ANNALES DE L'EMPIRE - CATALOGUE DES EMPEREURS - LOUIS V - Partie 40-2
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(Partie 2)
LOUIS V, ou LOUIS DE BAVIÈRE.
Othon d’Autriche assiège Colmar. L’empereur soutient cette ville contre le duc d’Autriche. Le comte de Virtemberg fournit des troupes à l’empereur ; le roi de Bohême lui en donne. On voit de part et d’autre des armées de trente mille hommes, mais ce n’est jamais que pour une campagne. L’empereur n’est alors que comme un autre prince d’Allemagne qui a ses amis comme ses ennemis. Qu’eût-ce été, si tout eût été réuni pour subjuguer en effet toute l’Italie !
Mais l’Allemagne n’est occupée que de ses querelles intestines. Le duc d’Autriche se raccommode avec l’empereur. La face des affaires change continuellement, et la misère des peuples continue.
1333 – On a vu Jean, roi de Bohême, combattre en Italie pour l’empereur ; maintenant le voici armé pour le pape. On a vu Robert, roi de Naples, défenseur du pape ; il est à présent son ennemi. Ce même roi de Bohême, qui venait d’assiéger Cracovie, va en Italie, de concert avec le roi de France pour y établir le pouvoir du pape. C’est ainsi que l’ambition promène les hommes.
Qu’arrive-t-il ? Il donne bataille près de Ferrare au roi Robert de Naples, aux Viscontis, aux L’Escales, princes de Vérone, réunis. Il est défait deux fois. Il retourne en Allemagne après avoir perdu ses troupes, son argent, et sa gloire.
Troubles et guerres en Brabant au sujet de la propriété de Malines, que le duc de Brabant et le comte de Flandre se disputent. Le roi de Bohême s’en mêle encore. On s’accommode. Malines demeure à la Flandre.
1334 – Cependant l’empereur Louis de Bavière reste tranquille dans Munich et semble ne plus prendre part à rien.
Le pape Jean XXII, plus remuant, sollicite toujours les princes allemands à se soulever contre Louis de Bavière ; et les franciscains du parti de Michel de Césène, condamnés par le pape, pressent l’empereur d’assembler un concile pour faire déclarer le pape hérétique, et pour le déposer.
La mort devait venger l’empereur plus promptement qu’un concile. Jean XXII meurt à quatre-vingt-dix ans, le 4 décembre, dans Avignon.
Villani (1) prétend qu’on trouva dans son trésor la valeur de vingt-cinq millions de florins d’or, dont dix-huit millions monnayés. « Je le sais, dit Villani, de mon frère Rommone, qui était marchand du pape. » On peut dire hardiment à Villani que son frère le marchand était un grand exagérateur. Cela ferait environ deux cents millions d’écus d’Allemagne d’aujourd’hui. On eût alors, avec une pareille somme, acheté toute l’Italie, et Jean XXII n’y mit jamais le pied. Il eut beau ajouter une troisième couronne à la tiare pontificale, il n'en fut pas plus puissant. Il est vrai qu’il vendait beaucoup de bénéfices, qu’il inventa les annates, les réserves, les expectatives, mit à prix les dispenses et les absolutions. Tout cela est une ressource plus faible qu’on en pense, et a produit beaucoup plus de scandale que d’argent ; les exacteurs de pareils tributs n’en font d’ordinaire aux maîtres qu’une part fort légère.
Ce qui est digne de remarque, c’est qu’il eut du scrupule en mourant sur la manière dont il avait dit qu’on voyait Dieu dans le ciel, et qu’il n’en eut point sur les trésors qu’il avait amassés sur la terre.
1335 – Le vieux roi Jean de Luxembourg épouse une jeune princesse de la maison de France, de la branche de Bourbon ; et, par son contrat de mariage, il donne le duché de Luxembourg au fils qui naîtra de cette alliance. La plupart des clauses des contrats sont des semences de guerre.
Voici un autre mariage qui produit une guerre dès qu’il est consommé. Le vieux roi de Bohême avait un second fils, Jean de Luxembourg, duc de Carinthie. Ce jeune prince prenait le titre de duc de Carinthie, parce que sa femme avait des prétentions sur ce duché. Cette princesse de Carinthie, qu’on appelait Marguerite-la-grande-bouche prétend que son mari Jean de Luxembourg est impuissant. Elle trouve un évêque de Freisengen qui casse son mariage sans formalités ; elle se donne au marquis de Brandebourg.
L’intérêt a autant de part que l’amour dans cet adultère. Le margrave de Brandebourg était le fils de l’empereur Louis de Bavière. Marguerite-la-grande-bouche apportait le Tyrol en dot, et des droits sur la Carinthie : ainsi l’empereur ne fit aucune difficulté d’ôter cette princesse au prince de Bohême, et de la donner à son fils de Brandebourg. Ce mariage excite une guerre qui dure toute l’année ; et après beaucoup de sang répandu, on en vient à un accommodement singulier : c’est que le jeune Jean de Luxembourg avoue que sa femme a raison de l’avoir quitté, et approuve son mariage avec le Brandebourgeois, fils de l’empereur.
Petite guerre des Strasbourgeois contre les seigneurs des environs. Strasbourg agit en vraie république indépendante, à cela près que son évêque se mettait souvent à la tête des troupes, pour faire dépendre les citoyens de l’évêque.
1336 - 1337 – On commence à négocier beaucoup en Allemagne pour la fameuse guerre que le roi d’Angleterre Edouard III méditait contre Philippe de Valois. Il s’agissait de savoir à qui la France appartiendrait.
Il est vrai que ce pays, beaucoup plus resserré qu’il ne l’est aujourd’hui, affaibli par les divisions du gouvernement féodal, et n’ayant point de grand commerce maritime, n’était pas le plus grand théâtre de l’Europe, mais c’était toujours un objet très important.
Philippe de Valois d’un côté, et Edouard de l’autre, tâchent d’engager les princes d’Allemagne dans leur querelle ; mais il paraît que l’Anglais fit mieux sa partie que le Français. Philippe de Valois a pour lui le roi de Bohême, et Édouard a tous les princes voisins de la France. Il a surtout pour lui l’empereur ; il n’en obtient à la vérité que des lettres patentes, mais ces lettres patentes sont de vicaire de l’empire. Le fier Édouard consent volontiers à exercer ce vicariat, pour tâcher de faire déclarer guerre de l’empire la guerre contre la France. Ses provisions portent qu’il pourra faire battre monnaie dans toutes les terres de l’empire : rien ne prouve mieux ce respect secret qu’on avait dans toute l’Europe pour la dignité impériale.
Pendant qu’Édouard s’appuie des forces temporelles de l’Allemagne, Philippe de Valois cherche à faire agir les forces spirituelles du pape : elles étaient alors bien peu de chose.
Le pape Benoît XII, encore dans Avignon comme ses prédécesseurs, était dépendant du roi de France.
Il faut savoir que l’empereur n’ayant point été absous par le pape, demeurait toujours excommunié, et privé de ses droits dans l’opinion vulgaire de ces temps-là.
Philippe de Valois, qui peut tout sur un pape d’Avignon, force Benoît XII à différer l’absolution de l’empereur ; Ainsi l’autorité d’un prince dirige souvent le ministère pontifical, et ce ministère, à son tour, suscite quelques princes. Il y a un Henri, duc de Bavière, parent de Louis l’empereur, prenant toujours selon l’usage, ce titre de duc sans avoir le duché, mais possédant une partie de la Bavière inférieure. Ce Henri demande pardon au pape par ses députés, d’avoir reconnu son parent empereur. Cette bassesse ne produit dans l’empire aucune des révolutions qu’on en attendait.
1338 – Le pape Benoît XII avoue que c’est Philippe de Valois, roi de France, qui l’empêche de réconcilier à l’Église l’empereur Louis. Voilà comme presque tous les papes n’ont été que les instruments d’une force étrangère. Ils ressemblaient souvent aux dieux des Indiens, à qui on demande de la pluie à genoux, et qu’on traîne dans la rivière quand on n’est pas exaucé.
Grande assemblée des princes de l’empire à Rentz sur le Rhin. On y déclare ce qui ne devrait pas avoir besoin d’être déclaré, « que celui qui a été élu par le plus grand nombre est véritable empereur ; que la confirmation du pape est absolument inutile ; que le pape a encore moins le droit de déposer l’empereur ; et que l’opinion contraire est un crime de lèse-majesté. »
Cette déclaration passe en loi perpétuelle le 8 auguste à Francfort.
Albert d’Autriche, surnommé d’abord le Contrefait, et qui ensuite changea ce surnom en celui de Sage, l’un des frères de ce Frédéric d’Autriche qui avait disputé l’empire, et le seul de tous ses frères par qui la race autrichienne s’est perpétuée, attaque encore en vain les Suisses. Ces peuples, qui n’avaient de bien que leur liberté, la défendent toujours avec courage. Albert est malheureux dans son entreprise, et mérite le nom de Sage en l’abandonnant.
1339 – L’empereur Louis ne pense plus qu’à rester tranquille dans Munich, pendant qu’Édouard, roi d’Angleterre, son vicaire, traîne cinquante princes de l’empire à la guerre contre Philippe de Valois, et va conquérir une partie de la France. Mais avant la fin de la campagne, tous ces princes allemands se retirent chez eux, et Édouard, assisté des Flamands, poursuit ses vues ambitieuses.
1340 – L’empereur Louis, qui s’était repenti d’avoir donné le vicariat d’Italie à un roi de Bohême guerrier et puissant, se repent d’avoir donné le vicariat d’Allemagne à un roi plus puissant et plus guerrier. L’empereur était le pensionnaire du vicaire ; et le fier Anglais se conduisant en maître, et payant mal la pension, l’empereur lui ôte ce vicariat, devenu un titre inutile.
L’empereur négocie avec Philippe de Valois. Pendant ce temps l’autorité impériale est absolument anéantie en Italie, malgré la loi perpétuelle de Francfort.
Le pape, de son autorité privée, accorde aux deux frères Visconti le gouvernement de Milan, qu’ils avaient sans lui, et les fait vicaires de l’Église romaine ; ils avaient été auparavant vicaires impériaux.
Le roi Jean de Bohême va à Montpellier pour se guérir, par la salubrité de l’air, d’un mal qui attaquait ses yeux. Il n’en perd pas moins la vue, et il est connu depuis sous le nom de Jean-l’Aveugle. Il fait son testament, donne la Bohême et la Silésie à Charles, depuis empereur ; à Jean la Moravie ; à Venceslas, né de Béatrix de Bourbon, le Luxembourg et les terres qu’il a en France du chef de sa femme.
L’empereur cependant jouit de la gloire de décider en arbitre des querelles de la maison de Danemark. Le duc de Slesvick-Hostein, par cet accommodement, renonce aux prétentions sur le royaume de Danemark ; il marie sa sœur au roi Valdemar III, et reste en possession du Jutland.
1341 – 1342 – 1343 – Louis de Bavière semble ne plus penser à l’Italie, et donne des tournois dans Munich.
Clément VI, nouveau pape, né Français et résidant à Avignon, est sollicité de revenir enfin rétablir en Italie le pontificat, et d’y achever d’anéantir l’autorité impériale. Il suit les procédures de Jean XXII contre Louis. Il sollicite l’archevêque de Trèves de faire élire en Allemagne un nouvel empereur. Il soulève en secret contre lui ce roi de Bohême Jean-L’Aveugle, toujours remuant, le duc de Saxe, et Albert d’Autriche.
L’empereur Louis, qui a toujours à craindre qu’un défaut d’absolution n’arme contre lui les princes de l’empire, flatte le pape qu’il déteste, et lui écrit « qu’il remet à la disposition de sa sainteté sa personne, son État ; sa liberté, et ses titres. » Quelles expressions pour un empereur qui avait condamné Jean XXII à être brûlé vif !
Les princes assemblés à Francfort sont moins complaisants, et maintiennent les droits de l’empire.
1344 – 1345 – Jean l’Aveugle semble plus ambitieux depuis qu’il a perdu la vue. D’un côté il veut frayer le chemin de l’empire à son fils Charles ; de l’autre il fait la guerre à Casimir, roi de Pologne, pour la mouvance du duché de Schveidnitz, dans la Silésie.
C’est l’effet ordinaire de l’établissement féodal. Le duc de Schveidnitz avait fait hommage au roi de Pologne : Jean de Bohême réclame l’homme en qualité de duc de Silésie. L’empereur soutient en secret les intérêts du Polonais ; et malgré l’empereur, la guerre finit malheureusement pour la maison de Luxembourg. Le prince Charles de Luxembourg, marquis de Moravie, fils de Jean-l’Aveugle, devenu veuf, épouse la nièce du duc de Schveidnitz, qui fait hommage à la Bohême ; et c’est une nouvelle confirmation que la Silésie est une annexe de la couronne de Bohême.
L’impératrice Marguerite, , femme de l’empereur Louis de Bavière, et sœur de Jean de Brabant, se trouve héritière de la Hollande, de la Zélande, et de la Frise : elle recueille cette succession. L’empereur, son mari, devait en être beaucoup plus puissant : il ne l’est pourtant pas.
En ce temps, Robert, comte palatin, fonde l’université de Heidelberg sur le modèle de celle de Paris.
1346 – Jean-l’Aveugle et son fils Charles font un grand parti dans l’empire au nom du pape.
Les factions impériales et papales troublent enfin l’Allemagne, comme les guelfes et les gibelins avaient troublé l’Italie. Clément VI en profite. Il publie contre Louis de Bavière une bulle le 13 avril. « Que la colère de Dieu, dit-il, et celle de saint Pierre et saint Paul, tombent sur lui dans ce monde-ci et dans l’autre ; que la terre l’engloutisse tout vivant ; que sa mémoire périsse ; que tous les éléments lui soient contraires ; que ses enfants tombent dans les mains de ses ennemis aux yeux de leur père. »
Il n’y avait point de protocole pour ces bulles, elles dépendaient du caprice du dataire qui les expédiait. Le caprice en cette occasion est un peu violent.
Il y avait alors deux archevêques de Mayence, l’un déposé en vain par le pape, l’autre élu à l’instigation du pape par une partie des chanoines. C’est à ce dernier que Clément VI adresse une autre bulle pour élire un empereur.
Le roi de Bohême, Jean l’Aveugle, et son fils Charles, marquis de Moravie, qui fut depuis l’empereur Charles IV, vont à Avignon marchander l’empire avec le pape Clément VI. Charles s’engage à casser toutes les ordonnances de Louis de Bavière, à reconnaître que le comté d’Avignon appartenait de droit au saint-siège, ainsi que Ferrare et les autres terres (il entendait celles de la comtesse Mathilde), les royaumes de Sicile, de Sardaigne, et de Corse, et surtout Rome ; que, si l’empereur va à Rome se faire couronner, il en sortira le même jour, qu’il n’y reviendra jamais sans une permission expresse du pape, etc.
Après ces promesses, Clément VI recommande aux archevêques de Cologne et de Trèves, et au nouvel archevêque de Mayence, d’élire empereur le marquis de Moravie. Ces trois prélats avec Jean l’Aveugle s’assemblent à Rentz, près de Coblentz, le premier juillet. Ils élisent Charles de Luxembourg, marquis de Moravie, qu’on connaît sous le nom de Charles IV.
Le jésuite Maimbourg assure positivement qu’il acheta le suffrage de l’archevêque de Cologne huit mille marcs d’argent ; et il ajoute que le duc de Saxe, comme plus riche, « fit meilleur marché de sa voix, se contentant de deux mille marcs. »
1 – Ce que le jésuite Maimbourg assure n’est rapporté que sur un ouï-dire par Cuspinien.
2 – Comment peut-on être instruit de ces marchés secrets ?
3 – Voilà un beau désintéressement dans le duc de Saxe, de ne se déshonorer que pour deux mille marcs, parce qu’il est riche ! c’est précisément parce qu’on est riche qu’on se vend plus cher, quand on fait tant que de se vendre.
4 – Le sens commun permet-il de croire que Charles IV ait acheté chèrement un droit très incertain et une guerre civile certaine ?
Quoique l’Allemagne fût partagée, le parti de Louis de Bavière est tellement le plus fort que le nouvel empereur et son vieux père, au lieu de soutenir leurs droits en Allemagne, vont se battre en France contre Édouard d’Angleterre pour Philippe de Valois.
Le vieux roi Jean de Bohême est tué à la fameuse bataille de Crécy, le 25 ou 26 auguste, gagnée par les Anglais. Charles s’en retourne en Bohême sans troupes et sans argent : il est le premier roi de Bohême qui se soit fait couronner par l’archevêque de Prague ; et c’est pour ce couronnement que l’évêché de Prague, jusque-là suffragant de Mayence, fut érigé en archevêché.
1347 – Alors Louis de Bavière et l’anti-empereur Charles se font la guerre. Charles de Luxembourg est battu partout.
Il se passait alors une scène singulière en Italie. Nicolas Rienzi, notaire à Rome, homme éloquent, hardi et persuasif, voyant Rome abandonnée des empereurs et des papes qui n’osaient y retourner, s’était fait tribun du peuple. Il régna quelques mois d’une manière absolue ; mais le peuple, qui avait élevé cette idole, la détruisit. Rome depuis longtemps ne semblait plus faite pour des tribuns : mais on voit toujours cet ancien amour de la liberté qui produit des secousses et qui se débat dans ses chaînes. Rienzi s’intitulait, Chevalier candidat du Saint-Esprit, sévère et clément libérateur de Rome, zélateur de l’Italie, amateur de l’univers, et tribun auguste. Ces beaux titres prouvent qu’il était un enthousiaste, et que par conséquent il pouvait séduire la vile populace, mais qu’il était indigne de commander à des hommes d’esprit. Il voulait en vain imiter Gracchus, comme Crescence avait voulu vainement imiter Brutus.
Il est certain que Rome alors était une république, mais faible, n’ayant de l’ancienne république romaine que les factions. Son ancien nom faisait toute sa gloire.
Il est difficile de dire s’il y eut jamais un temps plus malheureux depuis les inondations des Barbares au cinquième siècle. Les papes étaient chassés de Rome ; la guerre civile désolait toute l’Allemagne ; les guelfes et les gibelins déchiraient l’Italie ; la reine de Naples, Jeanne, après avoir étranglé son mari, fut étranglée elle-même ; Edouard III ruinait la France où il voulait régner ; et enfin la peste, comme on le verra, fit périr une partie des hommes échappés au glaive et à la misère.
Louis de Bavière meurt d’apoplexie le 21 octobre auprès d’Augsbourg. Des auteurs disent qu’il fut empoisonné par une duchesse d’Autriche. Le prêtre André et d’autres prétendent que cette duchesse d’Autriche est la même qui avait quitté son mari pour le fils de l’empereur. Il fallait que les historiens de ce temps-là eussent une grande haine pour les princes : ils les font presque tous empoisonner. Un Hocsemius s’exprime ainsi : « L’empereur bavarois, le damné, meurt d’un poison donné par la duchesse d’Ostrogothie ou d’Autriche, femme du duc Albert. » Struvius dit qu’on prétend qu’il fut empoisonné par une duchesse d’Autriche nommée Anne. Voilà donc trois prétendues duchesses d’Autriche différentes accusées de cette mort, sans la moindre apparence. C’est ainsi qu’on écrivait autrefois l’histoire. On croirait en lisant le P. Barre (2) que Louis de Bavière fut empoisonné par une quatrième princesse nommée Maultasch : mais c’est qu’en allemand maultasch signifie grande bouche ou bouche difforme ; et cette princesse est précisément cette Marguerite, bru de l’empereur. Il s’intitulait Louis IV, et non pas Louis V, parce qu’il ne comptait pas Louis IV, surnommé l’Enfant, parmi les empereurs.
Ce fut lui qui donna lieu à l’invention de l’aigle à deux têtes : il y avait deux aigles dans ses sceaux ; et les deux têtes d’aigle qu’on a presque toujours conservées depuis, supposent aussi deux corps, dont l’un est caché par l’autre. Le caprice des ouvriers a décidé de presque toutes les armoiries des souverains.
1 – Auteur de l’Histoire florentine. (G.A.)
2 – Histoire générale d’Allemagne, 1748. (G.A.)