LETTRES A S.A. MGR LE PRINCE DE *** - Partie 8
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LETTRES A S.A. MGR LE PRINCE DE ***,
SUR RABELAIS ET SUR D’AUTRES AUTEURS ACCUSÉS
D’AVOIR MAL PARLÉ DE LA RELIGION CHRÉTIENNE.
- Partie 8 -
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DE LOCKE.
C’est à tort qu’on a compté le grand philosophe Locke parmi les ennemis de la religion chrétienne. Il est vrai que son livre du Christianisme raisonnable s’écarte assez de la foi ordinaire ; mais la religion des primitifs appelés trembleurs, qui fait une si grande figure en Pensylvanie, est encore plus éloignée du christianisme ordinaire, et cependant ils sont réputés chrétiens.
On lui a imputé de ne point croire l’immortalité de l’âme parce qu’il était persuadé que Dieu, le maître absolu de tout, pouvait donner (s’il voulait) le sentiment et la pensée à la matière. M. de Voltaire l’a bien vengé de ce reproche (1). Il a prouvé que Dieu peut conserver éternellement l’atome, la monade qu’il aura daigné favoriser du don de la pensée. C’était le sentiment du célèbre et saint prêtre Gassendi, pieux défenseur de ce que la doctrine d’Epicure peut avoir de bon. Voyez sa fameuse lettre à Descartes.
« D’où vous vient cette notion ? Si elle procède du corps, il faut que vous ne soyez pas sans extension. Apprenez-nous comment il se peut faire que l’espèce ou l’idée du corps, qui est étendu, puisse être reçue dans vous, c’est-à-dire dans une substance non étendue… Il est vrai que vous connaissez, que vous pensez, mais vous ignorez quelle espèce de substance vous êtes, vous qui pensez, quoique l’opération de la pensée vous soit connue. Le principal de votre essence vous est caché ; et vous ne savez point quelle est la nature de cette substance, dont l’une des opérations est de penser, etc. »
Locke mourut en paix, disant à madame Masham et à ses amis qui l’entouraient : La vie est une pure vanité.
1 – Voyez les Lettres anglaises. (G.A.)