ANNALES DE L'EMPIRE - CATALOGUE DES EMPEREURS - LOUIS V - Partie 40-1
Photo de PAPAPOUSS
ANNALES DE L’EMPIRE.
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CATALOGUE DES EMPEREURS
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(Partie 1)
LOUIS V, ou LOUIS DE BAVIÈRE.
Empereur en 1314, mort en 1347.
Ses femmes :
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Béatrix de Glogau ;
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Marguerite, comtesse de Hollande.
Ses enfants :
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Louis-l’Ancien, margrave de Brandebourg ;
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Etienne-le-Bouclé, duc de Bavière ;
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Mechtilde, femme de Frédéric-le-Sévère, marquis de Misnie ;
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Elisabeth, mariée à Jean, duc de la Basse-Bavière ;
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Guillaume, comte de Hollande par sa mère, devenu furieux ;
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Albert, comte de Hollande ;
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Louis-le-Romain, marquis de Brandebourg ;
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Othon, marquis de Brandebourg.
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LOUIS V, ou LOUIS DE BAVIÈRE,
TRENTE-DEUXIÈME EMPEREUR
1315 – On ne compte pour empereur que Louis de Bavière, parce qu’il passe pour avoir été élu par le plus grand nombre, mais surtout parce que son rival Frédéric-le-Beau fut malheureux. Frédéric est sacré à Cologne par l’archevêque du lieu ; Louis, à Aix-la-Chapelle, par l’archevêque de Mayence ; et cet archevêque s’attribue ce privilège, malgré l’archevêque de Cologne, métropolitain d’Aix.
Ces deux sacres produisent nécessairement des guerres civiles ; et celui-ci d’autant plus que Louis de Bavière était oncle de Frédéric son rival. Quelques cantons suisses, déjà ligués, prennent les armes pour Louis de Bavière. Ils défendaient par là leur liberté contre l’Autriche.
Mémorable bataille de Morgarten. Si les Suisses avaient eu l’éloquence des Athéniens comme le courage, cette journée serait aussi célèbre que celle des Thermopyles. Seize cents Suisses des cantons d’Uri, de Schvitz, et d’Undervald, dissipent au passage des montagnes une armée formidable du duc d’Autriche. Le champ de bataille de Morgarten est le vrai berceau de leur liberté.
1316 – Jean XXII, pape à Avignon et à Lyon comme ses deux prédécesseurs, n’osant pas mettre le pied en Italie, et abandonnant Rome, déclare cependant que l’empire dépend de l’Église romaine, et cite à son tribunal des deux prétendants à l’empire. Il y a eu de plus grandes révolutions sur la terre, mais il n’y en a pas eu une plus singulière dans l’esprit humain que de voir les successeurs des Césars, créés sur les bords du Main, soumettre les droits qu’ils n’ont point sur Rome, à un pontife de Rome créé dans Avignon ; tandis que les rois d’Allemagne prétendent avoir le droit de donner les royaumes de l’Europe, que les papes prétendent nommer les empereurs et les rois, et que le peuple romain ne veut ni d’empereur ni de pape (1).
1317 – Il faut se représenter, dans ces temps-là, l’Italie aussi divisée que l’Allemagne. Les guelfes et les gibelins la déchirent toujours. Les guelfes, à la tête desquels est le roi de Naples Robert, tiennent pour Frédéric d’Autriche. Louis a pour lui les gibelins. Les principaux de cette faction sont les Viscontis à Milan. Cette maison établissait sa puissance sur le prétexte de soutenir celle des empereurs. La France voulait déjà se mêler des affaires du Milanais, mais faiblement.
1318 - Guerre entre Eric, roi de Danemark, et Valdemar, margrave de Brandebourg. Ce margrave soutient seul cette guerre sans l’aide d’aucun prince de l’empire. Quand un État faible tient tête à un plus fort, c’est qu’il est gouverné par un homme supérieur.
Le duc de Lavenbourg, dans cette courte querelle bientôt accommodée, est prisonnier du margrave, et se rachète pour seize mille marcs d’argent. On pourrait, par ces rançons, juger à peu près de la quantité d’espèces qui roulaient alors dans ces pays, où les princes avaient tout, et les peuples presque rien.
1319 – Les deux empereurs consentent à décider leur querelle plus importante par trente champions : usage des anciens temps que la chevalerie a renouvelé quelquefois.
Ce combat d’homme à homme, de quinze contre quinze, fut comme celui des héros grecs et troyens. Il ne décida rien et ne fut que le prélude de la bataille que les deux armées se livrèrent, après avoir été spectatrices du combat des trente. Louis est vainqueur dans cette bataille, mais sa victoire n’est point décisive.
1320 – 1321 – Philippe de Valois, neveu de Philippe-le-Bel, roi de France, accepte du pape Jean XXII la qualité de lieutenant-général de l’Église contre les gibelins en Italie. Philippe de Valois y va croyant tirer quelque parti de toutes ces divisions. Les Viscontis trouvent le secret de lui faire repasser les Alpes, tantôt en affamant sa petite armée, et tantôt en négociant.
L’Italie reste partagée en guelfes et en gibelins, sans prendre trop parti ni pour Frédéric d’Autriche, ni pour Louis de Bavière.
1322 – Il se donne une bataille décisive entre les deux empereurs, encore assez près de Muhldorf, le 28 septembre : le duc d’Autriche est pris avec le duc Henri, son frère, et Ferri, duc de Lorraine. Dès ce jour, il n’y eut plus qu’un empereur.
Léopold d’Autriche, frère des deux prisonniers, continue en vain la guerre.
Jean de Luxembourg, roi de Bohême, fatigué des contradictions qu’il éprouve dans son pays, envoie son fils en France pour l’y faire élever à la cour du roi Charles-le-Bel. Il fait un échange de sa couronne contre le palatinat du Rhin, avec l’empereur. Cela parait incroyable. Le possesseur du palatinat du Rhin était Rodolphe de Bavière, propre frère de l’empereur. Ce Rodolphe s’était jeté dans le parti de Frédéric d’Autriche contre son frère ; et l’empereur Louis de Bavière, qui venait de s’emparer du palatinat, gagne la Bohême à ce marché.
On ne peut pas toujours en tout pays acheter et vendre des hommes comme des bêtes. Toute la noblesse de Bohême se souleva contre cet accord, le déclara nul et injurieux ; et il demeura sans effet. Mais Rodolphe resta privé de son palatinat.
1323 – Un événement plus extraordinaire encore arrive dans le Brandebourg. Le margrave de ce pays, de l’ancienne maison d’Ascanie, quitte son margraviat pour aller en pèlerinage à la Terre-Sainte. Il laisse ses États à son frère, qui meurt vingt-quatre jours après le départ du pèlerin. Il y avait beaucoup de parents capables de succéder. L’ancienne maison de Saxe-Lavembourg et celle d’Anhalt avaient des droits. L’empereur, pour les accorder tous, et sans attendre de nouvelles du pèlerinage du véritable possesseur, voulut approprier à sa maison les États de Brandebourg, et il en investit son fils Louis.
L’empereur épouse en secondes noces la fille d’un comte de Hainaut et de Hollande, qui lui apporte pour dot ces deux provinces avec la Zélande et la Frise. Aucun État vers les Pays-Bas n’était regardé comme un fief masculin. Les empereurs songeaient à l’établissement de leurs maisons aussi bien qu’à l’empire.
L’empereur, ayant vaincu son concurrent, a le pape encore à vaincre. Jean XXII, des bords du Rhône, ne laissait pas d’influer beaucoup en Italie. Il animait la faction des guelfes contre les gibelins. Il déclare les Viscontis hérétiques ; et, comme l’empereur favorise les Viscontis, il déclare l’empereur fauteur d’hérétiques : et par une bulle du 9 octobre, il ordonne à Louis de Bavière de se désister dans trois mois de l’administration de l’empire, « pour avoir pris le titre de roi des Romains sans attendre que le pape ait examiné son élection. » L’empereur se contente de protester contre cette bulle, ne pouvant encore faire mieux.
1324 – Louis de Bavière soutient le reste de la guerre contre la maison d’Autriche, pendant qu’il était attaqué par le pape.
Jean XXII, par une nouvelle bulle du 15 juillet, déclare l’empereur contumax et le prive de tout droit à l’empire, s’il ne comparaît devant sa sainteté avant le 1er octobre. Louis de Bavière donne un rescrit par lequel il invite l’Église à déposer le pape, et appelle au futur concile.
Marcile de Padoue, et Jean de Gent (2), franciscain, viennent offrir leur plume à l’empereur contre le pape, et prétendent prouver que le saint père est hérétique (3). Il avait en effet des opinions singulières qu’il fut obligé de rétracter.
1325 – Quand on voit ainsi les papes, n’ayant pas une ville à eux, parler aux empereurs en maîtres, on devine aisément qu’ils ne font que mettre à profit les préjugés des peuples et les intérêts des princes. La maison d’Autriche avait encore un parti en Allemagne, quoique le chef fût en prison ; et ce n’est qu’à la tête d’un parti qu’une bulle peut être dangereuse.
L’Alsace et le pays Messin, par exemple, tenaient pour cette maison. L’empereur fit une alliance avec le duc de Lorraine son prisonnier, avec l’archevêque de Trèves et le comte de Bar, pour prendre Metz. Metz fut prise en effet, et paya environ quarante mille livres tournois à ses vainqueurs.
Frédéric d’Autriche étant toujours en prison, le pape veut faire donner l’empire à Charles-le-Bel, roi de France. Il eût été naturel qu’un pape eût fait nommer un empereur en Italie. C’était ainsi qu’on en avait usé envers Charlemagne ; mais le long usage prévalait, et il fallait que l’Allemagne fît l’élection. On gagne en faveur du roi de France quelques princes d’Allemagne qui donnèrent rendez-vous au roi à Bar-sur-Aube. Le roi de France s’y transporte, et n’y trouve que Léopold d’Autriche.
Le roi de France retourne chez lui affligé de sa fausse démarche. Léopold d’Autriche, sans ressource, renvoie à Louis de Bavière la lance, l’épée, et la couronne de Charlemagne. L’opinion publique attachait encore à ces symboles un droit qui confirmait celui de l’élection.
Louis de Bavière élargit enfin son prisonnier, et lui fait signer une renonciation à l’empire pour le temps de la vie de Louis. On prétend que Frédéric d’Autriche conserva toujours le titre de roi des Romains.
1326 – Léopold d’Autriche meurt. Il faut bien observer que, malgré les lois, l’usage constant était que les grands fiefs se partageassent encore entre les héritiers. Trente enfants auraient partagé le même État en trente parts, et auraient tous porté le même titre. Tous les agnats de Rodolphe de Habsbourg portaient le nom de ducs d’Autriche.
Léopold avait eu pour son partage l’Alsace, la Suisse, la Souabe et le Brisgau. Ses frères se disputent cet héritage ; ils choisissent le roi de Bohême, Jean de Luxembourg, pour austrègue, c’est-à-dire pour arbitre.
1327 – Louis de Bavière va enfin en Italie se mettre à la tête des gibelins, et le pape anime de loin les guelfes contre lui. L’ancienne querelle de l’empire et du pontificat se renouvelle avec fureur.
Louis marche avec une petite armée à Milan ; il est accompagné d’une foule de moines franciscains. Ces moines étaient excommuniés par le pape Jean XXII, pour avoir soutenu que leur capuchon devait être plus pointu, et que leur boire et leur manger ne leur appartenaient pas en propre.
Ces mêmes franciscains traitaient le pape d’hérétique et de damné, au sujet de son opinion sur la vision béatifique.
L’empereur est couronné roi de Lombardie à Milan, non par l’archevêque, qui le refuse, mais par l’évêque d’Arezzo.
Dès que ce prince se prépare à aller à Rome, la faction des guelfes presse le pape d’y revenir. Le pape n’ose y aller, tant il craint le parti gibelin et l’empereur.
Les Pisans offrent à l’empereur soixante mille livres pour qu’il ne passe point par leur ville dans son voyage à Rome. Louis de Bavière assiège Pise, et se fait donner au bout de trois jours trente autres mille livres pour y séjourner deux mois. Les historiens disent que ce sont des livres d’or, mais cette somme ferait six millions d’écus d’Allemagne, ce qu’il est plus aisé de coucher par écrit que de payer.
Nouvelle bulle de Jean XXII, à Avignon, le 23 octobre : « Nous réprouvons ledit Louis comme hérétique. Nous dépouillons ledit Louis de tous ses biens meubles et immeubles, du palatinat du Rhin, de tout droit à l’empire ; défendons de fournir audit Louis du blé, du linge, du vin, du bois, etc. »
L’hérésie de l’empereur était d’aller à Rome.
1328 – Louis de Bavière est couronné dans Rome sans prêter le serment de fidélité. Le célèbre Castruccio Castracani, tyran de Lucques, créé d’abord par l’empereur comte du palais de Latran et gouverneur de Rome, le conduit à Saint-Pierre avec les quatre premiers barons romains, Colonna, Orsini, Savelli, Conti.
Louis est sacré par un évêque de Venise, assisté d’un évêque d’Aleria, tous deux excommuniés par le pape. Il y eut peu de troubles dans Rome à ce couronnement.
Le 18 avril l’empereur tient une assemblée générale. Il y préside revêtu du manteau impérial, la couronne en tête, et le sceptre à la main. Un moine augustin, Nicolas Fabriano, y accuse le pape, et demande « s’il y a quelqu’un qui veuille défendre le prêtre de Cahors, qui se fait nommer le pape Jean. » L’ordre des augustins devait produire un jour un homme plus dangereux pour les papes (4).
On lut ensuite la sentence par laquelle l’empereur déposait le pape. « Nous voulons, dit-il, suivre l’exemple d’Othon Ier, qui, avec le clergé et le peuple de Rome, déposa le pape Jean XII, etc, Nous déposons de l’évêché de Rome Jacques de Cahors, convaincu d’hérésie et de lèse-majesté, etc. »
Le jeune Colonna, attaché en secret au pape, publie son opposition dans Rome, l’affiche à la porte de l’église, et s’enfuit.
Enfin Louis prononce un arrêt de mort contre le pape, et même contre le roi de Naples, qui avait accepté du pape le vicariat de l’empire en Italie. Il les condamne tous deux à être brûlés vifs : la colère outrée va quelquefois jusqu’au ridicule. Il crée pape le 22 mai, de son autorité, Pierre Reinalucci, de la ville de Corbiero ou Corbario, dominicain, et le fait agréer par le peuple romain. Il l’investit par l’anneau, au lieu de lui baiser les pieds, et se fait de nouveau couronner par lui.
Ce qui était arrivé à tous les empereurs depuis les Othons, arrive à Louis de Bavière. Les Romains conspirent contre lui. Le roi de Naples arrive avec des troupes aux portes de Rome. L’empereur et son pape sont obligés de s’enfuir.
1329 – L’empereur, réfugié à Pise, est forcé d’en sortir. Il retourne sans armée en Bavière avec deux franciscains qui écrivaient contre le pape, Michel de Césène et Guillaume Okam. L’anti-pape Pierre de Corbiero se cache de ville en ville.
Le roi de Naples Robert fait rentrer sous la domination, ou plutôt sous la protection papale, Rome et plusieurs villes d’Italie.
Les Viscontis, toujours puissants dans Milan, et qui ne pouvaient plus être défendus par l’empereur, l’abandonnent, ils se rangent du parti de Jean XXII, qui, toujours réfugié dans Avignon, semble donner des lois à l’Europe, et en donne en effet, quand ces lois sont exécutées par les forts contre les faibles.
Louis de Bavière, étant à Pavie, fait un traité mémorable avec son neveu Robert, fils de l’électeur palatin Rodolphe, mort en exil en Angleterre, et tige de toute la branche palatine. Par ce traité il partage avec son neveu les terres de la maison palatine ; il lui rend le palatinat du Rhin et le Haut-Palatinat, et il garde pour lui la Bavière. Il règle qu’après l’extinction d’une des deux maisons palatine et de Bavière, qui ont une souche commune, la survivante entrera en possession de toutes les terres et dignités de l’autre, et que cependant le suffrage dans les élections des empereurs appartiendra alternativement aux deux maisons. Le droit de suffrage, accordé ainsi à la maison de Bavière, ne dura pas longtemps. La division que cet accord mit entre les deux maisons fut longue.
1330 – Le pape frère Pierre de Corbiero, caché dans un château d’Italie, entouré de soldats envoyés par l’archevêque de Pise, demande grâce à Jean XXII, qui lui promet la vie sauve, et trois mille florins d’or de pension pour son entretien.
Ce pape frère Pierre va, la corde au cou, se présenter devant le pape, qui le fait enfermer dans une prison, où il mourut au bout de trois ans. On ne sait s’il avait stipulé ou non qu’il ne serait pas enfermé.
Christophe, roi de Danemark, est déposé par les états du pays. Il a recours à l’empire. Les ducs de Saxe, de Mecklenbourg, et de Poméranie, sont nommés par l’empereur pour juger entre le prince et les sujets. C’était faire revivre les droits éteints de l’empire sur le Danemark. Mais Gérard, comte de Holstein, régent du royaume, ne voulut pas reconnaître cette commission. Le roi Christophe, avec les forces de ces princes et du margrave de Brandebourg, chasse le régent, et remonte sur le trône.
Louis de Bavière veut se réconcilier avec le pape, et lui envoie une ambassade. Jean XXII, pour réponse, mande au roi de Bohême qu’il ait à faire déposer l’empereur.
1331 – Le roi de Bohême Jean (5), au lieu d’obéir au pape, se lie avec l’empereur, et marche en Italie avec une armée, en qualité de vicaire de l’empire. Ayant réduit quelques villes, comme Crémone, Parme, Pavie, Modène, il est tenté de les garder pour lui, et dans cette idée il s’unit secrètement avec le pape. Les guelfes et les gibelins alarmés se réunissent contre Jean XXII et contre Jean de Bohême.
L’empereur, craignant un vicaire si dangereux, excite contre lui Othon d’Autriche, frère de ce même Frédéric, son rival pour l’empire ; tant les intérêts changent en peu de temps !
Il suscite le marquis de Misnie, et Charobert, roi de Hongrie, et jusqu’à la Pologne. Il est donc prouvé qu’alors il pouvait bien peu par lui-même. L’empire fut rarement plus faible : mais l’Allemagne dans tous ces troubles est toujours respectée des étrangers, toujours hors d’atteinte.
Le roi de Bohême, revenu en Allemagne, bat tous ses ennemis l’un après l’autre. Il laisse son fils Charles vicaire en Italie malgré Louis de Bavière, et, pour lui, il va jusqu’en Pologne. Ce roi de Bohême Jean était alors le véritable empereur par son pouvoir.
Les guelfes et les gibelins, malgré leur antipathie, se liguent contre le prince Charles de Bohême en Italie. Le roi son père, vainqueur en Allemagne, passe les Alpes pour secourir son fils. Il arrive lorsque ce jeune prince vient de remporter une victoire signalée le 25 novembre, vers le Tyrol.
Il rentre avec son fils triomphant dans Prague, et lui donne la marche, ou marquisat, ou margraviat de Moravie, en lui faisant prêter un hommage-lige.
1332 – Le pape continue d’employer la religion dans l’intrigue. Othon, duc d’Autriche, gagné par lui, quitte le parti de l’empereur ; et, gagné par des moines, il soumet ses États au saint-siège. Il se déclare vassal de Rome. Quel temps où une telle action ne fut ni abhorrée ni punie ! Peu de gens savent que l’Autriche a été donnée aux papes, ainsi que l’Angleterre ; c’est l’effet de la superstition et de la barbare stupidité dans laquelle l’Europe était plongée.
Ce temps était celui de l’anarchie. Le roi de Bohême se faisait craindre de l’empereur, et songeait à établir son crédit dans l’Allemagne. Lui et son fils avaient gagné des batailles en Italie, mais des batailles inutiles. Toute l’Italie était armée alors, gibelins contre guelfes, les uns et les autres contre les Allemands, toutes les villes s’accordaient dans leur haine contre l’Allemagne, et toutes se faisaient la guerre, au lieu de s’entendre pour briser à jamais leurs chaînes.
Pendant ces troubles l’ordre Teutonique est toujours une milice de conquérants vers la Prusse. Les Polonais leur prennent quelques villes. Ce même Jean, roi de Bohême, marche à leur secours. Il va jusqu’à Cracovie. Il apaise des troubles en Silésie. Ce prince, maître de la Bohême, de la Silésie, de la Moravie, faisait alors tout trembler.
Strasbourg, Fribourg en Brisgau, et Bâle, s’unissent dans ces temps de trouble contre les tyrans voisins. Plusieurs villes entrent dans cette association. Le voisinage de quatre cantons suisses, devenus libres, inspire à ces peuples des sentiments de liberté.
1 – Admirable résumé de toute cette époque. (G.A.)
2 – Ou plutôt, Jean de Gondouin. (G.A.)
3 – Le livre de Marcile ou Marsile est intitulé le Défenseur de la paix.(G.A.)
4 – Luther. (G.A.)
5 – « C’était un prince bien singulier que ce roi de Bohême, dit Philippe Levas ; il ne paraissait que le plus rarement possible dans son royaume ; il chevauchait sur toutes les grandes routes de l’Europe pour courir les fêtes et les tournois. Souvent, comme plus tard Maximilien, on ne savait où le trouver. » (G.A.)