COLLECTION D’ANCIENS ÉVANGILES - Partie 13
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COLLECTION D’ANCIENS ÉVANGILES
ou
MONUMENTS DU PREMIER SIÈCLE DU CRISTIANISME,
(Partie 13)
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ÉVANGILE DE L’ENFANCE.
Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit
d’un seul Dieu.
Par le secours et à la faveur du grand Dieu, nous commençons à écrire le livre des miracles de notre maître, et seigneur et sauveur, Jésus-Christ, qui est appelé l’Evangile de l’enfance, dans la paix du Seigneur ; ainsi soit-il.
I. – Nous trouvons dans le livre du pontife Joseph, qui vécut au temps du Christ (quelques-uns le prennent pour Cajapha, il dit) que Jésus parla même lorsqu’il était au berceau, et qu’il dit à sa mère Marie : Je suis Jésus, fils de Dieu, ce verbe que vous avez enfanté, comme l’ange Gabriel vous l’a annoncé ; et mon père m’a envoyé pour le salut du monde.
II. – Or, l’an trois cent neuf de l’ère d’Alexandre, Auguste ordonna que chacun fût inscrit dans sa patrie. C’est pourquoi Joseph se leva ; et ayant pris Marie sa fiancée, il alla à Jérusalem, et vint à Bethléem pour être inscrit avec sa famille dans la ville de son père. Et quand ils furent arrivés près d’une caverne, Marie dit à Joseph que son temps d’accoucher était proche, et qu’elle ne pouvait point aller jusqu’à la ville : mais, dit-elle, entrons dans cette caverne. Comme Joseph alla vite pour amener une femme qui l’aidât (dans l’accouchement), il vit une vieille Juive, originaire de Jérusalem, et lui dit : Holà ! ma bonne, venez ici, et entrez dans cette caverne, où vous trouverez une femme prête d’accoucher.
III. – Ainsi, après le coucher du soleil, la vieille, et avec elle Joseph, arrivèrent à la caverne, et y entrèrent tous les deux. Et voici, elle était remplie de lumières, qui effaçaient l’éclat des lampes et des chandelles, et étaient plus grandes que la clarté du soleil ; l’enfant, enveloppé de langes, suçait les mamelles de la divine Marie, sa mère, étant couché dans la crèche. Comme ils admiraient tous les deux cette lumière, la vieille demanda à la divine Marie : Etes-vous la mère de cet enfant ? et la divine Marie faisant signe qu’oui : Vous n’êtes pas, lui dit-elle, semblable aux filles d’Eve. La divine Marie semblable à mon fils, de même sa mère n’a point sa pareille entre les femmes. La vieille répondant et disant : Ma maîtresse, je suis venue pour acquérir un prix qui durera toujours ; notre divine Marie lui dit : Imposez vos mains à l’enfant ; ce que la vieille ayant fait, dès ce temps elle s’en alla purifiée. C’est pourquoi étant sortie elle disait : Depuis ce temps je serai la servante de cet enfant tous les jours de ma vie.
IV. – Ensuite, lorsque les bergers furent venus, et qu’ayant allumé du feu, ils se réjouissaient grandement, il leur apparut des armées célestes louant et célébrant le Dieu suprême, et les bergers faisant la même chose : alors cette caverne paraissait très semblable à un temple auguste, parce que les voix célestes, de même que les terrestres, célébraient et magnifiaient Dieu à cause de la naissance du Seigneur Christ. Or la vieille Juive, voyant ces miracles manifestes, rendait grâces à Dieu, disant : Je vous rends grâces, ô Dieu, Dieu d’Israël, parce que mes yeux ont vu la naissance du Sauveur du monde.
V. – Et lorsque le temps de la circoncision fut arrivé, c’est-à-dire le huitième jour, auquel la loi ordonne de circoncire un enfant, ils le circoncirent dans la caverne ; et la vieille Juive prit cette pellicule (mais d’autres disent qu’elle prit la rognure du nombril), et elle la renferma dans un vase d’albâtre plein de vieille huile de nard. Or elle avait un fils parfumeur, à qui elle la remit, lui disant : Prenez garde de vendre ce vase d’albâtre rempli de parfum de nard, quand même on vous en offrirait trois cents deniers. Et c’est là ce vase d’albâtre que Marie la pécheresse acheta, et qu’elle répandit sur la tête et sur les pieds de notre Seigneur Jésus-Christ, et les essuya avec les cheveux de sa tête. Ayant laissé passer l’espace de dix jours, ils le portèrent à Jérusalem, et le quatrième après sa naissance ils le présentèrent dans le temple devant la face du Seigneur, offrant pour lui les dons, ce qui est prescrit par la loi de Moïse ; tout mâle premier-né sera appelé le saint de Dieu.
VI. – Et le vieillard Siméon le vit brillant comme une colonne de lumière lorsque la divine vierge Marie sa mère le portait dans ses bras, toute transportée de joie ; et les anges l’entouraient comme un cercle, le célébrant et se tenant comme des gardes auprès d’un roi. C’est pourquoi Siméon s’approchant au plus vite de la divine Marie, et étendant les mains vers elle, il disait au Seigneur Christ : Maintenant, ô mon Seigneur, votre serviteur s’en va en paix, selon votre parole ; car mes yeux ont vu votre miséricorde que vous avez préparée pour le salut de toutes les nations, la lumière de tous les peuples, et la gloire de votre peuple d’Israël. Anne la prophétesse était aussi là, et s’approchant, elle rendait grâces à Dieu, et vantait le bonheur de la dame Marie.
VII. – Et il arriva lorsque le Seigneur Jésus fut né à Bethléem, Ville de Judée, au temps du roi Hérode, des mages qui vinrent de l’Orient à Jérusalem, comme l’avait prédit Zorodastcht (Zoroastre) ; et ils avaient avec eux des présents, de l’or, de l’encens, et de la myrrhe : et ils l’adorèrent, et lui offrirent leurs présents. Alors la dame Marie prit une des bandelettes dont l’enfant était enveloppé, et la leur donna au lieu de bénédiction ; et ils la reçurent d’elle comme un très beau présent. Et à la même heure il leur apparut un ange en forme de l’étoile qui les avait auparavant conduits dans leur chemin, et dont ils suivirent la lumière en s’en allant, jusqu’à ce qu’ils fussent retournés dans leur patrie.
VIII. – Or il y avait des rois et leurs princes qui leur demandaient ce qu’ils avaient vu, ou ce qu’ils avaient fait ; comment ils étaient allés et revenus ; enfin quels compagnons de voyage ils avaient eus. Mais eux leur montrèrent cette bandelette que la divine Marie leur avait donnée : c’est pourquoi ils célébrèrent une fête, et selon leur coutume, ils allumèrent du feu, et l’adorèrent, et y jetèrent cette bandelette ; et le feu la saisit et l’environna. Et le feu étant éteint, ils en retirèrent la bandelette entière, comme si le feu ne l’eût pas touchée. C’est pourquoi ils commencèrent à la baiser, à la mettre sur leurs têtes et sur leurs yeux, disant : C’est certainement ici la vérité indubitable ! Sans doute que c’est une grande chose, que le feu n’a pu la brûler, ou la perdre. Ensuite ils la prirent et la mirent dans leurs trésors avec vénération.
IX. – Mais Hérode, voyant que les mages tardaient et ne revenaient pas vers lui, fit venir les prêtres et les sages, et leur dit : Enseignez-moi où le Christ doit naître ; et lorsqu’ils eurent répondu, A Bethléem, ville de Judée, il commença à rouler dans son esprit le massacre du Seigneur Jésus-Christ. Alors l’ange du Seigneur apparut à Joseph en songe, et lui dit : Levez-vous, prenez l’enfant et sa mère, et allez en Egypte, vers le chant du coq. C’est pourquoi il se leva et partit.
X. – Et comme il pensait en lui-même quel devait être son voyage, il fut surpris par l’aurore ; et la fatigue du chemin avait rompu la sangle de la selle. Et ils approchaient déjà d’une grande ville dans laquelle était une idole, à qui les autres idoles et les dieux d’Egypte offraient des dons et des vœux ; et auprès de cette idole se tenait un prêtre qui en était vœux ; et auprès de cette idole se tenait un prêtre qui en était le ministre, et qui chaque fois que Satan parlait par la bouche de cette idole, le rapportait aux habitants de l’Egypte et de ces contrées. Ce prêtre avait un fils de trois ans, obsédé d’une grande multitude de démons, lequel tenait plusieurs propos ; et lorsque les démons se saisissaient de lui, il déchirait ses habits, et courait tout nu en jetant des pierres aux passants. Or, dans le voisinage de cette idole était l’hôpital de cette ville, dans laquelle Joseph et la divine Marie furent à peine entrés, et descendus dans cet hôpital, que ses citoyens furent fort consternés ; et tous les princes et les prêtres de l’idole s’assemblèrent auprès de cette idole, lui demandant : Quelle est cette consternation et cette épouvante qui a saisi notre pays ? L’idole leur répondit : Il est arrivé ici un Dieu inconnu, qui est véritablement Dieu, et pas un autre que lui n’est digne du culte divin, parce qu’il est véritablement fils de Dieu : à sa seule renommée cette région a tremblé, et son arrivée la trouble et l’agite, et nous craignons beaucoup de la grandeur de son empire. Et à l’heure même cette idole fut renversée, et tous les habitants d’Egypte, outre les autres, accoururent à sa ruine.
XI. – Mais le fils du prêtre, attaqué de sa maladie accoutumée, entra dans l’hôpital, où il offensa Joseph et la divine Marie, que tous les autres avaient abandonnés par la suite. Et parce que la divine Marie avait lavé les langes du Seigneur Christ, et les avait étendus sur une latte, cet enfant possédé arracha un de ces langes et le mit sur sa tête ; et aussitôt les démons commencèrent à sortir de sa bouche, et à fuir sous la figure de corbeaux et de serpents. Depuis ce temps donc par l’empire du Seigneur Christ, l’enfant fut guéri, et commença à chanter des louanges et à rendre grâces au Seigneur qui l’avait guéri. Et son père le voyant rétabli dans sa première santé : Mon fils, dit-il, que vous est-il arrivé ? et par quel moyen avez-vous été guéri ? Le fils répondit : Comme les démons m’agitaient, je suis entré dans l’hôpital, et j’y ai trouvé une femme d’un visage charmant, avec son enfant, dont elle avait étendu sur une latte les langes qu’elle venait de laver : pendant que j’en mettais sur ma tête un que j’avais arraché, les démons se sont enfuis, et m’ont quitté. Le père, transporté de joie, lui dit : Mon fils, il se peut faire que cet enfant soit le fils du Dieu vivant, qui a créé le ciel et la terre, car, aussitôt qu’il est venu vers nous, l’idole a été brisée, et tous les dieux ont été renversés et détruits par une force supérieure.
XII. – Ainsi s’accomplit la prophétie qui dit : J’ai appelé mon fils d’Egypte : car Joseph et Marie, ayant appris que l’idole avait été renversée et détruite, furent tellement saisis de crainte et d’épouvante, qu’ils dirent : Lorsque nous étions dans la terre d’Israël, Hérode a voulu faire mourir Jésus ; c’est pour cela qu’il a massacré tous les enfants de Bethléem et de ses environs ; et il n’y a point de doute que les Egyptiens ne nous fassent brûler, s’ils apprennent que cette idole a été brisée et renversée.
XIII. – Etant donc sortis de là, ils parvinrent auprès d’un repaire de voleurs, qui, ayant dépouillé des voyageurs de leurs bagages et de leurs habits, les conduisaient enchaînés. Or ces voleurs entendaient un grand bruit, tel qu’est ordinairement celui d’un roi qui sort de sa ville, suivi d’une nombreuse armée et de sa cavalerie au son retentissant des tambours ; c’est pourquoi, laissant toute leur proie, ils s’enfuirent. Alors les captifs, se levant, détachaient les chaînes l’un de l’autre ; et ayant repris leurs bagages et s’en allant, lorsqu’ils virent approcher Joseph et Marie, ils leur demandèrent : Où est ce roi dont les voleurs entendant le bruit de l’arrivée, nous ont laissé échapper sans nous faire aucun mal ? Joseph répondit : Il vient après nous.
XIV. – Ensuite ils vinrent dans une autre ville où était une femme possédée, dont Satan, maudit et rebelle, s’était emparé, comme elle était allée une fois de nuit puiser de l’eau. Elle ne pouvait ni souffrir des habits ni rester dans les maisons ; et chaque fois qu’on l’attachait avec des chaînes ou des courroies, elle les rompait, et fuyait toute nue dans les lieux déserts ; et se tenant dans les carrefours et dans les cimetières, elle jetait des pierres aux hommes, de sorte qu’elle causait beaucoup de dommages à ses proches. La divine Marie l’ayant donc vue, en eut pitié ; et tout d’un coup Satan la quitta, et s’enfuyant sous la forme d’un jeune homme, il dit : Malheur à moi à cause de vous, Marie, et de votre fils ! Ainsi cette femme fut délivrée de son tourment : et revenant à son bon sens, et rougissant de sa nudité, elle retourna vers ses proches, évitant la rencontre des hommes, et ayant repris ses habits, elle expliqua la raison de son état à son père et à ses proches, lesquels étant des principaux de la ville, reçurent chez eux la divine Marie et Joseph avec vénération.
XV. – Le jour suivant, ils partirent de chez eux, munis d’une honnête provision pour le voyage, et sur le soir du même jour, ils arrivèrent dans une autre ville où l’on célébrait des noces ; mais l’épousée était devenue muette par les tromperies maudites de Satan et par le moyen de la magie ; de sorte qu’elle ne pouvait plus ouvrir la bouche. Cette épousée muette, voyant donc la divine Marie lorsqu’elle entrait dans la ville en portant dans ses bras son fils le Seigneur Christ, elle étendit ses mains vers le Seigneur Christ, et l’ayant tiré à soi, elle le prit dans ses bras, et le serrant étroitement, elle lui donna de fréquents baisers, en l’agitant plusieurs fois et l’approchant de son corps. Aussitôt le nœud de sa langue se délia, et ses oreilles s’ouvrirent, et elle commença à chanter des louanges et des actions de grâces à Dieu de ce qu’il lui avait rendu la santé. C’est pourquoi il se répandit cette nuit une si grande joie parmi les citoyens de cette ville, qu’ils pensaient que Dieu et ses anges étaient descendus vers eux.