SATIRE - Lettre du secrétaire de M. de Voltaire

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SATIRE - Lettre du secrétaire de M. de Voltaire

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LETTRE DU SECRÉTAIRE DE M. DE VOLTAIRE

 

AU SECRÉTAIRE DE M. LE FRANC DE POMPIGNAN.

 

 

 

– 1763 –

 

 

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[Cette lettre date des premiers jours de l’année 1763. Le secrétaire Wagnière en a toujours revendiqué la paternité. Elle a été insérée avec des variantes dans les Lettres de M. de Voltaire à ses amis du Parnasse, 1766.] (G.A.)

 

 

 

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MONSIEUR,

 

 

          Vous avez écrit trois lettres à M. de Voltaire, signées Ladouz, à l’hôtel des Asturies, rue du Sépulcre. Vous lui dites dans ces trois lettres que vous avez été le secrétaire du célèbre M. le Franc de Pompignan ; que vous n’avez plus le bonheur d’être chez lui, et qu’il vous a renvoyé, parce qu’il vous soupçonnait d’avoir fourni à M. de Voltaire des mémoires contre lui.

 

          Vous demandiez à M. de Voltaire une attestation qui détruisît cette calomnie. Il vous répondit qu’il ne vous connaissait pas, que vous ne le connaissiez pas, et qu’on ne lui avait jamais envoyé d’autres mémoires contre M. le Franc de Pompignan que ses propres ouvrages. Il me charge, étant vieux, malade, et presque aveugle, de vous répéter la même chose de sa part.

 

          Voici tout ce qu’il connaît de M. le Franc de Pompignan (1) :

 

          1°/ D’assez mauvais vers.

 

          2°/ Son Discours à l’Académie, dans lequel il insulte tous les gens de lettres.

 

          3°/ Un mémoire au roi, dans lequel il dit à sa majesté qu’il a une belle bibliothèque à Pompignan-lez-Montauban (2).

 

          4°/ La description d’une belle fête qu’il donna dans Pompignan, de la procession dans laquelle il marchait derrière un jeune jésuite, accompagné des bourdons du pays, et d’un grand repas de vingt-six couverts, dont il a été parlé dans toute la province.

 

          5°/ Un beau sermon de sa composition, dans lequel il dit qu’il est avec les étoiles dans le firmament, tandis que les prédicateurs de Paris et tous les gens de lettres sont à ses pieds dans la fange (3).

 

Mon maître a appris aussi que M. Le Franc de Pompignan (quoiqu’il soit noyé) se comparait à Moïse, et que monsieur son frère l’évêque était Aaron ; il leur en fait ses compliments (4).

 

          Il a entendu parler aussi d’une pastorale de monsieur l’évêque, adressée aux habitants du Puy-en-Velay, par Monseigneur : Cortiat (5), secrétaire. On lui a mandé que dans cette pastorale il est question d’Aristophane, de Diagoras, du Dictionnaire encyclopédique, de Fontenelle, de La Motte, de Perrault, de Terrasson, de Boindin, du chancelier Bacon, de Descartes, de Malebranche, de Locke, de Newton, de Leibnitz, de Montesquieu, etc.

 

          Nous félicitons messieurs du Puy-en-Velay d’avoir lu les ouvrages de tous ces messieurs : tel pasteur, telles brebis. Mais mon maître n’entre dans aucune de ces querelles scientifiques ; il cultive la terre avec bien de la peine, et laisse les grands hommes éclairer leur siècle.

 

          Vous lui mandez que monsieur l’évêque d’Alais veut vous prendre pour secrétaire, en cas que vous ayez une attestation en bonne forme, que vous n’ayez point trahi les secrets de M. Le Franc de Pompignan : il vous envoie cette attestation, et il se flatte que quand vous serez à M. d’Alais vous ne ressemblerez pas à M. Cortiat, secrétaire.

 

 

P.S. – Je vous demande pardon, monsieur ; j’oubliais, dans les ouvrages de M. Le Franc de Pompignan, la Prière du déiste, qu’il a traduite de l’anglais (5).

 

 

1 – Voyez, sur le Franc de Pompignan, aux POÉSIES et au FACÉTIES.

2 – C’est dans une lettre imprimée qu’il parle de sa bibliothèque.

3 – « 6°/ Une jolie femme très riche, très dévote, très aimable, qui pleure le soir et le matin d’avoir perdu ses chers amis, ses chers affidés ignaciens ; qui a donné un fils au seigneur de Pompignan, son digne époux, et qui se repent d’avoir cru épouser un Apollon, etc., etc. » Variante de 1766. (G.A.)

4 – C’est Dupré Saint-Maur qui, à la réception de Le Franc à l’Académie, avait fait cette belle comparaison. (G.A.)

5 – Ou plutôt Cortial. (G.A.)

 

 

 

 

 

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