MÉMOIRES ET TRAITÉS DIVERS - Chapitre XXVI

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MÉMOIRES ET TRAITÉS DIVERS - Chapitre XXVI

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MÉMOIRES ET TRAITÉS DIVERS.

 

 

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CHAPITRE XXVI.

 

 

 

Vérités condamnées.

 

 

 

 

 

      Voilà bien des méprises dans lesquelles les plus grands hommes et les corps les plus savants sont tombés, parce que les meilleurs génies et les plus estimables tiennent toujours quelque chose de la fragilité humaine.

 

    On pourrait ajouter à cette liste les sentences portées contre Galilée. Deux congrégations de cardinaux le condamnèrent pour avoir soutenu le mouvement de la terre autour du soleil, mouvement qui était presque déjà démontré en rigueur. Il fut forcé de demander pardon à genoux, et d'avouer qu'il avait annoncé une doctrine absurde. Les cardinaux lui remontrèrent, d'après tous leurs théologiens, que Josué avait arrêté le soleil sur le chemin de Gabaon. Galilée n'avait qu'à leur répondre que c'était aussi depuis ce temps-là que le soleil était immobile. Mais enfin il fut condamné, à la honte de la raison ; et, comme on l'a déjà dit (1), ce jugement aurait couvert l'Italie d'un opprobre éternel, si Galilée ne l'avait couverte de gloire par sa philosophie même que l'on proscrivait.

 

      On sait assez qu'il y a un corps considérable (2) qui proscrivit les idées innées de Descartes, et qui ensuite a condamné ceux qui combattaient les idées innées. Cela prouve assez que les théologiens ne doivent point se mêler de philosophie. Il y a l'infini entre ces deux sciences.

 

      On a prononcé dans plus d'un pays des jugements encore plus étranges sur des points de physique qui ne sont nullement du ressort de Cujas et de Bartole. On sait à quel point le savant Ramus (3) fut persécuté pour n'avoir pas été de l'avis d'Aristote, qui n'était entendu ni de ses adversaires ni de ses juges. Et enfin il lui en coûta la vie à la journée de la Saint-Barthélemy.

 

      Les médecins qui tenaient pour les anciens intentèrent un procès à ceux qui démontraient la circulation du sang. Les maîtres d'erreur ont toujours eu recours à l'autorité quand il s'agissait de raison. Les exemples de ceux qui ont été condamnés pour avoir instruit le genre humain sont presque aussi nombreux en physique qu'en morale.

 

 

 

 

1 – Essai sur les mœurs, chapitre CXXI. (G.A.)

 

2 – La Sorbonne. (G.A.)

 

3 – Voyez, dans le Dictionnaire philosophique, l'article QUISQUIS. (G.A.)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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