MÉMOIRES ET TRAITÉS DIVERS - Chapitre XXVIII

Publié le par loveVoltaire

MÉMOIRES ET TRAITÉS DIVERS - Chapitre XXVIII

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MÉMOIRES ET TRAITÉS DIVERS.

 

 

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CHAPITRE XXVIII.

 

 

 

Des éléments.

 

 

 

 

 

      Y a-t-il des éléments ? Les trois imaginés par Descartes, que j'ai vus dans mon enfance enseignés par la plupart des écoles, étaient infiniment au-dessous des contes des Mille et une Nuits ; car aucun de ces contes ne répugne aux lois de la nature, et sont d'ailleurs très agréables. Les cinq principes des chimistes étaient si peu reconnus, qu'ils les réduisirent eux-mêmes à trois, puis à deux. Ils revinrent ensuite au feu, à l'eau, et à la terre.

 

      Il a bien fallu enfin admettre l'air. Ainsi les quatre éléments d'Aristote sont rentrés dans tout leur honneur. Mais ces éléments de quoi sont-ils faits eux-mêmes ? S'ils sont composés de parties, ils ne sont pas éléments. L'air, le feu, l'eau, et la terre, se changent-ils les uns dans les autres ? Subissent-ils des métamorphoses ? Qu'est-ce, à la rigueur, qu'une métamorphose ? C'est un être changé en un autre être ; c'est au fond l'anéantissement du premier, et la création du second. Pour que l'eau devienne absolument terre, il faut que cette eau périsse et que la terre se forme ; car si l'eau contenait en elle-même les principes de terre dans laquelle elle s'est changée, ce n'est plus une transmutation, c'est l'eau qui contenait en elle un peu de terre, et qui, s'étant évaporée, a laissé cette terre à découvert.

 

       Le célèbre Robert Boyle s'y trompa, et entraîna Newton dans sa méprise. Ayant longtemps tenu de l'eau dans une cornue à un feu égal, le chimiste qui opérait avec lui crut que l'eau s'était, au bout de quelques mois, changée en terre ; le fait était faux ; mais Newton, le croyait vrai, supposa que les quatre éléments pouvaient se changer les uns dans les autres. Boerhaave fit voir depuis quelle avait été la méprise de Boyle. Cette erreur avait conduit Newton à un système qui paraît faux. Si de grands hommes tels que Boyle et Newton se sont trompés, quel homme pourra se flatter d'être à l'abri de l'erreur ? Et quelle extrême défiance ne doit-on pas avoir des opinions reçues et de ses idées propres ?

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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