ANNALES DE L'EMPIRE - CATALOGUE DES EMPEREURS - FRÉDÉRIC Ier - Partie 30-2
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ANNALES DE L’EMPIRE.
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CATALOGUE DES EMPEREURS
(Partie 2)
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1168 – Alexandre III trouve le secret de mettre à la fois dans son parti Emmanuel, empereur des Grecs et Guillaume, roi de Sicile, ennemi naturel des Grecs : tant on croyait l’intérêt commun de se réunir contre Barberousse.
En effet ces deux puissances envoient au pape de l’argent et quelques troupes. L’empereur, à la tête d’une armée très diminuée, voit les Milanais relever leurs murailles sous ses yeux, et presque toute la Lombardie conjurée contre lui. Il se retire vers le comté de Maurienne. Les Milanais, enhardis, le poursuivent dans les montagnes. Il échappe à grande peine, et se retire en Alsace, tandis que le pape l’excommunie.
L’Italie respire par sa retraite. Les Milanais se fortifient. Ils bâtissent au pied des Alpes la ville d’Alexandrie à l’honneur du pape. C’est Alexandrie de la Paille, ainsi nommée à cause de ses maisonnettes couvertes de chaume, qui la distinguent d’Alexandrie fondée par le véritable Alexandre (1).
En cette année Lunebourg commence à devenir une ville.
L’évêque de Vurtzbourg obtient la juridiction civile dans le duché de Franconie. C’est ce qui fait que ses successeurs ont eu la direction du cercle de ce nom.
Guelfe, cousin germain du fameux Henri-le-Lion, duc de Saxe et de Bavière, lègue en mourant à l’empereur le duché de Spolette, le marquisat de Toscane, avec ses droits sur la Sardaigne, pays réclamé par tant de compétiteurs, abandonné à lui-même et à ses baillis, dont l’un se disait roi.
1169 – Frédéric fait élire Henri, son fils aîné, roi des Romains, tandis qu’il est prêt à perdre pour jamais Rome et l’Italie.
Quelques mois après il fait élire son second fils Frédéric, duc d’Allemagne, et lui assure le duché de Souabe : les auteurs étrangers ont cru que Frédéric avait donné l’Allemagne entière à son fils ; mais ce n’était que l’ancienne Allemagne proprement dite. Il n’y avait d’autre roi de la Germanie, nommée Allemagne, que l’empereur.
1170 – Frédéric n’est plus reconnaissable. Il négocie avec le pape au lieu d’aller combattre. Ses armées et son trésor étaient donc diminués.
Les Danois prennent Stetin. Henri-le-Lion, au lieu d’aider l’empereur à recouvrer l’Italie, se croise avec ses chevaliers saxons pour aller se battre dans la Palestine.
1171 – Henri-le-Lion, trouvant une trêve établie en Asie, s’en retourne par l’Égypte. Le soudan voulut étonner l’Europe par sa magnificence et sa générosité : il accabla de présents le duc de Saxe et de Bavière, et entre autres il lui donna quinze cents chevaux arabes.
1172 – L’empereur assemble enfin une diète à Vorms, et demande du secours à l’Allemagne pour ranger l’Italie sous sa puissance.
Il commence par envoyer une petite armée commandée par ce même archevêque de Mayence qui avait battu les Romains.
Les villes de Lombardie étaient confédérées, mais jalouses les unes des autres. Lucques était ennemie mortelle de Pise ; Gênes l’était de Pise et de Florence ; et ce sont ces divisions qui ont perdu à la fin l’Italie.
1173 – L’archevêque de Mayence, Christien, réussit habilement à détacher les Vénitiens de la ligue : mais Milan, Pavie, Florence, Crémone, Parme, Bologne, sont inébranlables, et Rome les soutient.
Pendant ce temps, Frédéric est obligé d’aller apaiser des troubles dans la Bohême. Il y dépossède le roi Ladislas, et donne la régence au fils de ce roi. On ne peut être plus absolu qu’il l’était en Allemagne, et plus faible alors au-delà des Alpes.
1174 – Il passe enfin le mont Cenis. Il assiège cette Alexandrie bâtie pendant son absence, et dont le nom lui était odieux, et commence par faire dire aux habitants que s’ils osent se défendre, on ne pardonnera ni au sexe ni à l’enfance.
1175 – Les Alexandrins, secourus par les villes confédérées, sortent sur les impériaux, et les battent à l’exemple des Milanais. L’empereur, pour comble de disgrâce, est abandonné par Henri-le-Lion, qui se retire avec ses Saxons, très indisposés contre Barberousse, qui gardait pour lui les terres de Mathilde.
Il semblait que l’Italie allait être libre pour jamais.
1176 – Frédéric reçoit des renforts d’Allemagne. L’archevêque de Mayence est à l’autre bout de l’Italie, dans la marche d’Ancône, avec ses troupes.
La guerre est poussée vivement des deux côtés. L’infanterie milanaise, tout armée de piques, défait toute la gendarmerie impériale. Frédéric (2) échappe à peine, poursuivi par les vainqueurs. Il se cache, et se sauve enfin dans Pavie.
Cette victoire fut le signal de la liberté des Italiens pendant plusieurs années : eux seuls alors purent se nuire.
Le superbe Frédéric prévient enfin et sollicite le pape Alexandre, retiré dès longtemps dans Anagni, craignant également les Romains qui ne voulaient point de maître, et l’empereur qui voulait l’être.
Frédéric lui offre de l’aider à dominer dans Rome, de lui restituer le patrimoine de saint Pierre, et de lui donner une partie des terres de la comtesse Mathilde. On assemble un congrès à Bologne.
1177 – Le pape fait transférer le congrès à Venise, où il se rend sur les vaisseaux du roi de Sicile. Les ambassadeurs de Sicile et les députés des villes lombardes y arrivent les premiers. L’archevêque de Mayence, Christien, y vient conclure la paix.
Il est difficile de démêler comment cette paix, qui devait assurer le repos des papes et la liberté des Italiens, ne fut qu’une trêve de six ans avec les villes lombardes, et de quinze ans avec la Sicile. Il n’y fut pas question des terres de la comtesse Mathilde, qui avaient été la base du traité.
Tout étant conclu, l’empereur se rend à Venise. Le duc le conduit dans sa gondole à Saint-Marc. Le pape l’attendait à la porte, la tiare sur la tête. L’empereur sans manteau le conduit au chœur, une baguette de bedeau à la main. Le pape prêcha en latin, que Frédéric n’entendait pas. Après le sermon, l’empereur vient baiser les pieds du pape, communie de sa main, conduit sa mule dans la place Saint-Marc au sortir de l’église ; et Alexandre III s’écriait : « Dieu a voulu qu’un vieillard et un prêtre triomphât d’un empereur puissant et terrible. » Toute l’Italie regarda Alexandre III comme son libérateur et son père.
La paix fut jurée sur les Évangiles par douze princes de l’empire. On n’écrivait guère alors ces traités. Il y avait peu de clauses ; les serments suffisaient. Peu de princes allemands savaient lire et signer, et on ne se servait de la plume qu’à Rome ; Cela ressemble aux temps sauvages qu’on appelle héroïques.
Cependant on exigea de l’empereur un acte particulier, scellé de son sceau, par lequel il promit de n’inquiéter de dix ans les villes d’Italie.
1178 – Comment Frédéric Barberousse osait-il après cela passer par Milan, dont le peuple traité par lui en esclave l’avait vaincu ? Il y alla pourtant en retournant en Allemagne.
D’autres troubles agitaient ce vaste pays, guerrier, puissant et malheureux, dans lequel il n’y avait pas encore une seule ville comparable aux médiocres de l’Italie.
Henri-le-Lion, maître de la Saxe et de la Bavière, faisait toujours la guerre à plusieurs évêques, comme l’empereur l’avait faite au pape. Il succomba comme lui, et par l’empereur même.
L’archevêque de Cologne, aidé de la moitié de la Vestphalie, l’archevêque de Magdebourg, un évêque d’Halberstadt, étaient opprimés par Henri-le-Lion, et lui faisaient tout le mal qu’ils pouvaient. Presque toute l’Allemagne embrasse leur parti.
1179 – Henri-le-Lion est le quatrième duc de Bavière mis au ban de l’empire dans la diète de Goslar. Il fallait une puissante armée pour mettre l’arrêt à exécution. Ce prince était plus puissant que l’empereur. Il commandait alors depuis Lubeck jusqu’au milieu de la Vestphalie. Il avait, outre la Bavière, la Styrie et la Carinthie. L’archevêque de Cologne, son ennemi, est chargé de l’exécution du ban.
Parmi les vassaux de l’empire qui amènent des troupes à l’archevêque de Cologne, on voit un Philippe, comte de Flandre, ainsi qu’un comte de Hainaut, et un duc de Brabant, etc. Cela pourrait faire croire que la Flandre proprement dite se regardait toujours comme membre de l’empire, quoique patrie de la France ; tant le droit féodal traînait après lui d’incertitudes.
Le duc Henri se défend dans la Saxe ; il prend la Thuringe ; il prend la Hesse ; il bat l’armée de l’archevêque de Cologne.
La plus grande partie de l’Allemagne est ravagée par cette guerre civile, effet naturel du gouvernement féodal. Il est même étrange que cet effet n’arrivât pas plus souvent.
1180 – Après quelques succès divers, l’empereur tient une diète dans le château de Gelnhausen vers le Rhin. On y renouvelle, on y confirme la proscription de Henri-le-Lion. Frédéric y donne la Saxe à Bernard d’Anhalt, fils d’Albert-l’Ours, marquis de Brandebourg. On lui donne aussi une partie de la Vesphalie. La maison d’Anhalt parut alors devoir être la plus puissante de l’Allemagne.
La Bavière est accordée au comte Othon de Vitelsbach, chef de la cour de justice de l’empereur. C’est de cet Othon Vitelsbach que descendent les deux maisons électorales de Bavière qui règnent de nos jours après tant de malheurs. Elles doivent leur grandeur à Frédéric Barberousse.
Dès que ces seigneurs furent investis, chacun tombe sur Henri-le-Lion ; et l’empereur se met lui-même à la tête de l’armée.
1181 – On prend au duc Henri Lunebourg dont il était maître, on attaque Lubeck dont il était le protecteur ; et le roi de Danemark Valdemar aide l’empereur dans ce siège de Lubeck.
Lubeck déjà riche, et qui craignait de tomber au pouvoir du Danemark, se donne à l’empereur, qui la déclare ville impériale, capitale des villes de la mer Baltique, avec la permission de battre monnaie.
Le duc Henri, ne pouvant plus résister, va se jeter aux pieds de l’empereur, qui lui promet de lui conserver Brunsvick et Lunebourg, reste de tant d’États qu’on lui enlève.
Henri-le-Lion passe à Londres avec sa femme, chez le roi Henri II, son beau-père. Elle lui donne un fils nommé Othon ; c’est le même qui fut depuis empereur sous le nom d’Othon IV ; et c’est d’un frère de cet Othon IV que descendent les princes qui règnent aujourd’hui en Angleterre : de sorte que les ducs de Brunsvik, les rois d’Angleterre, les ducs de Modène, ont tous une origine commune, et cette origine est italienne.
1182 – L’Allemagne est alors tranquille. Frédéric y abolit plusieurs coutumes barbares, entre autres celle de piller le mobilier des morts ; droit horrible que tous les bourgeois des villes exerçaient au décès d’un bourgeois, aux dépens des héritiers, et qui causait toujours des querelles sanglantes, quoique le mobilier fût alors bien peu de chose.
Toutes les villes de la Lombardie jouissent d’une profonde paix, et reprennent la vie.
Les Romains persistent toujours dans l’idée de se soustraire au pouvoir des papes, comme à celui des empereurs. Ils chassent de Rome le pape Lucius III, successeur d’Alexandre.
Le sénat est le maître dans Rome. Quelques clercs qu’on prend pour des espions du pape Lucius III lui sont renvoyés avec les yeux crevés : inhumanité trop indigne du nom romain.
1183 – Frédéric Ier déclare Ratisbonne ville impériale. Il détache le Tyrol de la Bavière ; il en détache aussi la Styrie, qu’il érige en duché.
Célèbre congrès à Plaisance, le 30 avril, entre les commissaires de l’empereur et les députés de toutes les villes de Lombardie. Ceux de Venise même s’y trouvent. Ils conviennent que l’empereur peut exiger de ses vassaux d’Italie le serment de fidélité, et qu’ils sont obligés de marché à son secours en cas qu’on l’attaque dans son voyage à Rome, qu’on appelle l’expédition romaine.
Ils stipulent que les villes et les vassaux ne fourniront à l’empereur, dans son passage, que le fourrage ordinaire et les provisions de bouche pour tout subside.
L’empereur leur accorde le droit d’avoir des troupes, des fortifications, des tribunaux qui jugent en dernier ressort, jusqu’à concurrence de cinquante marcs d’argent, et nulle cause ne doit être jamais évoquée en Allemagne.
Si, dans ces villes, l’évêque a le titre de comte, il conservera le droit de créer les consuls de sa ville épiscopale ; et si l’évêque n’est pas en possession de ce droit, il est réservé à l’empereur.
Ce traité, qui rendait l’Italie libre sous un chef, a été regardé longtemps par les Italiens comme le fondement de leur droit public.
Les marquis de Malaspina et les comtes de Crème y sont spécialement nommés ; et l’empereur transige avec eux comme avec les autres villes. Tous les seigneurs des fiefs y sont compris en général.
Les députés de Venise ne signèrent à ce traité que pour les fiefs qu’ils avaient dans le continent ; car pour la ville de Venise, elle ne mettait pas sa liberté et son indépendance en compromis.
1184 – Grande diète à Mayence. L’empereur y fait encore reconnaître son fils Henri roi des Romains.
Il arme chevaliers ses deux fils Henri et Frédéric. C’est le premier empereur qui ait fait ainsi ses fils chevaliers avec les cérémonies alors en usage. Le nouveau chevalier faisait la veille des armes, ensuite on le mettait au bain ; il venait recevoir l’accolade et le baiser en tunique ; des chevaliers lui attachaient ses éperons ; il offrait son épée à Dieu et aux saints ; on le revêtait d’une épitoge ; mais ce qu’il y avait de plus bizarre, c’est qu’on lui servait à dîner sans qu’il lui fût permis de manger et de boire. Il lui était aussi défendu de rire.
L’empereur va à Vérone, où le pape Lucius III, toujours chassé de Rome, était retiré. On y tenait un petit concile. Il ne fut pas question de rétablir Lucius à Rome. On y traita la grande querelle des terres de la comtesse Mathilde, et on ne convint de rien : aussi le pape refusa-t-il de couronner empereur Henri, fils de Frédéric.
L’empereur alla le faire couronner roi d’Italie à Milan, et on y apporta la couronne de fer de Monza.
1185 – Le pape, brouillé avec les Romains, est assez imprudent pour se brouiller avec l’empereur au sujet de ce dangereux héritage de Mathilde.
Un roi de Sardaigne commande les troupes de Frédéric. Ce roi de Sardaigne est le fils de ce bailli qui avait acheté le titre de roi.Il se saisit de quelques villes dont les papes étaient encore en possession. Lucius III, presque dépouillé de tout, meurt à Vérone ; et Frédéric, vainqueur du pape, ne peut pourtant être souverain dans Rome.
1186 – L’empereur marie à Milan, le 6 février, son fils le roi Henri, avec Constance de Sicile, fille de Roger II, roi de Sicile et de Naples, et petite-fille de Roger premier du nom. Elle était héritière présomptive de ce beau royaume : ce mariage fut la source des plus grands et des plus longs malheurs.
Cette année doit être célèbre en Allemagne par l’usage qu’introduisit un évêque de Metz, nommé Bertrand, d’avoir des archives dans la ville, et d’y conserver les actes dont dépendent les fortunes des particuliers. Avant ce temps-là, tout se faisait par témoins seulement, et presque toutes les contestations se décidaient par des combats.
1187 – La Poméranie qui, après avoir appartenu aux Polonais, était vassale de l’empire, et qui lui payait un léger tribut, est subjuguée par Canut, roi de Danemark, et devient vassale des Danois. Slesvick, auparavant relevant de l’empire, devient un duché du Danemark. Ainsi ce royaume, qui auparavant relevait lui-même de l’Allemagne, lui ôte tout d’un coup deux provinces.
Frédéric Barberousse, auparavant si grand et si puissant, n’avait plus qu’une ombre d’autorité en Italie, et voyait la puissance de l’Allemagne diminuée.
Il rétablit sa réputation en conservant la couronne de Bohême à un duc ou à un roi que ses sujets venaient de déposer.
Les Génois bâtissent un fort à Monaco, et font l’acquisition de Gavi.
Grands troubles dans la Savoie. L’empereur Frédéric se déclare contre le comte de Savoie, et détache plusieurs fiefs de ce comté, entre autres les évêchés de Turin et de Genève. Les évêques de ces villes deviennent seigneurs de l’empire : de là les querelles perpétuelles entre les évêques et les comtes de Genève.
1188 – Saladin, le plus grand homme de son temps, ayant repris Jérusalem sur les chrétiens, le pape Clément III fait prêcher une nouvelle croisade dans toute l’Europe.
Le zèle des Allemands s’alluma. On a peine à concevoir les motifs qui déterminèrent l’empereur Frédéric à marcher vers la Palestine, et à renouveler, à l’âge de soixante-huit ans, des entreprises dont un prince sage devait être désabusé. Ce qui caractérise ces temps-là, c’est qu’il envoie un comte de l’empire à Saladin, pour lui demander en cérémonie Jérusalem et la vraie croix. Cette vraie croix était incontestablement une très fausse relique ; et cette Jérusalem était une ville très misérable : mais il fallait flatter le fanatisme absurde des peuples.
On voit ici un singulier exemple de l’esprit du temps. Il était à craindre que Henri-le-Lion, pendant l’absence de l’empereur, ne tentât de rentrer dans les grands États dont il était dépouillé. On lui fit jurer qu’il ne ferait aucune tentative pendant la guerre sainte. Il jura, et on se fia à son serment.
1189 – Frédéric Barberousse, avec son fils Frédéric, duc de Souabe, passe par l’Autriche et par la Hongrie avec plus de cent mille croisés. S’il eût pu conduire à Rome cette armée de volontaires, il était empereur en effet. Les premiers ennemis qu’il trouve sont les chrétiens grecs de l’empire de Constantinople. Les empereurs grecs et les croisés avaient eu à se plaindre en tout temps les uns des autres.
L’empereur de Constantinople était Isaac l’Ange. Il refuse de donner le titre d’empereur à Frédéric, qu’il ne regarde que comme un roi d’Allemagne ; il lui fait dire que s’il veut obtenir le passage, il faut qu’il donne des otages. On voit dans les Constitutions de Goldast les lettres de ces empereurs. Isaac l’Ange n’y donne d’autre titre à Frédéric que celui d’avocat de l’Église romaine. Frédéric répond à l’Ange qu’il est un chien. Et après cela on s’étonne des épithètes que se donnent les héros d’Homère dans des temps encore plus héroïques.
1190 – Frédéric s’étant frayé le passage à main armée, bat le sultan d’Iconium ; il prend sa ville ; il passe le mont Taurus, et meurt de maladie après sa victoire, laissant une réputation célèbre d’inégalité et de grandeur, et une mémoire chère à l’Allemagne plus qu’à l’Italie.
On dit qu’il fut enterré à Tyr. On ignore où est la cendre d’un empereur qui fit tant de bruit pendant sa vie. Il faut que ses succès dans l’Asie aient été beaucoup moins solides qu’éclatants ; car il ne restait à son fils Frédéric de Souabe qu’une armée d’environ sept à huit mille combattants, de cent mille qu’elle était en arrivant. Le fils mourut bientôt de maladie comme le père ; et il ne demeura en Asie que Léopold, duc d’Autriche, avec quelques chevaliers. C’est ainsi que se terminait chaque croisade. (3).
1 – Alexandrie de la Paille est devenue une place forte très importante.
2 – Battu à Lignano, le 29 mai 1176. Voltaire raconte ici avec plus de détails que dans son Essai la lutte de la ligue lombarde contre l’Empire. (G.A.)
3 – Toute cette fin, depuis l’an 1186, a été reproduite par Philippe Lebas dans son Histoire de l’Allemagne, et c’est à cette occasion qu’il a qualifié d’excellent le résumé de Voltaire. Voyez l’Essai, note du chapitre XLVIII. (G.A.)