COLLECTION D’ANCIENS ÉVANGILES - Partie 8
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COLLECTION D’ANCIENS ÉVANGILES
ou
MONUMENTS DU PREMIER SIÈCLE DU CRISTIANISME,
(Partie 8)
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ÉVANGILE DE LA NAISSANCE DE MARIE.
VIII. – Joseph, entre autres, de la maison et de la famille de David, était fort âgé, et tous portant leurs verges selon l’ordre, lui seul cacha la sienne. C’est pourquoi rien n’ayant apparu de conforme à la voix divine, le pontife pensa qu’il fallait derechef consulter Dieu, qui répondit que celui qui devait épouser la vierge était le seul de tous ceux qui avaient été désignés qui n’eût pas apporté sa verge. Ainsi Joseph fut découvert. Car lorsqu’il eut apporté sa verge, et qu’une colombe venant du ciel se fut reposée sur le sommet, il fut évident à tous que la vierge devait lui être donnée en mariage. Ayant donc célébré le (1) droit des noces selon la coutume, se retira dans la ville de Bethléem, pour arranger sa maison, et pourvoir aux choses nécessaires pour les noces. Mais la vierge du Seigneur, Marie, avec sept autres vierges de son âge, et sevrées avec elle, qu’elle avait reçues du prêtre, retourna en Galilée dans la maison de son père.
IX. – Or, en ces jours-là, c’est-à-dire au premier temps de son arrivée en Galilée, l’ange lui fut envoyé de Dieu pour lui raconter qu’elle concevrait le Seigneur, et lui expliquer principalement la manière et l’ordre de la conception. Enfin étant entré vers elle, il remplit la chambre où elle demeurait d’une grande lumière, et la saluant très gracieusement il lui dit : Je vous salue Marie, vierge du Seigneur, très agréable, vierge pleine de grâce ; le Seigneur est avec vous ; vous êtes bénie par-dessus toutes les femmes, bénie par-dessus tous les hommes nés jusqu’à présent. Mais la vierge, qui connaissait déjà bien les visages des anges, et qui était accoutumée à la lumière céleste, ne fut point effrayée de voir un ange, ni étonnée de la grandeur de la lumière ; mais son seul discours la troubla, et elle commença à penser qu’elle pouvait être cette salutation si extraordinaire, ce qu’elle présageait, ou quelle fin elle devait avoir. L’ange divinement inspiré allant au-devant de cette pensée : Ne craignez point, dit-il, Marie, comme si je cachais par cette salutation quelque chose de contraire à votre chasteté. Car vous avez trouvé grâce devant le Seigneur, parce que vous avez choisi la chasteté. C’est pourquoi, étant vierge, vous concevrez sans péché et enfanterez un fils. Celui-là sera grand, parce qu’il dominera depuis la mer jusqu’à la mer, et depuis le fleuve jusqu’aux extrémités de la terre Et il sera appelé le fils du Très-Haut, parce qu’en naissant humble sur la terre, il règne élevé dans le ciel. Et le Seigneur Dieu lui donnera le siège de David son père, et il règnera à jamais dans la maison de Jacob, et son règne n’aura point de fin. Il est lui-même le roi des rois, et le Seigneur des seigneurs ; et son trône subsistera dans le siècle du siècle. La Vierge crut à ces paroles de l’ange, mais voulant savoir la manière, elle répondit : Comment cela pourra-t-il se faire ? car, puisque suivant mon vœu je ne connais jamais d’homme, comment pourrai-je enfanter sans l’accroissement de la semence de l’homme ? A cela l’ange lui dit : Ne comptez pas, Marie, que vous conceviez d’une manière humaine. Car sans mélange d’homme vous concevrez vierge, vous enfanterez vierge, vous nourrirez vierge. Car le Saint-Esprit surviendra en vous, et la vertu du Très-Haut vous couvrira de son ombre contre les ardeurs de l’impureté. C’est pourquoi ce qui naîtra de vous sera le seul saint, parce que, seul conçu et né sans péché, il sera appelé le Fils de Dieu. Alors Marie étendant les mains et levant les yeux au ciel, dit : Voici la servante du Seigneur (car je ne suis pas digne du nom de maîtresse), qu’il me soit fait selon votre parole. (Il serait trop long et même ennuyeux de rapporter ici tout ce qui a précédé ou suivi la naissance du Seigneur. C’est pourquoi passant ce qui se trouve plus au long dans l’Evangile, finissons par ce qui n’y est pas si détaillé.) « Note du faux Jérôme, auquel on attribue la traduction latine. »
X. – Joseph donc, venant de la Judée dans la Galilée, avait intention de prendre pour femme la Vierge qu’il avait fiancée ; car trois mois s’étaient déjà écoulés, et le quatrième approchait, depuis le temps qu’il l’avait fiancée. Cependant le ventre de la fiancée grossissant peu à peu, elle commença à se montrer enceinte, et cela ne put être caché à Joseph ; car entrant vers la Vierge plus librement comme époux, et parlant plus familièrement avec elle, il s’aperçut qu’elle était enceinte. C’est pourquoi il commença à avoir l’esprit agité et incertain, parce qu’il ignorait ce qu’il avait à faire de mieux ; car il ne voulut point la dénoncer, parce qu’il était juste, ni la diffamer par le soupçon de fornication, parce qu’il était pieux ; c’est pourquoi il pensait à rompre son mariage secrètement, et à la renvoyer en cachette. Comme il avait ces pensées, voici que l’ange du Seigneur lui apparut en songe, disant : Joseph, fils de David, ne craignez point, c’est-à-dire n’ayez point de soupçon de fornication contre la Vierge, ou ne pensez rien de désavantageux à son sujet, et ne craignez point de la prendre pour femme ; car ce qui est né en elle, et qui tourmente actuellement votre esprit, est l’ouvrage non d’un homme, mais du Saint-Esprit ; car de toutes les vierges, elle seule enfantera le Fils de Dieu, et vous le nommerez Jésus, c’est-à-dire Sauveur, car c’est lui qui sauvera son peuple de leurs péchés. Joseph donc, suivant le précepte de l’ange, prit la Vierge pour femme : cependant il ne la connut pas ; mais en ayant soin chastement, il la garda ; et déjà le neuvième mois depuis la conception approchait, lorsque Joseph ayant pris sa femme et les autres choses qui lui étaient nécessaire, s’en alla à la ville de Bethléem d’où il était. Or il arriva, lorsqu’ils y furent, que les jours pour accoucher furent accomplis, et elle enfanta son fils premier-né, comme Christ, qui étant Dieu avec le Père, et le Fils, et l’Esprit saint, vit et règne pendant tous les siècles des siècles.
Pour suivre l’ordre historique des matières, nous plaçons au second rang le Protévangile de Jacques, qui est le dix-neuvième de la notice. Fabricius avertit qu’il a retouché la version de Postel, et qu’il a mis entre deux crochets (…) ce qui ne se trouve pas dans le grec.
1 – C’est-à-dire les fiançailles, dans lesquelles on écrivait le nom de l’époux et de l’épouse sur des tablettes dans une assemblée solennelle. (Philo de lg. Special., p. 608, édit, de Genève. (Voltaire.)