apparences, qui trompent si souvent ; contre l'autorité magistrale, qui veut subjuguer ; contre le charlatanisme, qui accompagne et qui corrompt si souvent les sciences ; contre la foule crédule, qui est pour un temps l'écho d'un seul homme.

 

      Souvenons-nous que les tourbillons de Descartes se sont évanouis ; qu'il ne reste rien de ses trois éléments, presque rien de sa description de l'homme ; que deux de ses lois du mouvement sont fausses ; que son système sur la lumière est erroné ; que ses idées innées sont rejetées, etc., etc., etc.

 

      Songeons que les systèmes de Burnet, de Woodward, de Whiston, sur la formation de la terre n'ont pas aujourd'hui un partisan ; qu'on commence en Allemagne même à regarder les monades, l'harmonie préétablie, et la Théodicée de l'ingénieux et profond Leibnitz, comme des jeux d'esprit, oubliés en naissant dans tout le reste de l'Europe. Plus on a découvert de vérités dans le siècle de Newton, plus on doit bannir les erreurs qui souilleraient ces vérités. On a fait une ample moissons, mais il faut cribler le froment, et rejeter l'ivraie.

 

      Dans la physique, comme dans toutes les affaires du monde, commençons par douter : c'est le premier précepte d'Aristote et de Descartes. Mais on a cru en France que Descartes était l'inventeur de cette maxime.

 

      Examinons par nos yeux et par ceux des autres. Craignons ensuite d'établir des règles générales. Celui qui, n'ayant vu que des bipèdes et des quadrupèdes, enseignerait que la génération ne s'opère que par l'union d'un mâle et d'une femelle, se tromperait lourdement.

 

      Celui qui, avant l'invention de la greffe, aurait affirmé que les arbres ne peuvent jamais porter que des fruits de leur espèce, n'aurait avancé qu'une erreur.

 

      Il y a près d'un siècle qu'on crut avoir découvert un satellite de Vénus. Depuis, un célèbre observateur anglais vit ou crut voir ce satellite ; on a cru aussi le voir en France : cependant les astronomes n'en ont rien vu. Il peut exister ; mais attendons.

 

      L'analogie pourrait attribuer à plus forte raison un satellite à Mars, qui est beaucoup plus éloigné du soleil que nous ; ce satellite serait plus aisé à découvrir : cependant on ne l'a jamais aperçu. Le plus sûr est donc toujours de n'être sûr de rien, ni dans le ciel ni sur la terre, jusqu'à ce qu'on en ait des nouvelles bien constatées.

 

      Caliginosa nocte premit Deus : « Dieu couvre, dit Horace, ses secrets d'une nuit profonde. »

 

 

M'apprendra-t-on jamais par quels subtils ressorts

L'éternel Artisan fait végéter les corps ?

Pourquoi l'aspic affreux, le tigre, la panthère,

N'ont jamais dépouillé leur cruel caractère ;

Et que, reconnaissant la main qui le nourrit,

Le chien meurt en léchant le maître qu'il chérit ?

D'où vient qu'avec cent pieds, qui semblent inutiles,

Cet insecte tremblant traîne ses pas débiles ?

Pourquoi ce ver changeant se bâtit un tombeau,

S'enterre, et ressuscite avec un corps nouveau,

Et le front couronné, tout brillant d'étincelles,

S'élance dans les airs en déployant ses ailes ?

Le sage Dufaï, parmi ses plants divers,

Végétaux rassemblés des bouts de l'univers,

Me dira—t-il pourquoi la tendre sensitive

Se flétrit sous nos mains, honteuse et fugitive ?

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Demandez à Sylva par quel secret mystère

Ce pain, cet aliment, dans mon corps digéré,

Se transforme en un lait doucement préparé ?

Comment toujours filtré dans ses routes certaines,

En longs ruisseaux de pourpre il court enfler mes veines,

A mon corps languissant rend un pouvoir nouveau,

Fait palpiter mon cœur et penser mon cerveau ?

Il lève au ciel les yeux, il s'incline, il s'écrie :

« Demandez-le à ce Dieu qui nous donna la vie ? »

 

 

      Ce n'est point là ce qu'on appelle la raison paresseuse ; c'est la raison éclairée et soumise, qui sait qu'un être chétif ne peut pénétrer l'infini. Un fétu suffit pour nous démontrer notre impuissance. Il nous est donné de mesurer, calculer, peser, et faire des expériences ; mais souvenons-nous toujours que le sage Hippocrate commença ses Aphorismes par dire que l'expérience est trompeuse, et qu'Aristote commença sa métaphysique par ces mots : Qui cherche à s'instruire doit savoir douter.

 

      Pour voir de quels effets étonnants la nature est capable, examinons quelques-unes de ses productions qui sont sous nos mains, et cherchons (en doutant) quels résultats évidents nous en pourrions former.

 

 

 

 

1 – Maupertuis. (G.A.)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

MÉMOIRES ET TRAITÉS DIVERS

 

 

 

 

SOMMAIRE DES

 

CHAPITRES I à XXXVIII

 

 

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CHAPITRE I - Des pierres figurées.

 

CHAPITRE II -  Du corail.

 

CHAPITRE III -  Des polypes.

 

CHAPITRE IV  - Des limaçons.

 

CHAPITRE V -  Des huîtres à l'écaille.

 

CHAPITRE VI -  Des abeilles.

 

CHAPITRE VII -  De la pierre.

 

CHAPITRE VIII  - Du caillou.

 

CHAPITRE IX -  De la roche.

 

CHAPITRE X  - Des montagnes, de leur nécessité, et des causes finales.

 

CHAPITRE XI  - De la formation des montagnes.

 

CHAPITRE XII  - Des coquilles, et des systèmes bâtis sur des coquilles.

 

CHAPITRE XIII  - Amas de coquilles.

 

CHAPITRE XIV  - Observation importante sur la formation des pierres

et des coquillages.

 

CHAPITRE XV  - De la grotte des Fées.

 

CHAPITRE XVI  - Du falun de Touraine et de ses coquilles.

 

CHAPITRE XVII -  Idées de Palissy sur les coquilles prétendues.

 

CHAPITRE XVIII  - Du système de Maillet.

 

CHAPITRE XIX  - Des germes.

 

CHAPITRE XX  - De la prétendue race d'anguilles.

 

CHAPITRE XXI -  D'une femme qui accouche d'un lapin.

 

CHAPITRE XXII  - Des anciennes erreurs en physique.

 

CHAPITRE XXIII  - D'un homme qui faisait du salpêtre.

 

CHAPITRE XXIV  - D'un bateau du maréchal de Saxe.

 

CHAPITRE XXV  - Des méprises en mathématiques.

 

CHAPITRE XXVI  - Vérités condamnées.

 

CHAPITRE XXVII  - Digression.

 

CHAPITRE XXVIII  - Des éléments.

 

CHAPITRE XXIX  - De la terre.

 

CHAPITRE XXX  - De l'eau.

 

CHAPITRE XXXI  - De l'air.

 

CHAPITRE XXXII  - Du feu élémentaire et de la lumière.

 

CHAPITRE XXXIII  - Des lois inconnues.

 

CHAPITRE XXXIV  - Ignorances éternelles.

 

CHAPITRE XXXV  - Incertitudes en anatomie.

 

CHAPITRE XXXVI -  Des monstres et des races diverses.

 

CHAPITRE XXXVII -  De la population

 

CHAPITRE XXXVIII  - Ignorances stupides et méprises funestes.

 

 

 

 

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