COLLECTION D’ANCIENS ÉVANGILES - Partie 7
Photo de PAPAPOUSS
COLLECTION D’ANCIENS ÉVANGILES
ou
MONUMENTS DU PREMIER SIÈCLE DU CRISTIANISME,
(Partie 7)
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ÉVANGILE DE LA NAISSANCE DE MARIE.
(1)
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I. – La bienheureuse et glorieuse Marie toujours vierge, de la race royale et de la famille de David, naquit dans la ville de Nazareth, et fut élevée à Jérusalem dans le temple du Seigneur. Son père se nommait Joachim, sa mère Anne. La famille de son père était de Galilée et de la ville de Nazareth. Celle de sa mère était de Bethléem. Leur vie était simple et juste devant le Seigneur, pieuse et irrépréhensible devant les hommes : car ayant partagé tout leur revenu en trois parts, ils dépensaient la première pour le temple et ses ministres ; la seconde, pour les pèlerins et les pauvres, et réservaient la troisième pour eux et leur famille. Ainsi chéris de Dieux et des hommes, il y avait près de vingt ans qu’ils vivaient chez eux dans un chaste mariage sans avoir des enfants. Ils firent vœu si Dieu leur en accordait un, de le consacrer au service du Seigneur ; et c’était dans ce dessein qu’à chaque fête de l’année ils avaient coutume d’aller au temple du Seigneur.
II. – Or il arriva que, comme la fête de la dédicace approchait, Joachim monta à Jérusalem avec quelques-uns de sa tribu. Le pontife Issachar se trouvait alors de fonction. Et lorsqu’il aperçut Joachim parmi les autres avec son oblation, il le rebuta et méprisa ses dons, en lui demandant comment étant stérile il avait le front de paraître parmi ceux qui ne l’étaient pas. Que puisse Dieu l’avait jugé indigne d’avoir des enfants, il pouvait penser que ses dons n’étaient nullement dignes de Dieu : l’Ecriture déclarant « maudit celui qui n’a point engendré de mâle en Israël. » Il ajouta qu’il n’avait qu’à commencer à se laver d’abord de la tache de cette malédiction en ayant un enfant, et qu’ensuite il pourrait paraître devant le Seigneur avec ses oblations. Joachim, confus de ce reproche outrageant, se retira auprès des bergers qui étaient avec ses troupeaux dans ses pâturages : car il ne voulut pas revenir à la maison, de peur que ceux de sa tribu qui étaient avec lui ne lui fissent le même reproche outrageant qu’ils avaient entendu de la bouche du prêtre.
III. – Or, quand il y eut passé quelque temps, un jour qu’il était seul, l’ange du Seigneur apparut à lui avec une grande lumière. Cette vision l’ayant troublé, l’ange le rassura en lui disant : Ne craignez point, Joachim, et ne vous troublez pas de me voir ; car je suis l’ange du Seigneur : il m’a envoyé vers vous pour vous annoncer que vos prières sont exaucées, et que vos aumônes sont montées jusqu’à lui. Car il a vu votre honte, et il a entendu le reproche de stérilité que vous avez essuyé injustement. Or Dieu punit le péché et non la nature ; c’est pourquoi lorsqu’il rend quelqu’un stérile, ce n’est que pour faire ensuite éclater ses merveilles, et montrer que l’enfant qui naît est un don de Dieu, et non pas le fruit d’une passion honteuse. Sara, la première mère de votre nation, ne fut-elle pas stérile jusqu’à l’âge de quatre-vingt ans ? Et cependant, au dernier âge de la vieillesse, elle engendra Isaac, auquel la bénédiction de toutes les nations était promise. De même Rachel, si agréable au Seigneur, et si fort aimée du saint homme Jacob fut longtemps stérile ; et cependant elle engendra Joseph, qui devint le maître de l’Egypte et le libérateur de plusieurs nations prêtes à mourir de faim. Lequel de vos chefs a été plus fort que Samson, ou plus saint que Samuel ? Et cependant ils eurent tous les deux des mères stériles. Si donc la raison ne vous persuade point par mes paroles, croyez par l’effet que les conceptions longtemps différées et les accouchements stériles n’en sont d’ordinaire que plus merveilleux. Ainsi votre femme Anne vous enfantera une fille que vous nommerez Marie ; elle sera consacrée au Seigneur dès son enfance, comme vous en avez fait vœu ; et elle sera remplie du Saint-Esprit, même dès le sein de sa mère. Elle ne mangera ni ne boira rien d’impur, n’aura aucune société avec la populace du dehors ; mais sa conversation sera dans le temple du seigneur, de peur qu’on ne puisse soupçonner ou dire quelque chose de désavantageux sur son compte. C’est pourquoi en avançant en âge, comme elle-même naîtra d’une mère stérile, de même cette vierge incomparable engendrera le fils du Très-Haut, qui sera appelé Jésus, sera le sauveur de toutes les nations, selon l’étymologie de ce nom. Et voici le signe que vous aurez des choses que je vous annonce. Lorsque vous arriverez à la porte d’or qui est à Jérusalem, vous y trouverez votre épouse Anne qui viendra au-devant de vous, laquelle aura autant de joie de vous voir qu’elle avait eu d’inquiétude du délai de votre retour. Après ces paroles, l’ange s’éloigna de lui.
IV. – Ensuite il apparut à Anne, son épouse, disant : Ne craignez point, Anne, et ne pensez pas que ce que vous voyez soit un fantôme. Car je suis ce même ange qui ai porté devant Dieu vos prières et vos aumônes ; et maintenant je suis envoyé vers vous pour annoncer qu’il vous naîtra une fille, laquelle étant appelée Marie sera bénie sur toutes les femmes. Elle sera pleine de la grâce du Seigneur. Aussitôt après sa naissance, elle restera trois ans dans la maison paternelle pour être sevrée, après quoi elle ne sortira point du temple, où elle sera comme engagée au service du Seigneur jusqu’à l’âge de raison ; enfin y servant Dieu nuit et jour par des jeûnes et des oraisons, elle s’abstiendra de tout ce qui est impur, ne connaîtra jamais d’homme ; mais seule sans exemple, sans tache, sans corruption, cette vierge, sans mélange d’homme, engendrera un fils ; cette servante enfantera le Seigneur, le Sauveur du monde par sa grâce, par son nom et par son œuvre. C’est pourquoi levez-vous, allez à Jérusalem ; et lorsque vous serez arrivée à la porte d’or, ainsi nommée parce qu’elle est dorée, vous aurez pour signe au-devant de vous votre mari dont l’état de la santé vous inquiète. Lors donc que ces choses seront arrivées, sachez que les choses que je vous annonce s’accompliront indubitablement.
V. – Suivant donc le commandement de l’ange, l’un et l’autre, partant du lieu où ils étaient, montèrent à Jérusalem ; et lorsqu’ils furent arrivés au lieu désigné par la prédiction de l’ange, ils s’y trouvèrent l’un au-devant de l’autre. Alors joyeux de leur vision mutuelle, et rassurés par la certitude de la lignée promise, ils rendirent grâces comme ils le devaient au Seigneur qui élève les humbles. C’est pourquoi ayant adoré le Seigneur, ils retournèrent à la maison où ils attendaient avec assurance et avec joie la promesse divine. Anne conçut donc et accoucha d’une fille ; et suivant le commandement de l’ange ses parents l’appelaient Marie.
VI – Et lorsque le terme de trois ans fut révolu, et que le temps de la sevrer fut accompli, ils amenèrent au temple du Seigneur cette vierge avec des oblations. Or il y avait autour du temple quinze degrés à monter, selon les quinze psaumes des degrés. Car, parce que le temple était bâti sur une montagne, il fallait des degrés pour aller à l’autel de l’holocauste qui était par dehors. Les parents placèrent donc la petite bienheureuse vierge Marie sur le premier. Et comme ils quittaient les habits qu’ils avaient eus en chemin, et qu’ils en mettaient de plus beaux et de plus propres selon l’usage, la vierge du Seigneur monta tous les degrés un à un sans qu’on lui donnât la main pour la conduire ou la soutenir, de manière qu’en cela seul on eût pensé qu’elle était déjà d’un âge parfait. Car le Seigneur dès l’enfance de la Vierge, opérait déjà quelque chose de grand, et faisait voir d’avance, par ce miracle, combien grands seraient les suivants. Ayant donc célébré le sacrifice selon la coutume de la loi, et accompli leur vœu, ils l’envoyèrent dans l’enclos du temple pour y être élevée avec les autres vierges ; et eux retournèrent à la maison.
VII. – Or la vierge du Seigneur, en avançant en âge, profitait en vertus, et, suivant la Psalmiste, « son père et sa mère l’avaient délaissée ; mais le Seigneur prit soin d’elle. » Car tous les jours elle était fréquentée par les anges ; tous les jours elle jouissait de la vision divine, qui la préservait de tous les maux et la comblait de tous les biens. C’est pourquoi elle vint à l’âge de quatorze ans, sans que non-seulement les méchants pussent rien inventer de répréhensible en elle, mais tous les bons qui la connaissaient trouvaient sa vie et sa conversation dignes d’admiration. Alors le pontife annonçait publiquement que les vierges que l’on élevait publiquement dans le temple, et qui avaient cet âge accompli, s’en retournassent à la maison pour se marier selon la coutume de la nation et la maturité de l’âge. Les autres ayant obéi à cet ordre avec empressement, la vierge du Seigneur, Marie, fut la seule qui s’excusa de le faire, disant que non-seulement ses parents l’avaient engagée au service du Seigneur, mais encore qu’elle avait voué au Seigneur sa virginité, qu’elle ne voulait jamais violer en habitant avec un homme. Le pontife fort embarrassé, ne pensant pas qu’il fallût enfreindre son vœu, ce qui serait contre l’Ecriture qui dit, Voyez et rendez, ni s’ingérer d’introduire une coutume inusitée chez la nation, ordonna que tous les principaux de Jérusalem et des lieux voisins se trouvassent à la solennité qui approchait, afin qu’il pût savoir par leur conseil ce qu’il y avait à faire dans une chose si douteuse. Ce qui ayant été fait, l’avis de tous fut qu’il fallait consulter le Seigneur sur cela. Et tout le monde étant en oraison, le pontife, selon l’usage, se présenta pour consulter Dieu. Et sur-le-champ tous entendirent une voix qui sortit de l’oracle et du lieu du propitiatoire, qu’il fallait, suivant la prophétie d’Isaïe, chercher quelqu’un à qui cette vierge devait être recommandée et donnée en mariage. Car on sait qu’Isaïe dit : Il sortira une verge de la racine de Jessé ; et de cette racine il s’élèvera une fleur sur laquelle se reposera l’esprit du Seigneur, l’esprit de sagesse et d’intelligence, l’esprit de conseil et de force, l’esprit de science et de piété ; elle sera remplie de l’esprit de la crainte du Seigneur. Il prédit donc, selon cette prophétie, que tous ceux de la maison et de la famille de Davide qui seraient nubiles et non mariés n’avaient qu’à apporter leurs verges à l’autel, et que l’on devait recommander et donner la vierge en mariage à celui dont la verge, après avoir été apportée, produirait une fleur, et au sommet de laquelle l’esprit du Seigneur se reposerait en forme de colombe.
1 – Voyez Peyrat, Histoire de Jésus, liv. I, chap. III. (G.A.)