ANNALES DE L'EMPIRE - CATALOGUE DES EMPEREURS - FERDINAND II - Partie 54.6

Publié le par loveVoltaire

ANNALES DE L'EMPIRE - CATALOGUE DES EMPEREURS - FERDINAND II - Partie 54.6

Photo de PAPAPOUSS

 

 

 

FERDINAND II,

 

 

QUARANTE-SIXIÈME EMPEREUR.

 

 

 

(Partie 6)

 

 

 

 

 

1635. En conséquence, le roi de France envoie une armée en Alsace, met garnison dans toutes les villes, excepté dans Strasbourg, alors indépendante, et qui fait dans la ligue le personnage d'un allié considérable. L'électeur de Trèves était sous la protection de la France. L'empereur le fit enlever : ce fut une raison de déclarer enfin la guerre à l'empereur. Cet électeur était en prison à Bruxelles sous la garde du cardinal infant ; et ce fut encore un prétexte de déclarer la guerre à la branche autrichienne espagnole.

 

La France n'unit donc ses armes à celles des Suédois que quand les Suédois furent malheureux, et lorsque la victoire de Nordlingue relevait le parti impérial. Le cardinal de Richelieu partageait déjà en idée la conquête des Pays-Bas espagnols avec les Hollandais : il comptait alors y aller commander lui-même, et avoir un prince d'Orange (Frédéric-Henri) sous ses ordres. Il avait en Allemagne, vers le Rhin, Bernard de Veimar à sa solde : l'armée de Veimar, qu'on appelait les troupes veimariennes, était devenue, comme celle de Charles IV de Lorraine et celle de Mansfeld, une armée isolée, indépendante, appartenante à son chef : on la fit passer pour l'armée des cercles de Souabe, de Franconie, du Haut et Bas-Rhin, quoique ces cercles ne l'entretinssent pas et que la France la payât.

 

C'est là le sort de la guerre de Trente-Ans. On voit d'un côté toute la maison d'Autriche, la Bavière, la ligue catholique ; et de l'autre, la France, la Suède, la Hollande, et la ligue protestante.

 

L'empereur ne pouvait pas négliger de désunir cette ligue protestante après la victoire de Nordlingue : et il y a grande apparence que la France s'y prit trop tard pour déclarer la guerre. Si elle l'eût faite dans le temps que Gustave-Adolphe débarquait en Allemagne, les troupes françaises entraient alors sans résistance dans un pays mécontent et effarouché de la nomination de Ferdinand ; mais, après la mort de Gustave, après Nordlingue, elles venaient dans un temps où l'Allemagne était lasse des dévastations des Suédois, et où le parti impérial reprenait la supériorité.

 

Dans le temps même que la France se déclarait, l'empereur ne manquait pas de faire avec la plupart des princes protestants un accommodement nécessaire. L'électeur de Saxe, celui-même qui avait appelé le premier les Suédois, fut le premier à les abandonner par ce traité, qui s'appelle la paix de Prague. Peu de traités font mieux voir combien la religion sert de prétexte aux politiques, comme on s'en joue, et comme on la sacrifie dans le besoin.

 

L'empereur avait mis l'Allemagne en feu pour la restitution des bénéfices ; et, dans la paix de Prague, il commence par abandonner l'archevêché de Magdebourg et tous les biens ecclésiastiques à l'électeur de Saxe, luthérien, moyennant une pension qu'on paiera sur ces mêmes bénéfices à l'électeur de Brandebourg, calviniste. Les intérêts de la maison palatine, qui avaient allumé cette longue guerre, furet le moindre objet de ce traité. L'électeur de Bavière devait seulement donner une subsistance à la veuve de celui qui avait été roi de Bohême, et au palatin son fils, quand il serait soumis à l'autorité impériale.

 

L'empereur s'engageait d'ailleurs à rendre tout ce qu'il avait pris sur les confédérés de la ligue protestante qui accéderaient à ce traité ; et ceux-ci devaient rendre tout ce qu'ils avaient pris sur la maison d'Autriche ; ce qui était peu de chose, puisque les terres de la maison impériale, excepté l'Autriche antérieure, n'avaient jamais été exposées dans cette guerre.

 

Une partie de la maison de Brunsvick, le duc de Mecklenbourg, la maison d'Auhalt, la branche de Saxe établie à Gotha, et le propre frère du duc Bernard de Saxe-Veimar, signent le traité, ainsi que plusieurs villes impériales ; les autres négocient encore, et attendent les plus grands avantages.

 

Le fardeau de la guerre, que les Français avaient laissé porter tout entier à Gustave-Adolphe, retomba donc sur eux en 1635 ; et cette guerre, qui s'était faite des bords de la mer Baltique jusqu'au fond de la Souabe, fut portée en Alsace, en Lorraine, en Franche-Comté, sur les frontières de la France. Louis XIII, qui n'avait payé que douze cent mille francs de subsides à Gustave-Adolphe, donnait quatre millions à Bernard de Veimar pour entretenir les troupes veimariennes : et encore le ministère français cède-t-il à ce duc toutes ses prétentions sur l'Alsace, et on lui promet qu'à la paix on le fera déclarer landgrave de cette province.

 

Il faut avouer que si ce n'était pas le cardinal de Richelieu qui eût fait ce traité, on le trouverait bien étrange. Comment donnait-il à un jeune prince allemand, qui pouvait avoir des enfants, cette province d'Alsace qui était si fort à la bienséance de la France, et dont elle possédait déjà quelques villes ? Il est bien probable que le cardinal de Richelieu n'avait point compté d'abord garder l'Alsace. Il n'espérait pas non plus annexer à la France la Lorraine, sur laquelle on n'avait aucun droit, et qu'il fallait bien rendre à la paix. La conquête de la Franche-Comté paraissait plus naturelle ; mais on ne fit de ce côté que de faibles efforts. L'espérance de partager les Pays-Bas avec les Hollandais était le principal objet du cardinal de Richelieu ; et c'était là ce qu'il avait tellement cœur, qu'il avait résolu, si sa santé et les affaires le lui eussent permis, d'y aller commander en personne. Cependant l'objet des Pays-Bas fut celui dans lequel il fut le plus malheureux, et l'Alsace, qu'il donnait si libéralement à Bernard de Veimar, fut, après la mort de ce cardinal, le partage de la France. Voilà comme les événements trompent presque toujours les politiques; à moins qu'on ne dise que sous le nom du duc de Veimar, comme elle avait une armée sous le nom de ce grand capitaine.

 

1636. L'Italie entrait encore dans cette grande querelle, mais non pas comme du temps des maisons impériales de Saxe et de Souabe, pour défendre sa liberté contre les armes allemandes. C'était à la branche autrichienne d'Espagne, dominante dans l'Italie, qu'on voulait disputer, en delà des Alpes, cette même supériorité qu'on disputait à l'autre branche en delà du Rhin. Le ministère de France avait alors pour lui la Savoie ; il venait de chasser les Espagnols de la Valteline : on attaquait de tous côtés ces deux vastes corps autrichiens.

 

La France seule envoyait à la fois cinq armées, et attaquait ou se soutenait vers le Piémont, vers le Rhin, sur les frontières de la Flandre, sur celles de la Franche-Comté et sur celles d'Espagne. François Ier avait fait autrefois un pareil effort ; et la France n'avait jamais montré depuis tant de ressources.

 

Au milieu de tous ces orages, dans cette confusion de puissances qui se choquent de tous les côtés, tandis que l'électeur de Saxe, après avoir appelé les Suédois en Allemagne, mène contre eux les troupes impériales, et qu'il est défait dans la Vestphalie par le général Bannier, que tout est ravagé dans la Hesse, dans la Saxe, et dans cette Vestphalie, Ferdinand, toujours uniquement occupé de sa politique, fait enfin déclarer son fils Ferdinand-Ernest roi des Romains, dans la diète de Ratisbonne, le 12 décembre. Ce prince est couronné le 20. Tous les ennemis de l'Autriche crient que cette élection est nulle. L'électeur de Trêves disent-ils, était prisonnier ; Charles-Louis, fils du palatin, roi de Bohême, Frédéric, n'est point rentré dans les droits de son palatinat : les électeurs de Mayence et de Cologne sont pensionnaires de l'empereur : tout cela, disait-on, est contre la bulle d'or. Il est pourtant vrai que la bulle d'or n'avait spécifié aucun de ces cas, et que l'élection de Ferdinand III, faite à la pluralité des voix, était aussi légitime qu'aucune autre élection d'un roi des Romains faite du vivant d'un empereur ; espèce dont la bulle d'or ne parle point du tout.

 

1637. Ferdinand II meurt le 15 février, à cinquante-neuf ans, après dix-huit ans d'un règne toujours troublé par des guerres intestines et étrangères, n'ayant jamais combattu que de son cabinet. Il fut très malheureux, puisque, dans ses succès, il se crut obligé d'être sanguinaire, et qu'il fallut soutenir ensuite de grands revers. L'Allemagne était plus malheureuse que lui ; ravagée tour à tour par elle-même, par les Suédois et par les Français, éprouvant la famine, la disette, et plongée dans la barbarie, suite inévitable d'une guerre si longue et si malheureuse.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Commenter cet article