ANNALES DE L'EMPIRE - CATALOGUE DES EMPEREURS - FERDINAND III - Partie 55.6

Publié le par loveVoltaire

ANNALES DE L'EMPIRE - CATALOGUE DES EMPEREURS - FERDINAND III - Partie 55.6

Photo de PAPAPOUSS

 

 

 

 

 

TABLEAU DE L'ALLEMAGNE,

 

DEPUIS LA PAIX DE VESTPHALIE JUSQU'A LA MORT DE FERDINAND III.

 

 

 

 

 

Ce chaos du gouvernement allemand ne fut donc bien débrouillé qu'après sept cents ans, à compter du règne de Henri-l'Oiseleur, et avant le temps de Henri il n'avait pas été un gouvernement. Les prérogatives des rois d'Allemagne ne furent restreintes dans des bornes connues, la plupart des droits des électeurs, des princes, de la noblesse immédiate et des villes ne furent fixés et incontestables, que par les traités de Vestphalie. L'Allemagne fut une grande aristocratie, à la tête de laquelle était un roi, à peu près comme en Angleterre, en Suède, en Pologne, et comme anciennement tous les États fondés par les peuples venus du Nord et de l'Orient furent gouvernés. La diète tenait lieu de parlement. Les villes impériales y eurent droit de suffrage pour résoudre la paix et la guerre.

 

Ces villes impériales jouissent de tous les droits régaliens comme les princes d'Allemagne : elles sont États de l'empire, et non de l'empereur ; elles ne paient pas la moindre imposition, et ne contribuent aux besoins de l'empire que dans les cas urgents ; leur taxe est réglée par la matricule générale.

 

Si elles avaient le droit de juger en dernier ressort, qu'on appelle de non appellando, elles seraient des États absolument souverains ; cependant avec tant de droits elles ont très peu de puissance, parce qu'elles sont entourées de princes qui en ont beaucoup. Les inconvénients attachés à un gouvernement si mixte et si compliqué, dans une si grande étendue de pays, ont subsisté, mais l'État aussi. La multiplicité des souverainetés sert à tenir la balance, jusqu'à ce qu'il se forme dans le sein de l'Allemagne une puissance assez grande pour engloutir les autres (1).

 

Ce vaste pays, après la paix de Vestphalie, répara insensiblement ses pertes : les campagnes furent cultivées, les villes rebâties ; ce furent là les plus grands événements des années suivantes dans un corps percé et déchiré de toutes parts, qui se rétablissait des blessures que lui-même s'était faites pendant trente années.

 

Quand on dit que l'Allemagne fut libre alors, il faut l'entendre des princes et des villes impériales ; car, pour les villes médiates, elles sont sujettes des grands vassaux auxquels elles appartiennent ; et les habitants des campagnes forment un état mitoyen entre l'esclave et le sujet, mais plus approchant de l'esclave, surtout en Souabe et en Bohême.

 

La Hongrie était comme l'Allemagne, respirant à peine après ses guerres intestines et les invasions si fréquentes des Turcs, ayant besoin d'être défendue, repeuplée, policée, mais toujours jalouse de son droit d'élire son souverain, et de conserver sous lui ses privilèges. Quand Ferdinand III fit élire en 1654, son fils Léopold, âgé de dix-sept ans (2), roi de Hongrie, on fit signer à sa sérénité (car le mot de majesté n'était pas donné par les Hongrois à qui n'était pas empereur ou roi des Romains), on lui fit signer, dis-je, une capitulation aussi restreignante que celle des empereurs : mais les seigneurs hongrois n'étaient pas aussi puissants que les princes d'Allemagne. Ils n'avaient point les Français et les Suédois pour garants de leurs privilèges : ils étaient plutôt opprimés que soutenus par les Ottomans : c'est pourquoi la Hongrie a été enfin entièrement soumise de nos jours, après de nouvelles guerres intestines (3).

 

L'empereur, après la paix de Vestphalie, se trouva paisible possesseur de la Bohême, devenue son patrimoine ; de la Hongrie qu'il regardait aussi comme un héritage, mais que les Hongrois regardaient comme un royaume électif ; et de toutes ses provinces jusqu'à l'extrémité du Tyrol. Il ne possédait aucun terrain en Italie.

 

Le nom de Saint-Empire romain subsistait toujours. Il était difficile de définir ce que c'était que l'Allemagne, et ce que c'était que cet empire. Charles-Quint avait bien prévu que si son fils Philippe II n'était pas sur le trône impérial, si la même tête ne portait pas les couronnes d'Espagne, d'Allemagne, de Naples, de Milan, il ne resterait guère que ce nom d'empire. En effet, quand le grand fief de Milan fut ; aussi bien que Naples, entre les mains de la branche espagnole, cette branche se trouva à la fois vassale titulaire de l'empire et du pape, en protégeant l'un, et en donnant des lois à l'autre. La Toscane, les principales ville d'Italie, s'affermirent dans leur ancienne indépendance des empereurs. Un césar qui n'avait pas en Italie un seul domaine, et qui n'était en Allemagne que le chef d'une république de princes et de villes, ne pouvait pas ordonner comme un Charlemagne et un Othon.

 

On voit, dans tout le cours de cette histoire, deux grands desseins soutenus pendant huit cents années : celui des papes d'empêcher les empereurs de régner dans Rome, et celui des seigneurs allemands de conserver et d'augmenter leurs privilèges.

 

Ce fut dans cet état que Ferdinand III laissa l'empire à sa mort en 1657, pendant que la maison d'Autriche espagnole soutenait encore contre la France cette longue guerre qui finit par le traité des Pyrénées, et par le mariage de l'infante Marie-Thérèse avec Louis XIV.

 

Tous ces événements sont si récents, si connus, écrits par tant d'historiens, qu'on ne répétera pas ici ce qu'on trouve partout ailleurs. On finira par se retracer une idée générale de l'empire depuis ce temps jusqu'à nos jours.

 

 

 

1 – Voltaire semble prévoir ici la grandeur de la Prusse. (G.A.)

 

2 – Il fut élu en 1655, et il n'avait que quinze ans. (G.A.)

 

3 – Voyez les chapitres V et VI du Précis du siècle de Louis XV. (G A.)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Commenter cet article